Un Duroy gouleyant

Rentrée littéraire. Gouleyant, vu le sujet, n’est pas vraiment la qualificatif adapté au thème de ce nouveau livre d’un de mes écrivains favoris, à savoir la déportation méconnue d’opposants aux communistes roumains dans les années 40 et 50.
La chair du récit, Un mal irréparable, est donnée par le vieil écrivain, Frédéric Riegerl, qui se prend à s’interroger sur sa petite enfance dont il n’a aucun souvenir, aucune photo, dont ses parents ne lui ont jamais parlé. Il se souvient juste, après avoir vécu « dans un maison de campagne » en Roumanie parfois évoquée, de leur vie à Paris avec avant de partir faire sa vie aux Etats-Unis où il devenu écrivain à succès.
Ses parents sont morts, bien sûr, et il n’a jamais ouvert le coffret qui contenait leurs souvenirs, papiers, documents. Il le fera plus tard, sur place, dans ce périple en Europe centrale où il réalise que la fameuse maison de campagne était un goulag sans aucune commodité, que sa petite sœur de dix-huit mois n’était pas morte des suites d’une maladie infantile mais de faim car cet endroit désertique et hostile où ses parents ont été déportés sans aucune raison les a obligés à vivre dans des conditions épouvantables et cruelles, pire que ce que vivent les bêtes. Une horreur qu’il a fini par découvrir dans le cahier écrit pas sa mère.
Dévasté, il n’aura alors de cesse de tenter de retrouver les quelques personnes encore vivantes, les enfants du moins, ou des documents lui ouvrant les yeux, de revoir le goulag (disparu car rasé par Ceaucescu), les maisons où ont vécu ses parents. Et il en ressentira une forme de honte d’arriver trop tard, de ne pas s’être plus intéressé à leur vie, leur passé et de ne pas avoir compati à l’horreur qu’ils ont subie. Il réussira à retrouver la jeune voisine du goulag dont il était amoureux quand il était petit, une très vieille dame.
L’histoire écrite par sa mère, dans le coffret qu’il finit par ouvrir, est comme un roman dans le roman. Construction assez bizarre mais ça n’enlève rien au récit des horribles années de tous ces déportés dans des conditions de vie inhumaines.
Encore un livre qui m’a passionnée, mais je n’ai rien trouvé sur sa sortie qui m’indiquerait sa proximité avec le passé de Duroy.

Un mal irréparable de Lionel Duroy, 2025, aux éditions Mialet Barrault, 380 pages.

Texte © dominique cozette


Un pont sur la Seine

Rentrée littéraire. Mis à part le fait que je n’aime pas les nouvelles sur-couvertures de Grasset, voici Un pont sur la Seine, un livre qui sort totalement de l’ordinaire de cette rentrée focalisée principalement sur les violences faites aux femmes ou l’histoire du père ou celle de la mère.
Ici, Pauline Dreyfus nous raconte comment un pont jeté entre deux petites communes de chaque côté de la Seine a retricoté drastiquement la vie des gens. Car au lieu de les relier, il les a séparés.
Donc d’un côté, à Saint-Amand, on cultive le chasselas, cépage de luxe dont sont friands les Russes et qui permet aux Vernet de vivre confortablement de leurs récoltes. Et de l’autre, Champagne (rien à voir avec l’appellation) où va se construire une usine, on est au début du XXème siècle, symbole du progrès et du développement du pays. L’un des Vernet, plutôt que de rester du côté des viticulteurs qui deviendront bientôt les ploucs, passe le pont et pourra donner libre cours à ses ambitions. Et pendant que ses frères et cousins partent se faire massacrer au front de la grande guerre, lui reste à l’usine pour y fabriquer des armes. Ce qui est aussi une façon de pariciper à la guerre.
L’écart entre ce que les deux populations vivent va se creuser de plus en plus au fil des années. Les alliances familiales deviennent impossibles, le mépris s’installe envers les paysans dont le cépage n’attire plus, mais la roue tourne, il y a une autre guerre, les Vernet croissent, et bien plus tard, ces ploucs remettrons St Amand au goût du jour avec force bals, guinguettes, baignades dans la Seine qui vont attirer tous les Parisiens branchés, ce qui rendra cette fois l’autre village totalement ringard. On va suivre le parcours des descendants de ces pionniers, les trahisons, les haines, les tromperies, les accidents créés par le pont. Très intéressant.

Un pont sur la Seine de Pauline Dreyfus, 2035 aux Editions Grasset, 208 pages.

Texte © dominique cozette

Lanceuse d’alerte

Rentrée littéraire. L’incendiaire est un roman implacable sur les lanceurs/euses d’alerte écrit et remarquablement documenté par Constance Rivière. La première grande partie du livre est romancée : Alexandra revient dans sa petite ville pour travailler dans l’usine de produits chimiques, à un poste important, responsable administrative. Le nouveau patron, Paul, un jeune requin des affaires, ambitieux, mâle alpha, arrogant n’a qu’une idée en tête : le développement du site en dépit de toute prudence par rapport aux risques que font courir ces produits hautement inflammables et dangereux. Mais elle s’y intéresse de plus en plus, enquête, interroge et, telle Cassandre, voit venir une prochaine catastrophe vu la façon dont est négligé le traitement des déchets laissés à l’abandon. Il suffit d’une étincelle.
Leur entente est bonne au début, d’autant plus qu’elle est très belle, libre, c’est une fêtarde et c’est connu, et le patron ne doute pas une seconde qu’elle lui tombera dans les bras. Mais lorsqu’elle se refuse à lui, il va l’humilier de façon irréversible. Ce sera sa croix. Elle a été mise au placard et plus personne ne lui parle à l’usine, sauf un homme qui partage ses craintes, seul soutien mais impuissant. Alors, elle disparaîtra, elle coupera le cordon avec cette vie. Ce qui n’empêchera la catastrophe redoutée de survenir, un incendie redoutable chargé de vapeurs toxiques, rendant l’air irrespirable.
La deuxième partie plus courte traite des lanceurs/euses d’alerte (plutôt des femmes, d’ailleurs) qui ont vu leur vie saccagée par tous ceux qui ne voulaient pas les croire, ou donner du crédit à leurs démarches ou simplement qui les ignoraient car ça allait contre leurs intérêts (ce qu’on vit en ce moment un peu partout dans le monde avec le problème du climat).
Dans la troisième partie, on la retrouvera dans sa nouvelle vie.

L’incendiaire de Constance Rivière, 2025 aux éditions Stock. 256 pages.

Texte © dominique cozette

Que s’est-il passé dans le lotissement ?

Rentrée Littéraire. Ça commence fort, Le lotissement de Claire Vésin : une ado en colère est en train de mettre le feu au garage de leur pavillon. C’est évident qu’elle est en rébellion et en veut au monde entier (ses parents) mais il y a eu d’autres événements tragiques dans ce petit coin tranquille de Seine et Marne.
La narratrice, trente ans après les faits qui se sont produits dans les années 80, va remonter le temps pour essayer de comprendre.
C’est un roman choral, chaque chapitre ouvre sur un des protagonistes de cette histoire sordide. Il y a bien sûr l’adolescente, petite nana provocante et agaçante, aînée de quatre enfants. Sa mère, débordée, jamais aidée par le père. Il y a la reine du lotissement, Béatrice, femme parfaite, superbe, tirée à quatre épingles, amoureuse de son mari, quatre enfants aussi toujours impeccables, un modèle quoi. Il y a François, le garagiste, marié et père, beau mec dont tombent amoureuses notre ado et plus tard, la nouvelle institutrice. Cette institutrice remplaçante venue de Guadeloupe, très jeune, très belle, très court vêtue, qui, manquant d’expérience, enseigne principalement la poésie à ses élèves de CM1 et 2. Et la mère d’un garçon différent qui va dénouer les liens à la fin du livre.
Ce roman se compose donc de petites vignettes sur la vie de ces voisins, avec leurs manies, leurs qualités et leurs défauts, leur complicité ou non et leur regard sur les années en question. La construction de petits immeubles de logements sociaux, pose problème car ils vont forcément attirer des gens non désirés, pas de leur milieu, le racisme larvé, etc. Et comme dans beaucoup de romans de cette rentrée, les chansons d’époque seront abondamment évoquées.
C’est une lecture agréable, fluide, pleine de personnages attachants.

Le lotissement de Claire Vésin, 2025, à la Manufacture de livres. 264 pages, 19,90 €

texte © dominique cozette

Devenir écrivain

Rentrée littéraire. Ce livre, Devenir écrivain d’Alexandre Lacroix, n’est pas un tuto pour ceux que la plume gratouille, c’est son histoire et comment il y est parvenu. C’est en l’entendant à France Inter dans l’émission de Charles Pépin, Sous le soleil de Platon, que j’ai eu envie de le lire. Chance, la personne par qui j’ai tous ces livres de la rentrée en avant première, l’avait reçu.
Notre héros, Alexandre puisque c’est lui, a toujours en envie de faire ce métier, il se serait damné pour ça. Il n’a pas de très grandes ambitions à part ça et pourtant, il est très doué pour les études. Néanmoins, il est très souvent seul, jamais sans ses lectures du genre costaudes et intello, ne fraye pas beaucoup avec les dames, ce n’est pas non plus son sport favori.
En fait il trimballe depuis ses onze ans, un paquet toxique, la mort de son père. Ou plutôt la pendaison de son père qu’il a découverte en rentrant de l’école. Vous parlez d’un souvenir. Mais avant de se décider à écrire sur ce douloureux problème, il procrastine, intelligemment, en absorbant le maximum de bouquins. On le trouve au quartier latin, dans quelques bistrots, parfois mal accompagné, mais aussi flanqué d’une maîtresse régulière avec qui ils ne font que l’amour, rien d’autre.
Quand il se décide à raconter et à montrer la première mouture de son texte qui commence par la pendaison, il se prend un gros vent. Puis il intéresse un jeune éditeur chez Grasset. Puis il aura son contrat mais le bouquin ne peut sortir que dans un an et demi. Il continuera ses études mollement, sa relation avec sa nouvelle fiancée, ses beuveries avec des potes de rencontre dans le bar d’en bas. Son bouquin va être de nouveau refusé malgré un travail de trois ans puis… surprise.
En fait c’est une histoire vraie, son livre qui s’appelle Premières volontés existe comme son tout premier livre et les anecdotes qui y sont narrées sont assez croustillantes. Moi qui ai été chez Calmann et Grasset, je peux confirmer que les personnages cités par leur vrai nom, existent bel et bien.
Et puis, bien d’autres ouvrages ont suivi, romans, essais, réflexions. Celui-ci sort le 21 août.

Devenir écrivain par Alexandre Lacroix, 2025 aux éditions Allary. 370 pages.

Texte © dominique cozette

Un gay chez les cathos

Rentrée littéraire. Formidable ce livre dont il est (encore) peu question dans le fatras de la fin d’été et qui sort le 3 septembre. Clandestin familial de Jean Desportes nous fait pénétrer dans le monde très fermé des grands bourgeois, capitaines d’industrie et autres top managers, grandes écoles,ultra-cathos, qui vivent en communauté, marient leurs filles avec leurs fils à la suite de rallyes, se rendent à la messe tous les dimanches, ont leurs bonnes œuvres, leurs Cercles, leurs country clubs, vivent dans les beaux quartier et sinon, Gstaag, Megève et autres destinations de choix. Personnel domestique of course et surtout, bien pensance et nobles valeurs.
Hubert Dubreuil dirige une grosse entreprise de parfums haut de gamme transmise par sa riche épouse qui lui laisse quartier libre. Elle a dû sacrifier un beau métier artistique pour élever ses quatre enfants dans la foi et la tradition.
Nous allons suivre l’aîné, Antoine, charmant garçonnet, gracieux, pas très meneur, qui n’aime pas les jeux violents. Dès son enfance, on pourra deviner qu’il n’est pas l’héritier que son père attendait pour lui succéder. Il se sent étranger un peu partout où il se trouve, école, famille. C’est un bon garçon, tranquille, conscient de l’importance de la famille dans la vie. Il ne veut pas déplaire, mais plus il grandit, plus son orientation sexuelle, qu’il étouffe, le fait se sentir honteux. Oh, bien sûr, il y a quelques tontons scandaleux dont on a tu les frasques. Lui est constamment en proie aux questionnements de cette nombreuse famille qui ne le voit jamais joliment accompagné, ce n’est pas ce qui manque, les beaux partis, et en plus il est séduisant.
Chacun de son côté, famille et lui, ménage les susceptibilités. Cependant, il faut bien s’arranger quand on veut l’embarquer à la manif pour tous derrière Boutin et Frigide Barjot.
Et quand il se sera libéré des chaînes familiales, il en fera des bringues de rattrapage dans son petit studio, il n’a que trop perdu de temps. Et puis un jour, le grand amour. Mais encore hélas, du point de vue de ses proches quand ils l’apprendront, il s’agit d’un transfuge de classe, fils d’immigré espagnol, parents pauvres etc…
C’est un roman très détaillé sur tout ce qu’il s’est passé ces dernières quarante années (Sida etc) au sujet des homosexuels. Le milieu que l’auteur décrit comporte certes pas mal de clichés mais c’est passionnant d’aller au cœur de leurs états d’âme et de leur bondieuserie. Il n’y a pas prétexte à ironie, c’est ainsi que ces gens vivent sans souhaiter de mal au pauvre pêcheur qui fait aussi ce qu’il peut pour ne pas choquer. Très instructif et même palpitant.

Clandestin familial de Jean Desportes, 2025, aux Editions du Rocher. 464 pages.

Texte © dominique cozette

Justine cherche sa mère désespérément

(Rentrée littéraire). Justine, vingt ans après la mort de sa mère, continue à souffrir de son absence. Dans Une drôle de peine, elle décortique ce qui lui reste de souvenirs (glauques) de sa petite enfance avec sa junkie de maman qui n’a pas su s’occuper de la fillette qui a fini chez son père. Oui, une enfance pourrie où sa maman, superbe mannequin, vivait sur un grand pied grâce au fric de son ex-mari, alcool, amants et amantes, vie à poil, sans morale mais avec des éclairs d’amour dont était dingue la fillette. Jusqu’à ce qu’on la retrouve toute petite endormie sur un palier. La mère volait beaucoup, elle est restée quelques mois À Fleury Merogis et a perdu la garde.
Révision : Justine est la fille de BHL, apparemment un bon père. Il est tombé raide dingue de la mère, une superbe mannequine mais l’a quittée à la naissance du bébé, tellement instable, tellement border line. Pour arranger le tout, Justine a vécu une tendre relation avec Raphaël Einthoven tandis que Carla B. qui roucoulait avec le père de Raph, a fait main basse sur le fils, a fait un gosse avec lui et une chanson sur lui tandis que Justine ne s’en remettait pas… C’est très endogamique tout ça. Aujourd’hui, elle est depuis vingt ans avec un acteur réal, ils ont deux enfants. Mais ça n’empêche : elle est restée bloquée à cette enfance tronquée, avale des tas de cachets, fait ch… tout le monde et décide de partir à la chasse aux souvenirs.
C’est comme du Closer, j’exagère à peine, mais ça m’a accrochée, ses rapports avec son père connu sont intéressants, les détails qu’elle déballe sur sa famille notamment les grands-parents maternels peuvent être gênants et l’évolution du cancer de sa mère sont parfois très crus. N’empêche, le chagrin semble énorme, poignant, inexorable et elle assume tout ce qu’elle même a de gênant pour son entourage.
La quatrième de couv annonce la couleur :  » Est-ce que tu me vois, maman ? J’ai deux crédits à la banque, deux enfants que j’étouffe, quatre chats dont deux débiles et une estropiée, des rides en pattes d’araignée autour des yeux et des oignons aux pieds, le même amoureux qui me supporte et tient bon depuis vingt ans, quelle dinguerie, je ne suis ni parfaitement féministe, ni tout à fait écologiste, ni vraiment révoltée, pas encore alcoolique, plus du tout droguée : je mets beaucoup d’énergie à essayer de ne pas te ressembler, maman, je n’ai pas pu être une enfant et je ne sais pas être adulte. « 
Il se dévore comme une assiette de tapas…

Une drôle de peine de Justine Lévy, 2025, aux éditions Stock. 190 pages

texte © dominique cozette

Sarah Gysler nous emmène

(Rentrée littéraire). J’ai loupé Petite, le premier livre de Sarah Gysler qui a fait un tabac. Mais ce deuxième, Emmenez-moi, est bien placé pour connaître le même sort. C’est un bouquin formidable, l’histoire de sa courte vie, elle est jeune, elle enchaîne les conneries que la pousse à faire le « pou », sale bestiole qui vit dans on cerveau, et la convainc d’acheter un rafiot, une vraie affaire pourrie. Sarah (c’est son histoire) vit en Suisse, plus ou mois chez son père, ça dépend de ses pérégrinations, un père férocement adorable, ouvert à tout notamment aux fêtes, aux amis de ses gosses à qui il offre toujours ses énormes raclettes et chez qui hurle toujours la musique, principalement les variétés que tout le monde peut entonner avec lui et particulièrement Renaud, son idole. Un mec formidable avec qui elle partage un amour inconditionnel. Donc elle fait des haltes chez lui mais cette fois, elle est partie pour Port St Louis dans le delta du Rhône pour naviguer jusqu’en Espagne avec trois potes sur cette ruine même pas aux normes. Elle passe sont temps à vomir puis est elle réellement malade. Halte à tout. Son rafiot sera sa ruine.
Retour au bercail mais ce qui l’attend n’est vraiment pas drôle : son père, la petite cinquantaine, est malade depuis des années et il a fini par se décider pour le suicide assisté, il n’en pleut plus. Pas de pathos du tout dans les semaines qui précèdent le grand départ, tout le monde participe, « la vieillerie » organise la fiesta et ça se passera comme il a dit.
C’est débridé, c’est joyeux, c’est triste aussi, c’est surtout que Sarah n’arrive pas à digérer cette mort. Elle va encore errer de conneries en absurdités, par exemple elle va se faire engager dans une boîte de funérailles pour maquiller les morts, ça n’aura qu’un temps, et tout à l’avenant. Elle vacille, elle va tomber puis se rattrape à un très vieux chat aveugle qui la colle, ça grince de partout, c’est vivifiant, c’est poignant et ça va s’arrêter au premier anniversaire du départ du père, fêté de ouf, encore une sacrée partie où tout est permis… (Emmenez-moi fait bien entendu référence à la chanson de Charles)
J’ai adoré et je cours acheter Petite pour ressentir les mêmes joies de lecture.

Emmenez-moi de Sarah Gysler, 2025 aux 2ditions Equateurs Roman, 190 pages, 19 €.

texte © dominique cozette

La Dame aux oiseaux

(Rentrée littéraire) La Dame aux oiseaux de François Garde nous mène dans un petit port perdu de Bretagne. Tom s’en est éloigné mais quand il apprend que sa mère est malade et y vit seule, il revient au pays et décide d’y rouvrir un bistrot car tous les bars ont fermé alentour et qu’il n’y a plus de vie sociale. Sa mère l’aidera parfois. Les journées sont longues et chargées, Tom n’a que le temps de bosser et de boire des coups avec ses vieux copains d’enfance. Un bonhomme taiseux s’y installe, c’est un passeur dit-il.

Et puis il y a la Dame aux oiseaux, une sexa qui vit à la pointe, seule, et ne vient jamais au village. Sa maison est une vieille bâtisse superbe, bien cachée et difficile d’accès. Et, alors qu’il lui répare quelques dommages, elle commence à lui raconter le grand amour qu’elle a connu avec son père, père qui s’est tué à moto quand il était bébé. La mère de Tom, qui en a souffert, voit cette nouvelle relation d’un très mauvais œil mais ne peut empêcher l’attraction de cette femme charmeuse, élégante sur son fils. Elle lui apprendra enfin tout ce que sa mère a dissimulé.
On l’appelle la Dame aux oiseaux car depuis des années, elle ramasse les oiseaux morts sur la plage et en fait des petits articles qu’elle poste. Ils ont intéressé des ornithologues dont un savant qui est venu travailler chez Tom.
Le mystère qui entoure la vie du père de Tom s’éclaircit peu à peu mais de sales événements vont en découler. Un petit polar sans prétention, parfois naïf, mais assez distrayant. Beaucoup de choses à apprendre sur les plantes et les oiseaux…

La Dame aux oiseaux de François Garde, 2025 aux Editions Grasset. 288 pages

Texte © dominique cozette

Les promesses orphelines

Les Promesses orphelines de Gilles Marchand, c’est l’histoire de Gino, fils d’immigré italien arrivé en France. Un baby boomer qui rêve, c’est l’époque : marcher sur la lune, les voitures qui volent etc.. Il rêve tellement qu’il en oublie de bien travailler à l’école et ça va lui jouer des tours car plus tard, il projette de participer aux nouvelles conquêtes du progrès, notamment l’Aérotrain, ce train suspendu, prouesse technique qu’il finit par aavoir dans la peau. Il veut lui aussi changer le monde. Hélas, ses niveaux d’études sont trop faibles, il participera, certes, mais comme simple ouvrier.
Il vit dans un bled près d’Orléans avec son frère et sa mère depuis que leur père est mort quand il avait huit ans. A l’école, Gino rencontre non seulement un garçon différent que tout le monde méprise mais surtout le grand amour de sa vie qui le restera jusqu’à sa mort. Cette magnifique personne a d’autres ambitions que de croupir ici et rien ne sera vraiment engagé entre eux.
Cette histoire nous ramène dans ces années conquérantes, les immenses idées pour reconstruire le pays. Mais on se situe aussi au ras de sa petite vie, les bals où il se rend régulièrement, puis les juke box, la mob etc…
Notre anti-héros est bien modeste, me direz-vous, c’est ce que j’ai pensé au début du livre et puis je m’y suis attachée, comme à l’écriture simpliste parfois un peu neuneu qui correspond bien au personnage. Et puis on se laisse entraîner par ses rêves, puis l’assomption de la réalité médiocre, sans acrimonie ni haine, c’est comme ça.
La fin nous accorde sa dose de romantisme dans l’univers implacable de la vie ordinaire et la difficulté de s’y réaliser pleinement.

Les Promesses orphelines de Gilles Marchand, livre de la rentrée 2025, Aux Forges de Vulcain. 288 pages, 20 €

Texte © dominique cozette

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