Un pont sur la Seine

Rentrée littéraire. Mis à part le fait que je n’aime pas les nouvelles sur-couvertures de Grasset, voici Un pont sur la Seine, un livre qui sort totalement de l’ordinaire de cette rentrée focalisée principalement sur les violences faites aux femmes ou l’histoire du père ou celle de la mère.
Ici, Pauline Dreyfus nous raconte comment un pont jeté entre deux petites communes de chaque côté de la Seine a retricoté drastiquement la vie des gens. Car au lieu de les relier, il les a séparés.
Donc d’un côté, à Saint-Amand, on cultive le chasselas, cépage de luxe dont sont friands les Russes et qui permet aux Vernet de vivre confortablement de leurs récoltes. Et de l’autre, Champagne (rien à voir avec l’appellation) où va se construire une usine, on est au début du XXème siècle, symbole du progrès et du développement du pays. L’un des Vernet, plutôt que de rester du côté des viticulteurs qui deviendront bientôt les ploucs, passe le pont et pourra donner libre cours à ses ambitions. Et pendant que ses frères et cousins partent se faire massacrer au front de la grande guerre, lui reste à l’usine pour y fabriquer des armes. Ce qui est aussi une façon de pariciper à la guerre.
L’écart entre ce que les deux populations vivent va se creuser de plus en plus au fil des années. Les alliances familiales deviennent impossibles, le mépris s’installe envers les paysans dont le cépage n’attire plus, mais la roue tourne, il y a une autre guerre, les Vernet croissent, et bien plus tard, ces ploucs remettrons St Amand au goût du jour avec force bals, guinguettes, baignades dans la Seine qui vont attirer tous les Parisiens branchés, ce qui rendra cette fois l’autre village totalement ringard. On va suivre le parcours des descendants de ces pionniers, les trahisons, les haines, les tromperies, les accidents créés par le pont. Très intéressant.

Un pont sur la Seine de Pauline Dreyfus, 2035 aux Editions Grasset, 208 pages.

Texte © dominique cozette

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