Polar qui va me polariser sur Ron Rash

Je ne connaissais pas Ron Rash. Et soudain, dans une de mes deux librairies sétoises préférées, j’avise une petite somme de cette auteur et me dis tiens, un auteur américain que cette librairie semble aimer. Référence. Voyons voir. J’achète donc Un pied au paradis et je plonge dedans telle la louche en argent dans une soupière de caviar. Et j’en ramène quoi ? Une furieuse envie d’en acheter d’autres.
Un pied au paradis est une sorte de polar. Pas une enquête acharnée sur une mort d’homme mais l’histoire des personnages concernés par elle. Un polar red-neck qui se passe dans une vallée paumée du côté des Appalaches, où tout le monde connaît tout le monde, ils sont si peu, si dispersés sur les vastes terrains, mais fidèles aux retrouvailles dominicales du culte. Billy est un jeune homme courageux au travail, qui boîte un peu suite à une grave polyo et qui a involontairement conquis le cœur d’une très belle fille, Janice. Ils se marient, ils s’adorent, il cultive âprement des légumes pour l’hiver et du tabac pour le fric en attendant de mettre un bébé en route. Mais le bébé ne veut pas venir. Le malheur s’installe, c’est lui et ses spermatos handicapés les responsables. Loin là-haut vit une vieille, sorte de sorcière crainte et puissante chez qui ira Janice pour trouver un remède à la stérilité. Drôle de remède.
Dans la première ferme voisine vivent Holland (oui, c’est son nom) et sa veuve de mère. Lui est rentré décoré de la guerre de Corée, sorte de héros pénible qui fout un peu la merde dans les bars, mais on le comprend. C’est lui qui disparaît, c’est de chez Billy que venait le bruit d’un coup de feu, et c’est par là que vont aller fouiller le shérif et ses hommes. Il fait une telle chaleur qu’il est impossible que le cadavre soit laissé à l’abandon. Où peut-il bien être ? Cette quête s’amplifie, c’est assez original.
La réponse viendra en plusieurs fois car cinq personnes bâtissent le récit. Et à chacune d’elle, un pan de la vérité se fait jour. C’est très bien construit, c’est sombre, on entend les bêtes et la rivière qui coule, comme dans tout bon roman américain. Très bon livre, c’est le premier de cet auteur.

Un pied au paradis de Ron Rash en 2002. One foot in eden in english. Traduit par Isabelle Reinharez. Au livre de poche. 316 pages. 7,30 €

Texte © dominique cozette

Un drôle de livre !

Il s’appelle Vies et mœurs des familles d’Amérique du Nord, il est de Garth Risk Hallberg, très jeune homme qui a été révélé par un best-seller : city of fire, pavé de 1000 pages que je vais essayer de trouver, et qui a permis à celui-ci  d’être réédité. Car Vies et mœurs des familles d’Amérique du Nord a été publié en 2007 chez un éditeur de livre d’art. Car c’en est un. Sur chaque double-page, une photo plutôt imprécise prise par une palanquée de jeunes photographes tendance. Sous la photo, une qualité, un état, un qualificatif (fidélité, mauvaises habitudes, divertissement, sens à la vie etc) traité comme un élément vivant, comment il survit, se reproduit, se transmet. Donc déjà, très curieux. Et sur l’autre page, qui n’est pas blanche mais vieillie et salie comme un vieux papier trouvé par terre, le texte qui lui correspond. En tout une soixantaine de textes qui racontent une anecdote arrivée à une des deux familles de référence. Mais dans le désordre, et par un des petits bouts de la lorgnette, ce qui peut aiguiser notre curiosité ou nous agacer. Les deux.
Les deux familles de référence sont voisines avec deux enfants chacune, un garçon et une fille qui se fréquentent, un jeune menteur, un père qui meurt et un père et une mère qui divorcent. Ces histoires évoquent l’american way of life côté plus nightmare qu’american dream : BBQ, télé, céréales, vols, bagnoles, chagrins, dope… On y apprend accessoirement que le jeune homme a eu un accident terrible, on n’en connaîtra la cause qu’à la fin.
Objet attachant autant que bizarre, sur les tables des bonnes librairies car bénéficiant de bonnes critiques, agréable à feuilleter, que d’ailleurs on peut suivre dans le (dés)ordre qu’on veut ou par les entrées ménagées par l’auteur, un peu comme un bestiaire. Ou un mode d’emploi des banlieusard new-yorkais. J’aime beaucoup le style.

Vies et mœurs des familles d’Amérique du Nord, de Garth Risk Hallberg, première édition en 2007, réédite en 2017 chez Plon. 150 pages, 16,90 €.

Texte © dominique cozette

 

Les Fessebouqueries #362

Tout a fondu cette semaine de canicule qui rime avec en marche avant et recule, on patauge dans une soupe de fourzitou législ-hâtif composée d’une grosse potée bayroussie, avec une cuillerée de fillonnade rancie, un gros mélenchonchon bien odorant, trois rondelles de Philippot de chagrin, un chouïa d’assaut de Valls, une pincée infinitésimale de Villani. Plongez-y un petit Gregory faisandé, laissez mariner jusqu’au prochain remaniement, touillez et servez en chaussettes-claquettes et en musique. Bon app !
– CV : — Regarde Maman, un loup !
 —  Non mon chéri, ce n’est pas un loup, c’est monsieur Balkany, le maire de Levallois.
– OVH : Affaire Grégory. Bob Lépange pressenti pour vider la Vologne.
– JC : Perso, je trouve que l’entrée de Marine le Pen à l’Assemblée nationale est plutôt une bonne nouvelle. Si elle y est aussi brillante que lors du débat avec Macron, on a pas fini de rigoler.
– JB : J’imagine le choc des nouveaux députés quand ils vont voir que l’Assemblée Nationale n’est pas du tout le palais du bourbon !
– PR : Leguen s’accroche aux branches mais il n’y a plus d’arbre.
– FV : Philippot battu, mais par une « vaguelette », donc c’est moins grave d’après lui…
– MK : Election contestée de Manuel Valls : y a-t-il bourrage des burnes ?
– YB : Entre ici, Jean-Luc Mélenchon, avec ton terrible cortège d’insoumis
– MK : Et Fillon, au fait, il a été élu dans sa circonscription de Fleury-Mérogis ?
– PR : Si j’ai bien compris Dassault a gagné dans l’Essonne. C’est ça ?
– OM : « Mort d’un matador dans les Landes. » Le présumé coupable se serait radicalisé après avoir reçu sa 5ème banderille dans le dos.
– JPT : Entendu Mélenchon traiter Cédric Vilani de « matheux » qui n’a jamais vu un contrat de travail. Collard a du souci à se faire pour conserver sa palme de « gros con de l’hémicycle ».
– FIA : Quand on regarde l’écriture et l’orthographe dans les lettres de menace, on voit bien que c’est écrit par un corbeau.
– JB :Décidément Bayrou n’a pas de Pau.
– CC : bayrou il me fait penser au petit cousin timide au bout de la table qui récupère toujours les miettes mais jamais une vraie part de gâteau
– CV : Canicule : On ne peut pas être et avoir l’été.
– Y9 : Mélenchon en voyant le drapeau européen à l’Assemblée: « on est obligé de supporter ça? ». On va bien être obligé de te supporter, Jean-Luc.
– FIA : Bayrou n’était déjà plus ministre que mon hand spinner tournait encore.
– JB :  Tu te rends compte que tu es vieux quand 85% de tes amis se plaignent de la fête de la musique et que personne ne t’a proposé d’aller y faire un tour pour picoler comme un con un mercredi soir.
– HD : Une dirigeante de la SNCF intègre le gouvernement. Conséquence immédiate : sa composition est annoncée avec 1h30 de retard.
– CD : Je viens d’entendre :  » François Bayrou va s’exprimer sûrement longuement sur son départ du gouvernement. » . Même quand il ne parle que 5 mn, c’est long de toutes façons.
– JC : Une toulousaine socialiste à la Justice. Bonne nouvelle. J’espère qu’elle va rétablir la peine de mort pour ceux qui mettent de la viande de cheval dans le cassoulet.
– OVH : Remaniement ministériel. Florence Parly, ministre des centres commerciaux du gouvernement Philippe 2.
– JM : Hanouna annonce une formule plus chic pour TPMP l’année prochaine. C’est terminé les nouilles dans le slip, on passe aux tagliatelles.
– OV : De toutes façons Bayrou était obligé de démissionner : on ne peut pas être à la fois palois, hors-la-loi et faire respecter la loi.
– OK : URGENT : Plan canicule, les policiers et militaires affectés au plan Vigipirate seront équipés de pistolets à eau.
– EM : François Bayrou quitte le gouvernement pour redevenir deux simples citoyens.
– RB : C’est bon, vous avez compris que les méditerranéens et les africains n’étaient pas fainéants par nature, ou on doit continuer la canicule ?
– CA : Les mecs qui se plaignent de ne pas pouvoir porter de short et nous envient de porter des « robes », n’oubliez pas de mettre aussi un soutif.
– OM : Une pensée pour le présumé terroriste des Champs qui en ce moment même négocie ses 72 vierges contre un parechoc et une aile froissée.
– FG : Florian Philippot, battu aux législatives, redevient simple journaliste à BFMTV
– LC : Et dire qu’à une humilité près, Jean Luc Mélenchon devenait sympathique.
– AS : L’iphone, on le met à gauche ou à droite de l’assiette ?
– JFR : Cédric Villani, brillantissime mathématicien qui converse avec le cosmos vient tout juste d’élaborer son nouveau théorème : 
(Tête de Mélenchon) au carré = Intégrale de la connerie exponentielle
– OM : Les jeunes qui mettent des chaussettes dans leurs claquettes cet été, c’est les mêmes que ceux qui ont passé l’hiver les chevilles nues ?
– JM : Trump veut faire installer des panneaux solaires sur son mur entre les USA et le Mexique. Le mec vient d’inventer le racisme écologique.
– VI :  Conclusion du rapport de stage de Bayrou « Le ministère de la Justice était passionnant, j’y ai découvert des personnalités et des parcours exceptionnels. »

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Vieilles, d'accord, mais quelles canailles !

Ce titre du Point, alarmiste comme tous les titres du Point, mérite un bon crochet dans la gueule, qu’est-ce qu’elle a ma gueule ? Bah rien, Jojo. Ta gueule est chargée certes, elle a vécu plus de mille vies, et aujourd’hui, enfin hier soir aux Arènes de Nîmes, blindées, elle a encore montré à toutes ces vieilles lunes que ta gueule n’a rien n’a craindre des autres. Quelle présence, quelle voix, quelle bonne humeur, quelle énergie, quel talent !
Oui, ce fut un spectacle époustouflant. Parce que le grand petit Charles était là ? Et Laetitia et les pitchounes comme ils disent ici ? Tu t’es défoncé, mec, et je ne devais pas être la seule à me dire : arrête un peu, laisse les deux autres relayer, tu vas claquer… Les deux autres faisaient ce qu’ils pouvaient pour être à ta hauteur. Schmoll toujours sobre et vaillant, schmollant as usual, mais interprétant quelques chansons pas connues, puis Jacquot, poussant la chansonnette avec ce demi sourire l’air de dire : je n’en pense pas moins, brindille un peu branlante entre les deux maousses du rock français. Bref, Jojo, tu nous l’a encore fait : moi vivant, je ne serai jamais mort. Alors la voix, dès la première note, brillante et vibrante comme la vingtaine de cuivre derrière vous, galvanisant les fans des premiers jours, du Pénitencier à Gabrielle pour finir sur Toute la musique que j’aime. J’ai pas honte de dire que j’étais poignée comme tous, parce que c’était poignant. 74 ans ce mois-ci, le plus jeune des trois, en chimio, cancer et bidule, on n’y croit pas, c’est du fake news, même si ou t’a vu en promo à la télé, amorti comme tes compagnons. On craignait la mollesse, la décrépitude, le pathétique. Et on avait tort. Le petit Charles, 93 ans, ton presque papa, cheveux tout blancs, il fallait envoyer face à lui. Tu as envoyé grave. Pulvérisé les doutes. Ça a commencé par Les cactus, par toi, ouais, trop fort.
Le public était plus pimpant que d’habitude où sévissent les gros relous à pattes, tattoos, santiags et cuirs. Des sexygénaires en robiches, des septuas bien coiffés, j’ai repéré seulement deux sosies un peu tapés de Jojo et un de Schmoll façon P. Sébastien, c’est vous dire. Et à côté de nous, sur les gradins du vomitoire (premier rang, super places payées un bras de tourne-disque), un couple hyper mignon de quadras dont les parents, quelques rangs derrière, étaient aussi des fans de toujours. Ces jeunes qui connaissaient tout de nos années yéyé, vénéraient Presley, Sinatra et donc Johnny, sont allés au bar et nous ont rapporté une coupe de champ parce qu’ils nous trouvaient sympas. De rêve, quoi, tout ça.

J’avais décidé de faire mes adieux à Johnny au Parc des Prince pour ses 50 ans, c’était torride. Cette fois je ne pense pas le revoir de sitôt, pas parce qu’il aura préféré rejoindre Gene V et sa clique, mais parce que moi, je vise ses 100 ans, sinon rien, je vais donc garder une belle image de celui qui faisait battre mon cœur de 13 ans avec Laisse les filles, ses hoquets, son déhanché, sa chemise en dentelle et cette phrase un peu choquante : lorsque ma mère s’est radinée… Clip à voir ici (après une pub Meilleurtaux au casting calamiteux).

Texte © dominique cozette

Yalom encore ! Avec Spinoza

Irving Yalom, toujours lui, ce psychanalyste américain fondu de philosophie, m’a passionnée une nouvelle fois avec Le problème Spinoza. Autant vous l’avouer : je ne suis ni une intello, ni une forcenée de la philo. Je suis même très dilettante. Alors comment fait-il, ce diable d’écrivain, pour me passionner autant avec des sujets comme ça ? Je vous explique.
Il y a deux histoires dans ce livre/ la première concerne Spinoza, au moment où il va avouer à l’aréopage juif qu’il ne croit plus à ces drôles de dieux que fabriquent les hommes de pouvoir pour nous asservir. Il prouve que les écrits, la Thora, le  la Bible sont bourrés de mensonges, de faux et d’à peu près. Il faut dire que c’est un homme très intelligent, avec une mémoire extraordanaire et une soif de savoir inextinguible. Il a donc appris toutes les langues à connaître pour lire dans le texte ces antiquités. Il peut donc prouver les dérapages qui y ont été introduits. Mais les rabbins, comme toute la communauté, sont choqués que cet homme, par ailleurs irréprochable, puisse commettre un tel sacrilège. Pour la peine, il sera excommunié, banni pour toujours, chassé. Nul, même ses proches, n’auront plus le droit d’avoir de contacts avec lui, de lui écrire, de le voir. Spinoza  n’a besoin de rien que de penser, écrire, lire. Mais ça le rend triste. Il fait une croix sur une vie sociale, familiale, et continue son œuvre.
L’autre histoire est celle du Reichleiter Rosenberg, un type assez asocial qui déteste les Juifs et commence à réfléchir à la façon d’en débarrasser l’Europe. On est en 1918. Cet hommes, par ailleurs intelligent, rencontre un beau jour Hitler. Mais ce dernier, bien qu’il lui emprunte ses idées pour élaborer sa théorie et écrire Mein Kampf ne va jamais l’accepter dans sa cour. Pourtant Rosenberg a créé un journal qui porte haut les couleurs du Führer, qui encense ses idées, qui l’aide à parvenir au pouvoir. Quel rapport avec Spinoza ? Il aimerait savoir pourquoi les hommes qu’il admire le plus, notamment Goethe, sont fous de ce philosophe. Il part donc à la quête de ses possessions et, chargé de la confiscation des biens culturels des Juifs (et des autres), retrouve la précieuse bibliothèque de Baruch Spinoza.
Pourquoi c’est plaisant ? Parce que Yalom a recréé la manière du roman : comment ces gens-là vivent, les dialogues, le suspens… Quand les interlocuteurs de Spinoza ne comprennent pas sa pensée, ils le lui avouent et Spinoza l’explicite. A la fin, en prologue, Yalom explique comment il a pris connaissance de tous les faits qu’il a relatés  : on apprend ce qui est réel et ce qui est romancé mais crédible. Palpitant et instructif.

Le problème Spinoza par Irving Yalom aux Edition le Livre de Poche. 548 pages.

Texte © dominique cozette

Quel livre, mais quel livre !

Ce livre Article 353 du code pénal est scotchant. Eblouissant. Hallucinant. Spectaculaire. Pourtant, c’est un huis-clos, la confession d’un homme qui vient d’en tuer un autre, dans le bureau d’un petit juge. Sans effets spéciaux. mais avec les effets de langage formidablement utilisés par Tanguy Viel. De l’orfèvrerie. « Mon personnage se fait flouer, juste parce qu’il ne maîtrise pas la rhétorique. Puis il y a le processus de rumination. »(1)
Dès le début, on sait cela. Que le crime a lieu. Que l’homme en jette un autre au large, qu’il sait qu’il va se noyer, qu’il n’en tire rien de plus. Il fallait juste que cet homme disparaisse. Puis il va amarrer le bateau du noyé et quand la police vient le chercher, il l’attendait. Ensuite, la grande, l’énorme déferlante nous arrive dessus : pourquoi j’ai fait ça. Car cet homme, floué profond par le promoteur véreux, a mis du temps à comprendre comment tout ça s’est enclenché. Il a fallu que le prétexte se construise dans sa tête pour qu’il en arrive là. Car un mec, un pauvre mec comme lui, gentil et faible, est incapable de violence. Il en a fallu des petits éléments de honte, d’humiliation, de regrets, de colère. Il a fallu qu’elle monte, cette « exaspération de l’enrichissement complètement éhonté des puissants. » Car comme l’auteur l’analyse, « on a tous régulièrement des petites pulsions de haine lorsqu’on entend qu’un mec part avec son parachute doré. On a tous envie un jour où l’autre d’en mettre un à l’eau. »(1)  Il a fallu qu’il n’en puisse plus de cet immense gâchis, la démolition d’un bien public, le saccage de ce petit coin de la rade de Brest, énorme béance à vif, gadouilleuse, là où un petit eden ne demandait qu’à vivre, sans aucun espoir d’arrangement.
Le juge l’écoute, et une fois, il se met en colère contre l’absurdité de ce drame. Mais il n’a pas encore tout entendu. Le pauvre narrateur ne cherche absolument pas à se justifier. Juste à expliquer. Le miracle, c’est comment il arrive à sortir les mots justes, les motifs profonds, les sentiments gênants qui ont abouti à cet acte. C’est impressionnant de finesse, de frappage au coin du bon sens, de logique. Il reconstitue la démarche commerciale et insinuante du promoteur forçant les acheteurs sans en avoir l’air, les abusant comme si c’était eux-mêmes qui s’offraient en sacrifice alors qu’il n’avait rien demandé. Il dissèque le chemin de la pensée et de la raison, très fortes toutes les deux, pour montrer comment elles s’effacent d’un seul coup pour accepter une chose inacceptable. Pour finir, l’article 353 du code pénal emballe l’affaire d’une façon inattendue et incroyable quoique crédible.
Ce livre mince est un petit chef d’œuvre que je vais relire de ce pas. Ne le loupez pas !

(1) Citations tirées d’une interview de Paris Match.

Article 353 du code pénal de Tanguy Viel. 2017 aux Editions de Minuit. 174 pages. 14,50 €.

Texte © dominique cozette

Vernon Subutex suite et fin.

Hélas, ça s’arrête. Faute de combattants. On y est. Les marginaux, les out of the blue, les cassos, les niqués de la vie, la communauté de Vernon, après avoir écumé leur vie comme on râcle une mousse de saleté sur un frichti mal rincé, envoient leur lettre de dèm à cette foutue vie de cette époque merdique. Mais avant ça, Virginie Despentes nous familiarise, je veux dire nous empathise avec des personnages comme on n’en voit peu à la télévision, des bancales, des trans, des bizarres ou des violents. On s’y attache même quand on les déteste. Vernon, lui, reste pur, pas très actif puisque tous le considèrent comme un gourou. Ils organisent ce qui devient leur rêve, ou « rave », appelés convergences, les nuits entières dans des lieux sauvages, coupés du monde, interdits de connections et de dope. Seulement l’immense et inexplicable communion de ces lourdés de la société emportés par les musiques ordonnancées par Vernon Subutex, les menant tous à un orgasme a-sexuel et pharamineux. Inoubliable. Raison de vivre. C’est bien joli tout ça, mais il y a des vengeances qui se préparent, des tatouages pour en brûler d’autres, des chasses aux femmes, des viols et des violences. Il y a aussi des nanas islamisées qui en reviennent, qui fuient, des trahisons filiales et tout ça. Ça fourmille comme toujours chez l’auteure.
Ça fourmille aussi sur notre société, l’actuelle, celle qui nous met à cran, qui nous érige les uns contre les autres, qui interdit de vivre à la marge — et puis quoi  encore ? —  qui s’étonne que les armes qu’elle fabrique recrachent leur haine sur sa petite gueule d’amour. Ça vibre, c’est chaud, c’est tumultueux. C’est sanglant. C’est parfois poésie et musique, désir d’amour. Tout ça, quoi.
C’est un fin décisive qu’elle nous livre, pas de tome 4, impossible. Je suis néanmoins réservée sur le tout dernier chapitre qui commence en 2077 et continue quelques décennies après. La SF m’intéresse moins même si VD  tient à ce que Vernon Subutex lui survive, d’une façon ou d’une autre, se recrée, ne meure pas. Grandeur d’âme de l’écrivaine. C’est chouette quand même voire touchant.

Vernon Subutex 3 de Virginie Despentes. 2017 aux éditions Grasset. 400 pages. 19,90 €
Les articles concernant les tomes 1 et 2 peuvent être lus ici.

Texte © dominique cozette

Les Fessebouqueries #361

Mais qui qu’est pas clivant, cette semaine ? Tout est clivant, n’y a qu’à regarder les réseaux sio-sio : y a ceux qu’ils croivent qu’ils gagnent et pi non, ils perdent, y a ceux qu’ils croivent qu’ils perdent et pi non, ils perdent pas mais faut pas qu’ils croivent qu’ils gagnent. Et pi y a ceux qu’on a perdus : le bon monsieur Guaino qui a vomit tout son quatre heures, le PS qui va finir par se retrouver PD, Parti Définitivement, la pauvre NKM qui s’est retrouvée battue par KO, le petit Gregory qui … qui … bon bref on n’en sait pas plus, monsieur Kohl qui est allé droit dans le mur (de Berlin), ce brave monsieur Bayrou qu’on ne sait pas comme qu’ça va finir tout ça, et la place des femmes dans le tromé à cause de l’étalage macho. Sinon, y en a qui marchent tout droit et pi les autres des législatives, et là, bah c’est à vous de voir…

– PE : Législatives : on est passé des poids lourds aux poids lourdés.
– JB : Législatives + Roland Garros = la République en Match.
– PC : Je ne comprends pas : pourquoi des gens qui se disent en marche ont-ils besoin de tant de sièges ?
– DP : Les abstentionnistes crient à la dictature
– HS : L’élimination de Hamon et de Fillon prive la France d’authentiques visionnaires donc l’absence se fera cruellement sentir.
– JMC : Ferrand élu ! Visiblement, dans le Finistère, y’en a un paquet qu’ont échangé leur bonnet rouge contre de la vaseline.
– FV : Que vont faire tous ces anciens députés qui siégeaient depuis 30 ans et qui n’ont JAMAIS travaillé de leur vie dans une entreprise? Le réveil va être dur! ils vont devoir apprendre à faire des notes de frais, être présent sur leur lieu de travail, ne plus profiter du système! pour certains ça va être TRES TRES DUR
– PR : Allo le Parti Socialiste ? Allo. Repondez s’il vous plaît. Alloooo…
– DT : En fin de compte les socialistes naissent dans les roses et finissent dans les choux.Ce n’est plus la République en marche mais la République en courant !
– JPT : Les partis politiques qui trouvent que plus de 400 députés pour un seul parti c’est trop me font penser à ces joueurs de Loto qui trouvent que 400 millions d’euros c’est disproportionné quand c’est un autre qui les gagne.
– FT : Guaino, tu dis que tu quittes la politique mais mon vieux, c’est la politique qui te quitte. La France n’a pas besoin d’une punaise de ton espèce.
– MK : Si j’ai bien tout compris, Bayrou présente une loi de moralisation dont il va être la première victime car bientôt mis en examen, même que ce sera la faute rien qu’à la presse
– JB : Henri Guaino, héritier du Général Dégueule.
– JPT : Henri Guaino me fait penser à ces mecs pas très gâtés par la nature, qui restent seuls dans leur coin toute une soirée et qui s’en vont brusquement sans dire au revoir, croyant priver de leur présence des gens qui n’avaient même pas remarqué qu’ils étaient là.
– MK : Détriplement de la personnalité : quand il défèque au boulot, Bayrou est il mammifère-citoyen-justiciable, ministre de justesse ou président du Modem ?
– EEF : Je bois des coups pour emmerder Daesh. Une nana bourrée qui titube c’est vachement plus dur à viser.
– OM : Sinon on peut mieux payer les femmes pour qu’elles ne prennent plus le métro, et permettre ainsi aux gars de continuer à écarter les jambes.
– JPT : Dimanche, ça va être la fête des « Perds ! »
– NA : François Bayrou, le Alain Delon de la politique
– OV : À quoi ça sert de gagner deux guerres mondiales contre les allemands si c’est pour que 70 ans après les jeunes français mettent des chaussettes dans leurs claquettes ?
– OVH : Affaire Villemin. C’est là qu’on découvre que le petit Grégory n’est pas mort. Il s’appelle maintenant, Emmanuel Macron.
– CC : bon courage pour le bac de philo, c’est une épreuve beaucoup plus difficile à terminer que le bac à bière
– JPT : NKM battue trois jours avant tout le monde !
– EM : – Aujourd’hui, j’ai vu un député socialiste et une licorne. – Arrête tes conneries, ça existe pas les députés socialistes !
– NP : L’assassin du petit Grégory aura les circonstances atténuantes : il lui a quand même évité d’être adolescent dans les Vosges.
– JB : Enfin l’affaire Grégory est en passe d’être résolue : il était grand-tante !
– NP: Si vous voulez vraiment faire disparaître le manspreading obligez les hommes à porter des kilts. Dans une semaine on n’en parle plus.
– EM : Sujet du Bac Philo : Vaut-il mieux perdre une élection avec dignité ou la gagner avec le soutien de Serge Dassault ?
– JB : Avec le nombre de versions différentes de cette tragédie, je pense qu’il y a moyen d’en sortir un livre. Je propose « 50 nuances de Grégory ».
– HM : C’est très déstabilisant d’être dans un bus à côté d’un type chauve et très sec, le crâne pourtant plein de pellicule et exhalant de tous ses pores une odeur de lardons frits.
– JB : À force de chancelier, Helmut Kohl aura fini par tomber.

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Sapiens or not sapiens ?

Sapiens, une brève histoire de l’humanité, de Yuval Noah Harari est à lire absolument. Pour de multiples raisons. En premier lieu parce qu’il nous explique d’où l’on vient, par où on est passé, où on va peut-être et surtout où l’on est. Harari, érudit et spirituel, ne manque pas de saupoudrer son ouvrage de petites anecdotes bien terre à terre pour nous faire tout comprendre. Et il y en a des choses à comprendre. Oublier les idées reçues, envoyées souvent par des potentats qui se servent des religions pour asseoir des vérités non scientifiques. Harari est un scientifique et cela l’autorise à démolir les grands mythes religieux, ces histoires à dormir debout que croient même les plus intelligents d’entre nous. Ceci admis — il n’y a pas plus de dieu que de fées ou de père noël — il reconstruit la création du monde en fonction d’une somme pharamineuse de savoirs, de manuels, de témoignages, d’études, de références etc…
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il ne nous rend pas fiers d’être sapiens. Partout où nous sommes passés, et depuis le début il y a 2 ou 300 000 ans, nous avons détruit. Pas pour détruire forcément, mais pour dominer. Pour avoir le contrôle. Sapiens est un prédateur majuscule qui supporte mal la concurrence et les bâtons dans les roues, même si elles n’existent pas encore.
Sapiens, au début, n’était pas le seul descendant de nos cousins les singes. On sait que néandertal a coexisté, parmi les six espèces d’hominidés. Malheureusement, son chemin a croisé celui de son cousin et couic, il l’a payé. C’est pas que Sapiens était le plus fort, il était le plus communiquant : c’était déjà un homme (ou une femme, bien souvent!) de réseau et c’est ça qui a fait la différence. Son langage plus élaboré lui a permis le story-telling, l’imaginaire. Mais c’est prouvé, chaque fois que Sapiens débarquait dans un nouvel endroit (comme l’Australie), les humanoïdes et les gros animaux trépassaient — le nombre d’espèces qu’il a éradiqué !— la flore se transformait, la trace qu’il laissait était irréversible. Harari rapproche la première trace de main dans la grotte Chauvet à l’empreinte de pied sur la lune. Les deux vont perdurer jusqu’à la nuit des temps. Donc, oui, Sapiens fut et reste un serial killer. A partir de là, le monde est à conquérir. C’est passionnant de voir ou revoir comment les idéologies, religieuses ou pas, ont aidé à l’exploitation de l’homme sur l’homme et sur la nature, comment sont nés la monnaie et l’économie, le capitalisme, le libéralisme.
Pourquoi les Européens ont-ils été les plus forts au milieu du deuxième millénaire, comment ont-ils de nouveau éradiqué des civilisations aussi ancrées que celle des Incas ou des Aztèques, comment les Chinois et autres orientaux ne se sont pas montrés plus offensifs ? Pourquoi ont-ils toujours soumis ou sous-estimés les femmes alors que la force physique ne servait plus à rien, pourquoi l’homme a-t-il besoin d’une hiérarchie ?
Aujourd’hui, on en est là, face à une terre ravagée ou en passe de l’être, une mondialisation qui en laisse beaucoup au bord du chemin, une soif de pouvoir hallucinant de la part de l’élite qui veut devenir dieu, se rendre immortelle, bouleverser la chimie et la biologie originelles sans espoir de retour grâce aux avancées extraordinaires de la science, aidées par un manque d’éthique, d’autocensure ou de contrôle de l’humanité entière. Pour exercer une hégémonie encore plus hallucinante, sans autre raison. Car pour l’heure, la seule idéologie universelle est la course au profit, à la croissance. Et la pire chose est le traitement inhumain infligé aux milliards d’animaux que nous plions à nos ordres.
Les deux dernières questions fondamentales que pose l’auteur sont : cette évolution nous rend-elle plus heureux que les paysans de jadis qui ne possédaient pas grand chose, et quel être sommes-nous en train de fabriquer avec nos notions de corps augmenté et de développement humain artificiel, quel monstre ?
Harari n’oublie pas les bonnes choses, les progrès qui nous ont permis de vivre beaucoup mieux que jadis, mais ce qu’il essaie (peut-être) de nous faire comprendre, c’est qu’avec l’immense talent que possède l’être humain, il aurait pu faire beaucoup mieux. Pour autant, ce pavé n’est pas déprimant, il ne manque pas d’humour ou d’exemples cocasses pour illustrer notre parcours. C’est un livre passionnant. Et un véritable phénomène de savoir.

Sapiens, une brève histoire de l’humanité, de Yuval Noah Harari. 2011 pour la première édition en hébreu. 2015 chez Albin Michel, avec une traduction de Pierre-Emmanuel Dauzat. 508 pages.

Texte © dominique cozette

Les Fessebouqueries #360


Oh la la ! ça va dans tous les sens cette semaine, comme vous, ce week-end, d’une urne à l’autre, d’un BBQ à une plancha, d’un marteau à un Opinel, d’un touche pas à ma pub à une nouille dans le caleçon, d’une Anglaise pas très rassembleuse à un Frenchie qui brasse large, d’un petit Clooney à un autre petit Clooney car monsieur Whatelse a eu des jumeau/jumelle dizygotes qui gigotent. Sans transition, gaffe à votre smartphone quand même…

– CD : Emmanuel Macron va nous faire des jolies ordonnances de suppositoires mais il est tellement mignon … que ça va passer comme du sirop.
– CG :  J’ai lavé ma veste avec mon tel portable dans une poche.Il brille mais marche beaucoup moins bien……
Plus-du-tout-du-tout….
– PR : Je note qu’après l’élection de Macron, le soleil est toujours là. Jusque là, ça va.
– VC : C’est dingue, je suis passé devant le « Pied de Cochon » ce soir, la terrasse était bondée et il n’ y avait aucun vigile. Ils prennent des risques quand même, non ??
– DC : Macron aurait fait une blague sur l’épilation Maillote ? Quelle guigne !
– JFR : Petites bites les wahhabites, on leur vend des Rafales, ils nous attaquent à l’Opinel.
En fait ils n’aiment pas les pots de vin, on aurait dû s’en douter.
– JLL : J’ai sous-traité ma mémoire à Google, ma culture à Wikipedia, ma vie sociale à Facebook mes souvenirs à instagram et ma connerie à Twitter.
– SL : ARGHHHHH je n’ai plus qu’un écran noir sur mon téléphone iPhone 6 super. Il vibre , il me cause « pardonnez moi je n’ai pas compris » (Kulé!!!!), j’ai enlevé et remis la carte SIM et rien, que dalle , nie de nid, zobi, prout de merde à la con de putain de chiotte 
HELP!!!!!
– EF : Contrairement aux idées reçues, les hommes sont également sensibles à la beauté intérieure. Intérieur cuir de préférence.
– PE : Bienvenue à Voluto et Deca, les jumeaux de Madame Clooney.
– JPT : De nombreux hommes politiques nous mettent en garde contre l’arrivée possible de centaines de députés novices sous la bannière République en Marche. Je comprends et je partage leur appréhension. Imaginez un peu : des députés qui fréquenteront régulièrement l’Assemblée nationale, qui ignoreront le sens du mot absentéisme, et celui du mot clientélisme. Des hommes et des femmes qui ne chercheront pas à cumuler les honneurs et à multiplier les mandats. Quelle horreur !
– FIA : Attaque au marteau. La radicalisation des fans de Claude François.
– DP : Un charpentier victime d’une crise de démence cloue un policier à Notre Dame.
– CC : non mais la chaleur dans le train, mon voisin transpire comme un scout au salon du X
– DT : Le CSA prive TPMP de publicité pendant 3 semaines.C’est con, la pub était le seul truc qui remontait un peu le niveau de l’émission.
– OV : Déjà 24 heures depuis l’attentat de Notre Dame et toujours aucune action concrète de la part d’Emmanuel Macron. Si Sarkozy était encore là il aurait déjà fait ficher S tous les clients de Leroy Merlin et Castorama.
– JB : T’as beau anticiper, tu te retrouves toujours à Labour.
– NP : En même temps il y a une certaine logique au fait que la carrière politique de Thérésa May se finisse au mois de juin.
– DC : – Mais, mais… – Y a pas de May, Theresa !
– OV : Vu le résultat des élections au Royaume Uni hier ça m’étonnerait beaucoup que May passe le mois de juin.
– PM : Coup dur pour les identitaires, Homo sapiens est marocain
– OVH : De l’ADN de Borotra et de Crocodile ont été détectés sous la terre battue.
– AB : *Code du travail* La retraite à 80 ans sera aménageable : en cas de décès prématuré, le salarié devra dédommager l’employeur du préjudice.

Illustration © dominique cozette. On peut liker, on peut partager, on peut s’abonner, on peut commenter, on peut faire un tour sur mon site ici. Merci d’avance.

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