Pétain, OGM, même con bât.

Le catalogue du GNIS (groupement national interprofessionnel de semences) régit les semences autorisées (par Monsanto et consorts) pour lesquelles on s’acquitte chaque année d’un droit puisqu’elles ne sont par fertiles. « Et il est interdit de commercialiser, cultiver, de distribuer des semences de toute variété qui ne soit pas inscrite sur cette liste nationale. Les pouvoirs publics disent que c’est pour protéger les consommateurs » (Dominique Guillet) *
A l’heure où s’ouvre le procès des 82 arracheurs d’OGM Monsanto,  il est bon de rappeler que :
1/  depuis le « délit », ces OGM ont été interdits en France.
2/  le GNIS a été créé en 1941, sous l’occupation,  par le maréchal Pétain soi-même, ainsi que le fameux CTPS qui décide de tout en matière de semences. ! Quelles bonnes idées il avait, ce bon Français patriote et collabo ! Il a créé aussi  l’ordre des médecins, des pharmaciens, des vétérinaires,  avec, dans la foulée, la suppression des diplômes de médecin herboriste et de médecin homéopathe.  Et bien d’autres choses pour formater et mettre en fiches tout ce qui se pouvait. Plein de mesures pour faire main basse sur le vivant au détriment des populations. Et ni de Gaulle, ni les communistes, ni personne — personne ! — n’a abrogé ces pratiques anticonstitutionnelles. Et pourquoi ? Ah, mais c’est que ça foutrait le bordel, de ne plus avoir le contrôle, ça ferait du manque à gagner ! Pensez, d’un seul coup, cultiver son champ pourrait être gratuit !
C’est pour ça qu’aujourd’hui, nombre d’associations luttent contre cet état de fait. L’une d’elles, Kokopelli, association « rebelle » qui commercialise des semences libres, est en procès constant avec les pouvoirs publics.  Alors que ses produits sont utilisés dans les grands restaurants et les lieux de pouvoirs parce que, bien sûr, les aliments issus de ces semences ont un goût, et ce goût, on ne le trouve plus dans la grande consommation. Si c’est pas de la bonne démocratie, tout ça !

*  Dominiqe Guillet, qui a contribué au livre de Coline Serreau Solutions locales pour un désordre global ajoute : » pourquoi n’existe-t-il pas un catalogue des camemberts, des chaussettes et des réfrigérateurs ? C’est clairement pour protéger les multinationales qui ont confisqué la totalité du vivant en Europe. »

Les dix stratégies de manipulation de masses. Eh oui, c’est scientifique.

D’une pertinence absolue à la lumière de l’actualité politique actuelle !

Le linguiste nord-américain Noam Chomsky a élaboré une liste des « Dix Stratégies de Manipulation » à travers les média. Nous la reproduisons ici. Elle détaille l’éventail, depuis la stratégie de la distraction, en passant par la stratégie de la dégradation jusqu’à maintenir le public dans l’ignorance et la médiocrité.

1/ La stratégie de la distraction

Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux, captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé, occupé, occupé, sans aucun temps pour penser; de retour à la ferme avec les autres animaux. » Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »

2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions

Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.

3/ La stratégie de la dégradation

Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme) ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.

4/ La stratégie du différé

Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu.

5/ S’adresser au public comme à des enfants en bas âge

La plupart des publicités destinées au grand public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-age ou un handicapé mental. Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celles d’une personne de 12 ans ». Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »

6/ Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion

Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…

7/ Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise

Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »

8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité

Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…

9/ Remplacer la révolte par la culpabilité

Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…

10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes

Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.

texte © Noam Chomsky. Illustration © dominiquecozette

l’Erika, le PIB et la demande…

Il aurait eu tout pour me plaire sauf qu’il n’était pas beau, pas grand, pas très gentil, pas drôle du tout, c’était un mauvais coup, il était vieux et vieux jeu et, cerise sur le gâteux, il critiquait ma mère. Il la trouvait gauchiste, gnan- gnan et — c’était nouveau, il venait de lâcher le mot — contre-productrice dans ses multiples postures de bénévole. Nous marchions côte à côte sur nos tapis roulants face à l’immensité de la forêt virtuelle, un DVD qui passait en boucle sur l’immense écran pour donner l’illusion. Je m’arrêtais net et faillis me casser la figure car il n’y a rien de plus stupide que de cesser de marcher sur un tapis de marche. Bref, je lui demandai de justifier ses dires.
– Le naufrage de l’Erika constitue un bon exemple. Dans cette obsession de la croissance, une catastrophe écologique comme celle de l’Erika est considérée comme productrice de richesses.
– Tu te fous ma gueule !
– Je t’explique : les bénévoles qui ont eu la mauvaise idée de participe—  gratuitement par le fait — à la dépollution des plages, non seulement ils comptent pour du beurre, mais en plus, comme il aurait de toute façon fallu dépolluer ces plages, on aurait fait appel à du personnel rémunéré, qui, lui, aurait été enregistré dans les comptes. Dans l’activité si t’aimes mieux. Serait rentré dans le PIB. Le truc, c’est ça : du point de vue de la comptabilité nationale, le bénévolat est source de perte sèche de richesses. C’est ce qu’on appelle le paradoxe de l’Erika.
– Ça alors ! Tu veux dire premièrement que les bénévoles, c’est nul en terme de richesse vive et deuxièmement, qu’une catastrophe, quelle qu’elle soit, produit de la richesse ? Jamais je n’aurais pensé à ça !
– C’est normal, on n’en parle jamais !  Cette question reste confinée aux débats internes de l’état, entre spécialistes, quoi. On préfère que ça reste caché.
– Alors, pourquoi critiques-tu ma mère ?
– Parce que c’est dans la nature des hommes, de critiquer leur belle-mère !
– mmmémémé mais on n’est pas mariés !
– Justement, c’est le moment d’en parler. Arrêtons le bénévolat marital, passons professionnels ! Faisons bosser les maires, les notaires, les traiteurs, les tailleurs et les couturiers, les coiffeurs et esthéticiennes, les loueurs de voitures, de sono, de lumières, les cavistes, les restaurateurs, les imprimeurs, les fleuristes, les chambres d’hôtel, les chausseurs, les pharmaciens…
– les pharmaciens ?
– Alka-seltzer et Viagra sont les deux mamelles de la teuf. Et les photographes, les bijoutiers, les prestataires de services divers, transports, tourisme, banques, la Poste, EDF, Veolia etc… tu vois comme ça fait bosser, de faire les choses normalement, chérie ?
« Chérie ». Ça alors ! Pour une demande en mariage, il n’y est pas allé de main morte. Vu sous cet angle, mon futur mari est devenu d’un coup très baisable. Regardez-le qui se rengorge, sur son tapis roulant, comme si de rien n’était, ses petits mollets nerveux se contractant au rythme de la tachycardie qui un jour l’emportera loin de là, dans un hôpital ou pire ! Ce qui contribuera encore à enrichir le pays. Good guy !

Dessin et texte © dominiquecozette d’après Patrick Viveret, ex de la Cour des Comptes.

Le bouclier fisc-sale contre les salauds d’pauvres !

– Dis papa, toi aussi tu as un bouclier ?
– Un bouclier fiscal, oui bonhomme. C’est contre les pauvres. Tu sais comment ils sont avides, cupides, comment ils nous agressent pour nous piquer notre fortune…
– Heureusement qu’y a pas de pauvres, ici. j’aime pas les pauvres. Ils sentent la sueur.
– …
– hein papa, ils sentent la sueur ? Pourquoi ils sentent la sueur ?
– C’est parce qu’ils travaillent d’une façon, heu, pas comme nous, si tu veux.
– Comme quoi, alors ?
– Moi, par exemple, je ne prends pas le métro, je ne cours pas, je n’ai pas besoin d’être à l’heure…
– Et ça fait quoi, d’avoir un bouclier fisc-sale ?
– Fiscal, bonhomme. Ça fait que l’Etat m’a donné un chèque de 362 000 euros parce que j’avais payé trop d’impôts. Enfin, trop d’impôts, non, pas vraiment, grâce aux systèmes d’optimisation et autres…
– Combines ?
– Ne dis jamais cela, bonhomme. Ce sont les pauvres qui disent cela. En réalité, ils s’agit de placements totalement légaux, de défiscalisations totalement légales, toutes sortes de choses mises en place par des présidents intelligents et pleins de bon sens pour les gens comme moi, qui font rentrer beaucoup d’argent dans les caisses.
– Tu sais, papa, maman elle m’a dit que tu lui devais deux mois de pension, et que t’étais rien qu’un voleur !
– Ta mère me gave ! Elle a vraiment besoin de ça pour te nourrir ? Avec tout le fric de son nouveau mec !
– Oui mais comme il est américain, il a pas de bouclier, lui. Alors y a tous les salauds d’ pauvres qui lui piquent ses sous. Dis papa, pourquoi on leur donnerait pas des sous aux salauds d’pauvres pour qu’ils arrêtent de nous voler ?
– Mais c’est à EUX de nous donner des sous, bonhomme, c’est à ÇA qu’ils servent les pauvres ! Comment on s’en sortirait sinon ? Ça t’arrive de te servir de ton cerveau ??? Pfffff…

Plus de détails sur les 679 millions d’euros reversés aux riches par l’Etat providence sur Libé, par exemple

Texte et dessin © dominiquecozette

Empêcher les chasseurs de chasser : un nouveau délit

« Christian Frémont, directeur de cabinet du président de la République, l’affirmait le 2 septembre (09) : « Je suis le porte-parole des chasseurs en permanence à l’Elysée ». Désormais, à la demande du parti d’extrême- chasse, dont les désirs sont des ordres, l’opposition à la chasse pourra être être assimilée au blasphème cher aux théocraties. Depuis le 4 juin, le fait de s’opposer à une chasse sera passible d’une amende de 1500 euros. Les chasseurs ne supportent ni contrainte, ni critique, au mépris de l’opinion (74% des Français sont opposés à la chasse à courre, 47% à la chasse, 98% ne chassent pas). Or, depuis deux ou trois ans, des manifestations contre la chasse à courre se multiplient, sur les lieux mêmes des carnages annoncés, façon d’exprimer une opposition que le pouvoir ne veut pas entendre. En bonne logique, un représentant du lobby chasse à l’Assemblée, qui obtient une nouvelle loi chasse tous les deux ans, en l’occurrence le sénateur UMP Poniatowski, avait demandé en décembre 2008 la création d’un « délit d’entrave à la chasse » qui lui a été refusé. Chassé par la porte, ce délit revient par la fenêtre sous forme d’un simple décret.
La chasse sera donc le seul loisir surveillé par la police et interdit par la critique.
(…) (Rappelle que) les fédérations de chasse, créées en 1941 par un décret du maréchal Pétain, restent fidèles à leur vocation.
(…) Si l’on relie ce nouveau délit à « l’affaire » du purin d’ortie, au durcissement de la répression contre les faucheurs d’OGM ou à la loi 1216 en préparation , dont l’article 5 entend protéger contre toute contestation « les intérêts de l’état » (ce qui touche au nucléaire, aux déchets toxiques ou à « l’aménagement du territoire »), on comprend bien qu’il s’agit de faire taire les empêcheurs de polluer et de détruire en rond, en particulier les écologistes toutes catégories confondues, et qu’au lieu d’un « Grenelle » de l’environnement, on avance à grand pas vers un Fleury-Mérogis de l’environnement. Ce qui devient illégal, ce n’est pas de détruire la nature, mais de vouloir la protéger.
(…) En revanche, compte tenu des plaintes récemment déposées, c’est la France qui devra bientôt s’expliquer devant la Cour de justice des communautés sur sa politique d’Etat braconnier en matière de sauvegarde des espèces et sur le fait que la seule qu’elle protège, c’est le chasseur (…) une espèce menaçante. »

Extraits d’un article  d’Armand Farrachi, responsable du collectif pour l’abolition de la chasse à courre, paru dans Libé du 7/7/10.
Dessin © dominiquecozette

Les pecquenots

C’était tôt et déjà, il me soulait avec ses histoires de  terre, de sols etc …en s’étrillant au savon Marseille, coupant l’eau à chaque opération. Merde, j’étais encore tombé sur un pur produit de la théorie écologique  !
« Autrefois, on ne disait pas un agriculteur, on disait un paysan. Aujourd’hui, on a l’impression que c’est une insulte. Ça fait plouc, cul-terreux. En fait, ce qui leur plaît, c’est d’être exploitants agricoles. Le mot « exploitant » est parfaitement clair : on exploite la terre – Tu comprends ça, non ? – Alors qu’avec le mot « paysan », on comprenait qu’il faisait le pays. Il construisait des haies, s’occupait des chemins, gérait les fossés. Il construisait un équilibre agro-sylvo-pastoral : le champ, la forêt, les animaux, cet équilibre qu’on est en train de détruire depuis cinquante ans en mettant les cultures d’un côté, les animaux qu’on entasse dans des usines de l’autre, et puis la forêt qu’on parque ou qu’on cultive, comme les céréales, en plantant les arbres en ligne… Le cauchemar, quoi ! »
Oui, bon, c’est important, il a raison, mais moi ça me gave, j’habite dans le 5ème, alors les haies et les fossés ! Et, lui, s’entêtant :
« Aujourd’hui, il n’y a plus une haie. On a tout arraché. On a fait des déserts biologiques qui ne fonctionnent qu’à coup de pesticides, parce que les plantes sont dans un tel état de maladie que, si on ne les traite pas, on n’a plus rien. En 1950 – bon, on n’était pas nés –  on ne traitait jamais un blé. Maintenant, on le fait 3 à 6 fois par an. Les arbres fruitiers reçoivent jusqu’à 40 traitements par an. Le pire, c’est l’artichaut, qui est traité quasiment tous les jours. (passant sa tête shampooinée hors du rideau) Tu te rends compte ? Tous les jours, l’artichaut ! »
Moi, je n’en mange jamais, je n’ai pas de cocotte-minute et dans les restos, c’est assez rare d’en trouver…
« On ne mange que des plantes malades, continuait-il patiemment sans me demander si ça m’intéressait, que des animaux malades, ce qui rend les gens malades. Alors la médecine vend ses médicaments et comme ce sont les mêmes boîtes qui font tous les produits…Cycle magnifique, ça, c’est superbe, ça ! (Repassant sa tête, mais rincée, hors du rideau), c’est superbe, non ? Quand des paysans se suicident, ils se suicident avec des pesticides. L’agriculteur ne se tue pas au fusil. Il se tue avec le produit qui a tué sa terre. Symboliquement, c’est très lourd. Et ça m’a toujours impressionné… Comment peut-on ouvrir une bouteille de pesticide, et la boire ? Il faut vraiment être au bout du rouleau. Tu sais quoi ? En Inde, chaque année, 22000 paysans se suicident aux pesticides »
Un mec comme ça, c’est pas pour moi. Il sera déçu. Je clope, j’écrase les araignées, trier m’emmerde, je gâche la planète avec toutes sortes de lingettes et j’adore les mecs arrogants en 4×4. J’ai laissé le numéro de téléphone de Clotilde, elle, elle saura. Et j’ai fermé doucement sa porte.

Texte d’après Claude Bourguignon, ingénieur agronome et docteur ès sciences de la microbiologie des sols in Solutions locales pour désordre global, le livre SUPER-IMPORTANT de Coline Serreau chez Actes Sud
dessin © dominiquecozette

Révisions retraites pour le 7 !!!

Aujourd’hui, on nous dit qu’il faut 3 « jeunes » pour payer 3 retraites et que demain, il n’y aura plus que 2 jeunes pour 3 retraités : INTOX ! On nous raconte des bobards et on nous prend pour des cons. Comment ça ? C’est simple, dans le calcul, on oublie (volontairement) que la productivité de chaque Français (qui est une des meilleures du monde), augmente à la vitesse grand V. Dans 30 ans, la richesse de la France aura doublé et il y aura largement de quoi assurer les retraites des jeunes d’aujourd’hui. C’est expliqué très simplement et avec beaucoup d’humour par Franck Lepage ici. (que j’ai déjà passé en août, c’est une révision). Il s’appuie sur l’excellent économiste Bernard Friot qui a sorti un très bon bouquin sur le sujet. Ça devrait vous rassurer.

Sauf que sur France Inter, l’autre jour, Friot nous a appris que cette réforme, retraite à 62 ans, taux plein à 67, avec des seniors qui sont de plus en plus tôt au chômage donc qui n’auront pas leur taux plein, sera une façon se constituer un réservoir de personnes âgées corvéables à merci (puisque ne touchant pas grand chose) et particulièrement de femmes puisque moins payées que les hommes, ayant moins travaillé pour cause d’enfants sinon dans des emplois beaucoup plus précaires. Bon, c’est pas drôle. Alors, allez voir cette vidéo et marchez, si vous le voulez, contre le « courageux » Woerth et sa « courageuse » réforme qui, n’en doutons pas, sera forcément favorable aux petits que nous sommes. Ha ha ha !!!

Texte et dessin © dominiquecozette

Golden, la pomme à thunes

Il s’agenouilla dans le confessionnal. Son haleine sentait l’ail et la menthe, comme s’il avait désiré gommer la première odeur par la seconde. Il fit le signe de croix et, tandis que je replongeai le regard dans ma bible, à la page marquée par une image de Richard Gere en 1984, il entama sa confession avec une voix rocailleuse, comme un vieux bandit corse :
« Ce que les gens ne savent pas, mon Père, c’est qu’il y a une entente entre les semenciers et la marchands d’engrais. Prenons l’épeautre qui est une espèce de blé très rustique qui n’a pas besoin d’engrais. (Il marqua une pause pour me faire relever les yeux vers lui) Il a été éliminé du catalogue des semences parce que, comme il ne nécessite pas d’engrais, on ne peut pas faire d’argent avec lui. Tout ce qui ne permet pas de faire de l’agro-business a été retiré.
Après, on dit aux gens que si on ne met pas d’engrais, rien ne pousse. »
Il sortir un kleenex de son pantalon Tom Truc, essuya son front bombé, regarda la trace de sueur comme les vieux regardaient leur morve, chiffonna le tout et poursuivit, sur un ton de complot :
« L’Inde avait 100 000 variétés de riz. 100 000, mon père ! A l’heure actuelle, il lui en reste une dizaine, cultivées massivement. 10 sur 100 000, mon père !
En Europe, il y avait 3600 variétés de fruits en 1904. Il fallait 13 volumes pour décrire les pommes de France. A l’heure actuelle,  vous n’avez plus que sept variétés de pommes commercialisées en France, dont la majorité sont américaines. US, mon père ! Nous payons des royalties aux semenciers américains, alors que nous avions la plus forte densité de fruits au monde, adaptés à chacun de nos terroirs. Vous rendez-vous compte, mon père ? »
Il sortit alors un peigne à poux et joua du pouce avec.
 » Le pire, mon Père, c’est la Golden. La Golden occupe 90% du marché. Et pourquoi la Golden ? Parce que c’est la pomme qui demande le plus de traitements phytosanitaires, 36 traitements au minimum par an. C’est pour ça qu’on l’a imposée. La PAC, vous savez ce qu’est la PAC, mon père ? La Politique agricole commune — soutenue par les grandes firmes qui vendent les pesticides — a même financé l’arrachage des variétés européennes de pommes, pour mettre de la Golden à la place. Mon père, arrêtons de fustiger Eve et la Pomme ! (Sa voix s’encoléra) Eve est une femme qui a eu les couilles de dire non au Pouvoir ! Eve est une sainte, mon Père !!! »
Il se leva, tendu. Je lui prescrivis cinq Je vous salue Marie. Puis décidai de remplacer cette vieille photo de Richard Gere par une image de Sid Vicious  confisquée à mon enfant de choeur.

Texte © dominiquecozette d’après Claude Bourguignon, ingénieur agronome et docteur ès sciences de la microbiologie des sols in Solutions locales pour désordre global, le livre de Coline Serreau chez Actes Sud.
Dessin © dominiquecozette



Algues vertes, OGM & autres saloperies

Le mec en 4X4 noire vitres noires qui m’avait prise en stop dans cette plaine de Nullepart où ne paissait rien mais poussait du maïs arrosé, entreprit de me faire la conversation tout en continuant à téter un énorme cigare étronique et à visionner un porno d’un pénis distrait :
« Autrefois, le lisier —  les excréments des animaux — précisa-t-il  à la blondasse que j’étais, était mélangé à la paille, et cela donnait l’or noir des étables. Mais, comme on a divisé, cloisonné et délocalisé les productions, on a la paille et les céréales en Beauce (il fit un large geste du bras droit en direction du plat pays) et l’élevage en Bretagne. Et on en peut même pas restituer la paille en Beauce, parce que le sol n’a plus les bactéries nécessaires pour la digérer, elle se retrouve intacte dans les sols, trois ou quatre ans après. Donc on la brûle. En, ce faisant, on déminéralise encore plus le sol, on détruit encore plus sa faune. Pendant ce temps, en Bretagne, le lisier part dans les rivières et sur le littoral, provoque les marées vertes au printemps. »
Il se tourna vers moi et éclata de rire ! « Pauvres vacanciers ! ».  Puis poursuivit:
« Les OGM, voyez-vous, génèrent l’affrontement entre deux droits de propriétés. Si je cultive mes espèces normales mais que mon champ est contaminé par des OGM, je ne suis plus propriétaire de ma récolte. PLUS PROPRIÉTAIRE DE MA RÉCOLTE ! martela-t-il. Celle-ci appartient au propriétaire du brevet des OGM. C’est comme ça que des paysans américains et canadiens ont été ruinés ces dernières années par Monsanto. Vous connaissez forcément Monsanto. Imaginez si Lavoisier avait déposé un brevet sur l’azote et sur la carbone et que plus aucun scientifique n’ait pu travailler dessus ! Où en serait-on ? »
Il éclata de nouveau d’un rire obscène au moment où le comédien déchargeait un tube de lait Nestlé sur le ventre de la nana.
 » Moi, je vous raconte ça mais je m’en tape ! J’ai pas de gosses, la planète de toute façon elle continuera sans nous, alors les OGM, les pesticides et tout ça, moi, c’est la thune qui m’intéresse, pas vrai ? »
Intérieurement, je m’en voulais de m’être encore trompée d’histoire d’amour. Enfin, je n’avais qu’à monter dans le véhicule précédent, une vieille bétaillère conduite par un vieux bonhomme sans dents.

Texte d’après Philippe Desbrosses, agriculteur, docteur en sciences de l’environnement, université Paris-VII, directeur du centre-pilote de la Ferme de Sainte Marthe et président d’Intelligence verte (association pour la promotion de la biodiversité). In Solutions locales pour un désordre global, le livre de Coline Serreau chez Actes Sud.
Dessin poussif © dominiquecozette

Et le bousier, dans tout ça ?

La plus belle femme du monde me fixait d’un oeil torve alors que je lui racontais ce qui me préoccupait le plus sur cette planète : la disparition de la biodiversité, tandis que le maître d’hôtel découpait l’os de la côte sur une épaisse planche en citronnier.
– Le bousier, par exemple. Ah, le bousier ! T’en as jamais vu ? Impressionnant, cette petite bestiole qui pousse, tel Sisyphe, une énorme boule de bouse. Mais il a disparu des pampas australiennes parce qu’en remplaçant le vermifuge naturel qu’on donnait au bétail par des produits chimiques, on a intoxiqué les bouses et tué les bousiers.
– C’est gracieux, tout ça ! Qu’est-ce qu’on en a à foutre des bousiers ?
– Eh bien figure-toi que le bousier est le seul être qui déconstruise la bouse…
– Franchement, c’est passionnant !
– Alors la bouse reste intacte et empoisonne le sol. Et on y voit pousser des refus, des herbes énormes et âcres que les animaux ne veulent pas manger. Et alors la prairie se dégrade et
– Et alors ? Et alors ???
– Et les bactéries du sol disparaissent. Donc plus de sol, plus de bétail, tu vois le topo !
– C’est chiant, ton truc, ta bouse, tout ça, on s’en tape !!! (dit-elle en enfournant un gros morceau de viande)
– Eh bien le gouvernement australien vient de voter un crédit de 15 milliards de dollars
– QUINZE MILLIARDS  DE DOLLARS ????? (Elle s’étouffe, tousse, devient rouge, se ridiculise, je ne l’aime plus, ça y est, je la trouve moche)
– … pour réintroduire le bousier. Tu vois la connerie du monde dans lequel on vit, finis-je vivement en sortant ma pince à billets et en ajoutant bien fort :  Garçon, l’addition, s’il vous plaît !
Et je quittais la table, la laissant perplexe devant cette histoire agro-écologique dont elle n’avait rien à foutre car rien ne l’intéressait hors la marque de ses chaussures, le prix de son sac et le nombre d’étoiles de l’hôtel où quelqu’un de plus con que moi l’aurait invitée à passer la nuit. Merde !

Dessin et texte © dominiquecozette d’après un texte de Philippe Desbrosses, agriculteur, docteur en sciences de l’environnement, université Paris-VII, directeur du centre-pilote de la Ferme de Sainte Marthe et président d’Intelligence verte (association pour la promotion de la biodiversité). In Solutions locales pour un désordre global, le livre de Coline Serreau chez Actes Sud

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