Lucas Belvaux a réalisé de nombreux films dont une géniale trilogie Un couple épatant, Cavale, Après la vie qui prend la même histoire et les mêmes personnages sous un angle différent, l’un est une comédie de couple, l’autre est un polar tout a fait scotchant et le dernier un thriller psychologique. Une vraie prouesse. C’est pourquoi je n’ai pas balancé à m’offrir son premier roman Les Tourmentés, sachant d’avance que Belvaux sait construire une histoire. Et quelle histoire.
Au départ, trois personnages principaux : Skender, un type sympa qui se clochardise irrémédiablement, Max, son « frère » d’armes avec qui ils ont combattu lors de sales guerres, tué des hommes et sauvé d’autres, et Madame, richissime jeune veuve dont Max est devenu une sorte de majordome, garde du corps, confident. Cette femme à l’histoire tragique, est une chasseresse hors pair. Elle a tout chassé par delà le monde, elle manie les armes avec une précision diabolique, c’est la passion que lui a transmise son affreux mari dont on peut se demander si c’est elle qui l’a tué lors d’une chasse.
Combien vaut la vie d’un homme qui ne vaut plus rien et qui a plus ou moins abandonné sa femme formidable et ses deux fils ? C’est un contrat que se passent ces trois-là. Skender sera le gibier, Madame le chasseur et Max l’arbitre, c’est lui qui les a mis en contact. Il aura trois millions, le premier lors de l’acceptation de ce marché, le deuxième lorsque la chasse débutera, dans six mois dans une forêt de l’Europe de l’est, et le troisième un mois plus tard, à la fin de la chasse. S’il est mort, tout sera pour sa femme et ses fils. Il a le droit aussi de se défendre, sans arme bien sûr, de tuer Madame, qui, elle, est armée et aidée de ses deux féroces chiens.
Je ne divulgâche rien. Skender bénéficiera d’un logement confortable pour se préparer. Opiniâtre et toujours amoureux de sa femme, il va se refaire une santé, arrêter alcool et autres saletés, mettre au point un entraînement diabolique tandis que Max et Madame lui inventent une profession dans une multinationale qui justifie, auprès de sa femme « innocente », son nouveau look d’homme de confiance, son salaire, sa belle voiture et son retour aux bonnes manières..
Jusque là, nous apprenons à connaître les protagonistes, dont aussi l’aîné de ses fils car chaque chapitre est dit par la voix de l’un ou l’une d’eux. Nous sondons leurs pensées et assistons à l’évolution de leur mental au fur et à mesure qu’on approche du début de la chasse. Et ça devient passionnant, les personnages s’observent, s’entremêlent parfois, analysent leurs motivations, interrogent leurs valeurs.
On a envie que Belvaux fasse un film de cette histoire mais en regardant la présentation qu’il a faite de son roman, je m’aperçois que c’était d’abord un scenario. Puis c’est devenu, bizarrement, un livre. Un roman très fin, très émouvant, très profond. Avec un peu de longueur au début qu’on oublie vite.
Les Tourmentés de Lucas Belvaux, 2022 chez Alma Editeur, 344 pages, 20 €
Joignons l’inutile au désagréable comme disait mon arrière-tonton en décrochant son fusil du râtelier, remettant le sien en place dans sa gueule avinée, vérifiant que sa gibecière contenait bien ses fiasques de tord-boyaux nécessaires à tout chasseur qui se respecte (mais pas les autres) et cherchons un peu de bonheur dans l’actu… Heu, je ne vois pas trop, je suis dans le schwartz comme disait le gardien du musée de Rodez, le musée de Soulages si vous préférez et gageons que les arroseurs de tableaux ne vont pas y balancer du goudron fondu par la température insensée de notre petit monde, ça ne se verrait pas. Du goudron et des plumes, réservons-les aux fachos qui fleurissent un peu partout, et quand je dis plumes, je pense à celle du l’oiseau bleu, alias Twitter qui s’est muské grave. Beurk. Bon allez, fêtons ce qu’il reste à fêter tant qu’il y a des verres et de quoi les remplir et bon dimanche !
– NMB : Les trois cyclistes légèrement blessés ce dimanche par le tir d’un chasseur seront jugés demain en comparution immédiate pour avoir refusé de restituer les plombs à leur propriétaire.
– EL : Grâce à l’effort conjugué des plus riches, des industriels, des voyageurs en jet, des destructeurs de forêts, des gros pollueurs, de nos amis Chinois et de tous ceux qui consomment pour consommer, sans oublier Vlad le guerrier, nous sommes arrivés à repousser l’hiver ! Continuons.
– CEMT : Emmanuel Macron : « Je voudrais d’abord saluer Pierre Soulages, ce visionnaire qui avec ses tableaux noirs avait anticipé les coupures d’électricité de cet hiver. »
– PA : J’ai un ami qui pensait que sa vasectomie empêcherait sa femme d’être enceinte, mais en fait, ça change juste la couleur du bébé.
– MAP : Ça me manque les portables à clapet, on raccrochait au nez avec plus de classe.
– DC : Le premier bébé « PMA pour toutes », est né en août. Elle s’appelle Zola. Le second, si c’est un garçon, s’appellera Gorgon.
– CEMT : Un peu répétitif cette émission quand même, ça fait deux fois de suite qu’Emmanuel Macron invite Caroline Roux.
– PL : Un chasseur grièvement blessé après avoir été chargé par un sanglier. Réaction du sanglier : — Désolé ! Ébloui par le soleil, j’ai confondu le chasseur avec un gland !
– RR : « Intérieur ou terrasse ? » C’est tellement louche cette question en plein automne qu’à chaque fois, j’ai l’impression que le serveur c’est Dupont de Ligonnès.
– GD : C’est le même monsieur qui s’est empressé d’aller saluer l’héritière revendiquée des fascistes italiens qui nous donne de grandes leçons de lutte contre l’extrême-droite, ou bien ?
– CEMT : « Attendez, si on peut même plus tirer sur des cyclistes en étant pétés comme des coings tous les week-ends, quel est l’intérêt de la chasse ? »
– EL : Soulages vient de mourir ! J ai peur des titres demain dans les canards ! Noir c’est noir ou pire encore ….
– AB : Désormais, l’amour est sur Tinder, le bureau est en télétravail, les recrutements se font par des algorithmes, la joute entre partis politiques a lieu sur Twitter. Est-ce que l’on a encore besoin de se rencontrer en chair et en os pour faire société ? Entretien avec Daniel Cohen.
– PI : Je ne sais jamais s’il faut dire LREM ou Renaissance alors pour éviter de me tromper, je dis le parti avec le ministre de la justice mis en examen.
– CC : Quand tu as en tête inconsciemment « Noir c’est noir » de Johnny…
– CEMT : Emmanuel Macron : « Je crois au dialogue social, les travailleurs demandent une augmentation, les patrons disent non et tout le monde retourne joyeusement au travail. »
– MK : Comme si un chasseur pouvait être bourré ! (ils ferait mieux de faire passer un alcootest aux électeurs du Rassemblement National).
– PI : Quand les gens auront l’intelligence de voir autre chose que le pays d’origine des meurtriers, on pourra peut-être se poser cinq minutes et parler de la crise de la psychiatrie en France.
– CV : Quand tu descends du trottoir étroit pour laisser passer une vieille dame avec une canne et que tu écrases une merde de chien posée exprès dans le caniveau, tu sais que tu tiens une nouvelle preuve irréfutable de la non-existence de Dieu.
– OVH : Après Sadiq Khan, premier maire de Londres d’origine indo-pakistanaise, Rishi Sunak, premier premier ministre d’origine indienne. Il ne manque plus qu’une femme d’origine féminine pour compléter la diversité biopolitique de la Grande Bretagne. Ah ! Oui et un roi homme, pourquoi pas ?
– FA : Tu les vois, toi, les flics, en train de chasser les chasseurs bourrés dans la forêt ? Voilà une loi qui va servir mais tellement à rien…
– NMB : Acheter pour 44 milliards de dollars un réseau social qui débat depuis seize ans sur le nom d’une viennoiserie, et ça se dit homme d’affaires.
– BR : Le PDG de Total gagne autant qu’une assistante maternelle qui garde 1500 enfants (pour avoir une idée de l’ordre de grandeur … )
– PI : Boycotter la coupe du monde au Qatar ou quitter Twitter à cause de Musk, je sais pas trop, j’hésite encore, dans le doute j’attends qu’une attaque nucléaire ne me laisse pas le choix, appelez ça la sagesse si vous voulez.
– CEMT : Elon Musk : « Suite à un référendum d’une seule personne (moi), j’ai décidé de rattacher Twitter à la Russie. »
– PI : En fait si j’ai bien compris, on a tout miniaturisé sauf les bagnoles parce qu’on a besoin de beaucoup de place pour mettre tous nos trucs miniaturisés.
– RP : Pour réconcilier les chasseurs et la société civile, il faut autoriser la chasse en centre-ville aux heures de pointe afin de réguler l’espèce des utilisateurs de trottinettes électriques.
– NMB : Je vais aller fleurir les tombes ce week-end en mettant des pieds de tomates plutôt que des chrysanthèmes, c’est plus de saison et ça changera un peu.
– OB : Edouard Philippe plaide pour un report de l’âge légal de départ à 65 voire 67 ans. Il ajoute, altruiste : « Les salariés pourront bien sûr, sans problème, venir avec leur déambulateur. Nous envisageons d’encourager la création d’une « team arthrose » dans chaque entreprise, le bien-être de nos seniors ne doit pas être négligé. »
– EL : Pour attirer les pauvres dans les musées, le ministère jette de la purée et de la soupe sur des toiles célèbres espérant que les gens vont lécher ! Cette fois ça va trop loin.. la culture pour tous a des limites !
Nom est le titre très court du dernier Constance Debré, ce nom de potentats dont elle ne veut plus. On a déjà lu dans ces deux précédents ouvrages ( Play boy ici et Love me tenderici) comment elle a brusquement tout largué, famille célèbre — son grand-père a tout de même participé à l’écriture de la Constitution de la Vème — père camé jusqu’à l’os puis alcoolo, mère mannequin morte bien plus tôt d’overdose, son mari pénible qui fera tout pour qu’elle ne voie plus leur fils, coming out qui l’envoie faire ses nuits du côté des filles, métier d’avocat qui finit par la dégoûter vu l’injustice de la justice selon la classe d’où l’on est, crâne rasé, tatouage etc.
On la retrouve pareille,totalement radicalisée, ne possédant que ce qu’elle a sur elle : sac à dos, quelques tee-shirts et un jeans, ordinateurs et autres babioles obligatoires de la vie courante, une minuscule piaule où elle a entreposé des restes mais qu’elle décide de liquider. Dans ce livre où elle ne révèle pas grand chose, elle continue de cracher violemment sur la bourgeoisie, le pouvoir, les dignitaires, les bien placés, les puissants etc. Elle dénonce la violence de classe dont la meilleure façon d’observer la rupture entre le haut et le bas est de parcourir la ligne 4 qui traverse Paris depuis les plus pauvres qu’elle trouve beaux aux plus vides, les bourges qu’elle trouve vide.
J’ai bien aimé ce passage : « Dans la famille on ne trouve pas d’ouvriers, de paysans, de domestiques, d’instituteurs, de commerçants, de petits fonctionnaires, pas non plus de taulards, de putes, de pédés, d’assassins, pas d’étrangers, d’exilés, d’émigrés. Dans la famille, il y a des ministres (de de Gaulle, Pétain, Giscard, Pompidou, Napoléon III, Louis XV, etc) des députés (de tous les régimes), des comtes, des barons, une duchesse, deux peintres célèbres, un architecte de gares, un prix de Rome, des rabbins, des pasteurs, des professeurs de médecine, des diplomates, des membres du Jockey Club, des académiciens. Aristocratie incluse, la bourgeoisie est ridicule. Ils se croient importants, ils sont ridicules. » Elle pense cela car elle veut s’en défaire, de cette hérédité.
Et plus loin : « On ne dit pas manger, on ne dit pas bon appétit, on ne dit pas bonjour tout court, si j’étais un garçon je saurais exactement quand on fait un baise-main et quand on ne le fait pas, et quand envoyer des fleurs, et on ne commente pas la bouffe, et on n’est lourd sur rien, on va toujours bien, et on est très gentil avec les domestiques, on ne dit pas monsieur au serveur, on laisse des pourboires, on n’est jamais trop habillé, on n’a jamais honte. Toutes ces manières, ces bonnes manières que je connais par cœur, je les déteste, je les déteste parce qu’elle sont en moi, incrustées bien plus que le sang, elles sont plus qu’une langue […] » A rapprocher de ce qu’exprime Annie Ernaux sur son origine de classe, la basse, incrustée aussi même si elle a fait ce qu’il fallait pour s’en échapper. Au risque d’y perdre le lien avec sa parentèle. L’inverse l’une de l’autre.
Constance Debré n’a pas renié son père, sûrement parce qu’avec sa femme il formait un tandem de dingues, de dégénérés. Elle va l’accompagner dans son agonie, sa triste décadence. Lui a perdu beaucoup avec ses addictions, son boulot de grand reporter, ses maisons, ses amis. Constance Debré évoque aussi sa sœur, bien dans le rang elle avec un bon mari, des bons enfants, une bonne vie. Elles ne se voient plus, elle n’a plus rien à lui dire. L’autrice consacre un bon morceau de son livre à expliquer comme elle est contre la filiation, la famille, l’héritage, l’autorité parentale… Ça ressemble à de l’anarchie mais sans éclat.
Sinon, elle est d’un strict absolu sur la tenue de son corps : piscine tous les matins, rasage de cheveux tous les quinze jours, très peu de nourriture ou d’alcool. L’ennui total, je dirais. Mais la jouissance d’être libre de tout, de rencontrer des femmes avec qui ça matche, qu’elle quitte quand ça ne matche plus, et puis d’aller vivre dans des appartements ou des maisons de gens qui lui demandent de garder un chat ou d’arroser des plantes.
Ce livre possède un côté toxique ou venimeux qui me plaît bien car il ne manque pas de style et qu’il est sans filtre, direct et cru. Savoir où se trouve la sincérité est une autre affaire.
Nom de Constance Debré aux éditions Flammarion. 2022. 170 pages, 19 €
Très étoffée fut l’actu de la semaine mais elle n’a pas toujours prêté à rire, alors voici quelques petites saillies qui feront peut-être votre joie et si vous n’êtes pas content, je vous fais un super 49,3 et alors, vous ferez moins le malin, comme ils disent sous les ors de la république, comme ces autres potentats sénateurs qui jugeant que le droit à l’avortement ça ne fait pas partie des droits de l’homme, diront niet et re-niet pour l’inscrire dans la constitution. Ma parole, on est en Russie ou quoi ? Mais c’est une autre histoire, revenons à notre pouvoir de crachat, les jets privés, les trop gros salaires qu’on se demande qu’est-ce qu’ils font de cet amas de billets qu’ils n’emporteront pas au paradis, et puis une pensée pour la première ministre d’outre-manche qui va quand même se ramasser une sacrée prime pour quelques malheureux jours de boulot. Mais on s’en fout, c’est pas chez nous. Sous-entendu : qu’on verrait ça. Tchin, amigas et amigos, régalez-vous du beau temps avant qu’il nous sorte par les trous de nez.
– AR : Et délivrez-nous de la souffleuse à feuilles mortes !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! !!!!!!!!!
– RR : Je ne dis pas que c’est la crise. Je dis juste qu’avant un inconnu pouvait t’offrir des fleurs et que maintenant il te dit que tu as de beaux yeux en t’offrant un kilo de carottes bio.
– MK : Un gros bourrin me grille la place dans la file au supermarket. Je proteste, il m’insulte, me traitant de « cégétiste ». J’ai jamais été aussi fier d’être pris pour la CGT !
– EG : La valeur d’un repas à la Wauqiez c’est presque ce que je touche par mois, comme beaucoup. Ce soir c’était soupe aux orties, le plus coûteux c’était le gaz pour la cuire.
– NP : Tu reconnais un raciste au fait qu’il veut connaître la nationalité de la victime et du coupable pour savoir si c’est un crime grave ou s’il s’en fout.
– NMB : Comment on passe trop pour des cons avec notre 49.3 alors qu’en Angleterre, en deux mois, ils ont déjà changé deux fois de Premier Ministre et une fois de monarque.
– RT : Le gouvernement va envoyer la gendarmerie réquisitionner les entreprises qui pouvaient augmenter les salaires et ne l’ont pas fait.
– NP : Je crois qu’on peut tous quitter Twitter pour aujourd’hui, on ne pourra pas faire mieux comme blague : « Je sui un salarié comme un autre » assure Carlos Tavares répondant à une question sur son salaire de 19 millions d’euros par an ».
– PAG : Le 49.3 est à la politique ce que la claque est à l’éducation.
– SG : On est d’accord, le 49.3, c’est un viol en réunion démocratique, non ?
– RR : Désolé Sartre hein … mais l’existence ne précède pas l’essence, elle la cherche partout.
– DC : Nos vieux sénateurs refusent d’inscrire l’IVG dans la constitution. Ils se vengent de ne plus pouvoir bander, je suppose.
– RP : Très affecté par le départ de Liz Truss car on va encore avoir droit à une série de tweets nuls sur Manuel Valls à la recherche d’un poste.
– PB : Saluons l’exceptionnelle longévité de Liz Truss, qui a quand même connu deux monarques.
– NMB : Ça rentre et ça sort tellement vite au 10 Downing Street, si j’étais eux, j’installerais une chatière
– RDB : In French, we don’t say « danse de néo-nazis sur le cercueil d’une enfant », we say « débordements », and I think it’s beautiful.
– CEMT : « Il est temps que la pénurie de carburant cesse, Bernard Arnault a dû attendre 5 minutes pour faire le plein de son jet privé, ça devient insupportable. »
– PA : Ce n’est pas la peine de vous disputer pour savoir s’il faut, oui ou non, boycotter le mondial Qatari ! De toute façon, vous n’aurez plus d’électricité pour allumer la télé !
– PE : T’es là, peinarde, à étaler du mitosyl sur le cul rouge de ton bébé et le lendemain, il te demande la copie de tes trois derniers bulletins de salaire et de ton avis d’imposition pour être garant de sa première colocation.
– OB : Quand un médecin vous dit que « Vos douleurs, c’est dans la tête », n’hésitez pas à lui répondre que les dépassements d’honoraires, il les aura dans le cul.
– JPT : Ceux qui se demandent quelle planète ils vont laisser à leurs enfants feraient mieux de se demander quels enfants ils vont laisser à leur planète.
– CC : Cette sensation d’être passée sous un train — mais comme y a la grève, cette sensation d’être passée sous vingt trottinettes électriques débridées.
– JB : Liz Truss déjà périmée : à quoi servent les conservateurs ?
– OR : Il semble que le clonage de Margaret Thatcher a moins bien marché que celui de la brebis Dolly.
Les locataires de l’été de Charles Simmons, m’a été conseillé par un ami écrivain. Merci à lui car c’est un livre charmant, très agréable, très frais, très vacances justement même s’il commence par une phrase terrible : « C’est pendant l’été de 1968 que je tombai amoureux et que mon père se noya ». Je dis agréable car il est clair, simple, écrit de façon fluide, avec de très bonnes parties dialoguées où l’on trouve des pépites sur la vie, l’amour, la mort comme dirait un réalisateur du bord de la Manche.
Le héros, Michaël a seize ans cet été-là et, pour une fois, des nouveaux locataires occupent le pavillon dépendant de cette maison destinée à être reprise par l’état, bâtie, comme quelques autres, sur une courte langue sableuse de la côte atlantique des Etats-Unis auxquels elle appartient. Même si ça rappelle un peu l’ambiance des romans de Fitzgerald, c’est très peu habité. Un vieux monsieur fait la navette avec son engin car il n’y a pas de moyen de transport qui la relie à la côte. Ce qui n’empêche pas des fêtes ou la venue d’amis.
Les locataires en questions sont une très belle femme, très séduisante, sa fille de vingt et un ans, très attirante elle aussi et leur chienne. Dans la maison principale, le jeune homme, travaillé par ses hormones, bien sûr, mais plus sur le mode des sentiments que du sexe, le père, très bel homme aussi qui ne rechigne pas à faire le beau, et la mère, forcément jalouse mais avec modération. Et leur chien qui bien sûr, va aller renifler la femelle, s’échiner sur elle à la manière d’un jeu. Pourtant, il est trop petit en taille pour lui faire son affaire. Serait-ce pour montrer au garçon que lui aussi est un peu petit ? On ne sait pas.
Il y a donc des histoires qui se tissent entre ces gens plus les invités, une très jeune poétesse amoureuse de Michaël, un copain qui met les pieds dans le plat et d’autres par lesquels tombent des conseils ou se devinent des secrets. Comme la ville où ils habitent tous n’est pas loin, il se trouve que chacun de ces personnages s’y rend, parfois à l’insu des autres. Et chacun de s’interroger sur qui rencontre qui. Mais surtout qui est amoureux de qui.
La jeune fille se joue de Michaël, sans méchanceté, le père approche d’un peu près la mère de la fille, sans trop d’insistance, et les bains de mer et les tours sur le petit voilier font de belles diversions. Parfois. Le titre anglais, salt water fait référence à la mer mais aussi aux larmes versées.
J’ai vraiment beaucoup aimé cette ambiance. Dommage que cet auteur écrive aussi peu.
Les locataires de l’été de Charles Simmons. 2022 chez Libretto. (2017 pour l’original Salt Water, traduit par Eric Chédaille). 156 pages, 8,30 €. Edward Hopper est l’auteur de la peinture en couverture.
Après avoir décrit et réalisé un film sur son enfance dévastée par une mère qui abusait de son innocence, Eva Ionesco nous raconte la suite dans Les Enfants de la nuit. Lorsque cela commence, elle a onze ans et est juchée sur des talons aiguilles. Elle veut faire femme, échapper à l’emprise de sa mère qui continue à lui faire faire des photos porno et à la présenter à des hommes dont Roman Polanski (qui n’a pas consommé car il l’a trouvée trop jeune), Eva n’a qu’une envie : rencontrer un ami, un vrai, et s’amuser. L’ami, elle le rencontrera au collège, bien qu’aucun des deux n’y aille très régulièrement, il s’appelle Christian Cricri Louboutin, il a deux ans de plus qu’elle et lui aussi adore s’amuser.
S’amuser, c’est quoi ? C’est s’offrir toute liberté, aller danser dans tous les endroits tops, s’habiller pour chaque sortie avec des vêtement luxueux qu’ils glanent chez les people que leurs mères fréquentent, couturiers, mannequins, gens de la mode… Puis, incidemment, consommer des cocktails et différentes substances. Eva va vite partager le lit de Cricri mais ils ne le font pas, lui ne peut pas avec une fille, ils rigolent tout le temps, ils piquent du pognon chez leurs amis nantis et vont d’une boîte (le Sept principalement, la Main Bleue) à l’autre, à la Coupole avec toute la bande de l’époque, des adultes bien sûr dont Alan Pacadis, dans des inaugurations, des événements… Parfois elle rentre dormir dans le mini studio de sa vieille mémé mais évite sa mère, d’ailleurs elle n’y a pas d’endroit à elle chez celle-ci, au grand dam d’une personne de la protection de l’enfance qui menace de la placer si elle ne s’amende pas.
Elle ne s’amende pas. Le clou du livre, c’est l’ouverture du Palace, elle a alors douze ans, où tous les nightclubbers et personnalités vont se retrouver, Mike Jagger, Andy Warhol, les égéries des couturiers, tout ce que compte Paris de stars, chanteurs, acteurs, dealers bien sûr, la drogue circule et tous les excès sont permis. Pierre et Gilles, piliers de la boîte, la photographient pour la une de leur magazine hyperbranché Façade avec Dali, excusez du peu.
Le livre plutôt épais s’arrête lorsque qu’elle et sa mère sont rattrapées par les services de protection. Alors, elle passe sa nuit à danser comme une folle. Comme d’habitude en fait.
Cette histoire est une vraie collection de noms des célébrités de cette époque éméchée, effrénée, il y en a trois ou quatre par page, gentils, ou bourrés, ou défoncés, ou chouettes, ou …ou. L’histoire n’est pas vraiment pleine de suspense mais entre les lieux fréquentés par ces « enfants », les objets, les ambiances décrits ainsi que les musiques et les chansons rapportées, Eva nous remet dans cette période bénie pour beaucoup et complètement dingue. La photo de la couverture nous montre Eva alors qu’elle n’a que douze ans, hé oui, avec Christian Louboutin, encore loin de la pompe à semelle rouge… Sûr que ça n’intéressera pas tout le monde ! Mais c’est marrant.
Les Enfants de la nuit par Eva Ionesco, 2022 aux Editions Grasset. 444 pages, 24 €.
Personnellement, j’adore les road-trips américains, les types qui n’ont souvent plus rien, ou plus rien à attendre de leur vie, ou qui végètent dans une existence sans intérêt, ou qui ont besoin d’un shoot d’adrénaline pour ressusciter, ou qui ont quelque chose à fuir, un chagrin d’amour par exemple, ou qui veulent tout bêtement revivre la Route de la Beat Generation, ses Kérouac, Cassady et consorts. Idiot wind rassemble tous ces prétextes à tailler la route. Idiot Wind est une expression qui correspond à la petite voix idiote qui vous pousse à faire des conneries. C’est bête, Peter Kaldheim aurait dû réussir sans problème, il avait étudié dans une bonne université et avait un diplôme qui le destinait à une voie fleurie dans la littérature. Voilà, il voulait devenir écrivain. Il admirait nos deux héros de la Route et bien d’autres, des poètes aussi. Mais il s’est laissé tomber dans l’alcool et la dope, n’a pas su dire non à un petit trafic qui lui permettait de se maintenir entre deux trips, il a perdu le sens commun et aussi ses maigres possessions, et surtout, l’imbécile, il a trahi son fournisseur, l’impitoyable Bob la Batte en ne lui payant pas les doses de coke qu’il avait claquées dans un feu d’artifice d’inconscience.
Revenu sur terre lorsqu’il a su que Bob la Batte attendait le fric, il a fui la Grosse Pomme tel quel, son manteau, son portefeuille vide (il a escroqué une gentille cliente pour se payer un trajet de Grey Hound).
Mais c’est le Blizzard, rien ne va lui être épargné. Il parvient quand même à partir, il faut voir dans quelles conditions et petit à petit, en voulant gagner l’Ouest où il pense naïvement qu’on l’attend, il va trouver de bonnes âmes sur la route du stop ainsi que des foyers de charité, très inconfortables certes, mais qui lui sauvent la vie. Durant les huit mille kilomètres qu’il parcourt contre vent et marées, dans la crasse, la pluie, le froid, la peur, les nuits à la belle étoile, les menaces policières, il fait preuve d’une force de résistance inouïe face à l’alcool que lui offrent ses compagnons de route…
Le long passage sur la pause de plusieurs mois qu’il effectue à Portland nous montre combien il y a d’assos, très souvent religieuses, qui se sont créées pour aider les indigents, les sans grades et sans avenir. Malgré cela, il n’a pas réussi à trouver des pompes à sa taille et durant des dizaines de pages, on souffre pour lui qui passe son temps à arpenter la ville à la recherche de petits boulots, de repas gratuits, de papiers importants, d’endroits où crécher au sec. Mais la vie continue…
Idiot wind de Peter Kaldheim, 2019, traduit par Séverine Weiss. Chez Pocket. 450 pages.
Oui, Impunité c’est le titre du livre d’Hélène Devynck qui a été violée par PPDA, une journaliste qui a décidé de montrer comment le viol en entreprise est une institution systémique, protégé donc par le système (patriarcal of course) qui ferme si bien les yeux sur ce que subissent les femmes, ici, en tout cas. Car « à partir d’un certain niveau de célébrité, aucun Français n’a jamais été condamné pour des faits de délinquance sexuelle. Jamais. Aucun. » Classé sans suite.
(J’ouvre une parenthèse pour évoquer DSK, mais c’est en Amérique). Et de citer les femmes qui ont eu le courage de porter plainte contre ces personnes connues. Rien. « Le harcèlement prospère parce qu’il est autorisé, parce qu’il indiffère ou qu’il amuse mais aussi, comme le résume […] Jacqueline Rose, parce que le harcèlement sexuel est la performance masculine par excellence, l’acte par lequel un homme vise à convaincre sa cible non seulement qu’il est l’unique détenteur du pouvoir (ce qui est vrai) mais aussi que son pouvoir et sa sexualité sont une seule et même chose. » Sûrement pour cela que PPDA n’a pas nié avoir eu ces relations. Il s’assure juste que la personne est libre (à toutes il demande si elle est en couple). Et qu’elle est disponible.
L’autrice a fouillé un peu partout pour montrer comment se construit et perdure cette violence sur les femmes, pourquoi la plupart ne peut pas se défendre, avec exemple à l’appui de l’effet de sidération, et la complaisance des deux secrétaires qui ne pouvaient vraiment pas ignorer ce qu’il se passait, en cinq minutes pas plus, dans le bureau du boss.
Hélène Devynck a réussi à entrer en contact avec une vingtaine de violées et classées sans suite pour qu’elles témoignent dans ce livre. Toutes racontent la même scène, un viol (sexe, doigts ou fellation pour les malheureuses anorexiques dans la bouche desquelles il éjacule, parfois sous le portrait de sa fille anorexique suicidée). Elle montre que la justice ne répare pas, les classements sans suite étant la règle la plus courante, dissuadant les autres victimes de porter plainte. Ces hommes qui violent, eux, ne le font pas dans l’angoisse, ils font ça tranquillement parce qu’ils le peuvent et qu’ils seront impunis. La journaliste raconte que dans son métier, elle a révélé des scandales de la Vème république et n’a jamais vu l’ombre d’une rétorsion. Ah mais ici, quand il s’agit de viol, les accusés attaquent à leur tour pour diffamation. Elle sait bien que ce livre peut en entraîner car comment prouver qu’elle et toutes les autres)ont été agressées. Aucune ne s’est précipitée chez un médecin ou n’a conservé le sperme (ce qu’avait fait la stagiaire de Clinton, souvenez-vous, mais on est aux Etats-Unis).
On apprend qu’en Australie, respectueuse de la parole des femmes, lorsque l’une d’elle porte plainte pour viol, il est interdit de fouiller son passé et sa vie privé, ce qui signifie qu’aucun comportement de femme ne légitime violence qu’on lui fait subir. Ce qui est très loin de ce qui se passe chez nous puisque la violée à très souvent eu un comportement qui bla bla bla, ce qui fait la part belle aux avocats de l’accusé.
Un fait bizarre aussi est rapporté aussi. Vous imaginez le nombre de lettres qu’a reçues PPDA durant sa carrière, des dizaines de milliers, peut-être plus, mais il a réussi a montrer au juge qui prenait sa déposition des mots, des cartes et des lettres des plaignantes (qui avaient eu besoin de son recours ou avaient dû se plier à des rituels de politesse durant leur collaboration avec lui), qu’il avaient gardées et classées, évidemment/ Mais qui fait ça ? Et pourquoi ? Et comment, dans cette avalanche de paperasse ? En pensant que ça lui servirait au cas où ? Va savoir.
Une dernière chose aussi : une femme, madame K., a réussi, après une bataille de vingt-deux ans, a faire qu’une femme accusée de diffamation peut elle aussi compter sur la présomption d’innocence (je résume, mais c’est extrêmement important pour les victimes).
Ce livre est très riche, prenant, écrit dans l’urgence et ça se ressent. Mais encore une brique ajoutée au mur de l’indifférence du système.
Impunité d’Hélène Devynck, 2022 aux éditions du Seuil. 272 pages, 19 €.
Alors qu’il y en a plein qui se donnent un mal de staffordshire bull terrier pour nous pourrir la vie — je parle bien entendu de ceux qui fustigent les remplisseurs de jerricans, les refuseurs d’obtempérer ou de tempérer même le climat, les réquisitionneurs de tout poil, les footballeurs qui s’en vont marquer ailleurs que dans notre beau pays sentimental, je parle aussi des alouettes qui vont venir harceler les chasseurs pour qu’ils leur tirent dessus alors qu’en même temps le soleil éblouit cruellement leurs yeux injectés du sang de la vigne, des empêcheurs de quaranteneuftroiser en rond alors que qui c’est le chef ici, de ceux qui critiquent l’augmentation de salaire du monsieur de Total qui défie tous les efforts dont ils ne seront jamais récompensés, et les dîners fins de grande tradition française offerts par Wauwau, tout ça et tout le reste — hé bien figurez-vous qu’il y en a certains qui préfèrent gâcher (je n’ai pas dit Gachet, hein) gâcher la vitre blindée d’un tableau de nature morte plutôt que de gâcher la planète et pourtant dieu sait (si, il me l’a dit) que c’est quand même un sacré boulot que de gâcher la Terre. Voilà où on en est, au bord de cette fin de semaine qu’on va arroser ce soir autour d’un pot locaux. Alors tchinons en saluant la théorie du ruissellement qui va peut-être aider à remplir nos nappes.
– PG : Je viens d’avoir Vincent van Gogh au téléphone, franchement lui le truc avec la soupe sur les tournesols, il trouve ça stylé. « A l’époque, j’ai jamais réussi à les échanger contre une soupe ».
– DU : Immense soutien à la vitre de protection du Van Gogh qui doit être traumatisée.
– RP : Toute la team Liebig condamne fermement l’acte de vandalisme commis contre le tableau de Van Gogh. Nos soupes sont avant tout là pour véhiculer des valeurs de tolérance. Signé le service légumes de saison.
– NMB : Tu m’étonnes qu’il va faire chaud la semaine prochaine, ils annoncent jusqu’à 49.3 à Paris.
– PA : Je n’ai rien contre les religions, je dis juste que ça fait quand même beaucoup de guerres et de morts pour savoir qui a le meilleur pote imaginaire !
– CC : Il n’y a plus de voitures neuves, de moutarde, il va falloir pédaler comme des hamsters pour avoir de l’électricité, tu fais dix heures de queue pour avoir de l’essence, les trains arrivent avec trois heures de retard, tu dessines tes timbres à la main et on bute les mésanges à la glu.
– EM : (Edgar Morin) : Le matin je veux rester au lit c’est tout chaud, aussi bon que là où j’étais avant de naître il y a 101 ans et d’où j’ai été expulsé par une force extérieure. Et chaque matin, revient la force extérieure, qui arrache la couverture et me catapulte dans le monde froid.
– BR : Vu que les élèves qui mettent le trouble dans les couloirs refusent de plus en plus d’obtempérer et s’enfuient quand on leur demande leur carnet, il faudra bientôt nous équiper de lassos pour les livrer pieds et poings liés à la vie scolaire…
– MMR : Quand on me dit » je passe te prendre chez toi » j’hésite toujours à savoir si je dois m’habiller ou pas.
– PA : Je me suis inscrit sur Meetic il y a deux heures. J’ai dit que je travaillais chez EDF et que je ne payais pas l’électricité. J’ai déjà reçu plus de 500 messages. Ça marche pour moi.
– OV : Qu’est-ce que je dois faire à votre avis ? Un élève m’affirme qu’il n’a pas fait d’erreur dans sa copie mais qu’il a simplement été « ébloui par le soleil ».
– MPG : « C’est vrai que sur la crise du carburant, on s’est un peu retrouvé en panne sèche d’idées, mais c’est lié à la pénurie de cerveaux au sein du gouvernement. » (Gabriel Attal)
– EL : Les courageux chasseurs virils qui en ont entre les cuisses vont pouvoir à nouveau faire vivre nos traditions, buter ces putains d’alouettes qui sont les meilleurs oiseaux chanteurs. Avec un filet tendu, ce qui est un combat de l’homme contre l’animal, sublime ! Bravo à eux.
– NO : Quand j’ai lu que le gouvernement envisageait la réquisition, j’ai naturellement cru qu’il s’agissait de puiser dans les « profits records » de Total pour améliorer le sort des salariés…
– OR : Mbappé annonce qu’il veut quitter le PSG et aussitôt le gouvernement annonce la réquisition du personnel des dépôts de carburant pour qu’il puisse faire le plein de sa Ferrari, c’est vraiment le gouvernement des super riches !
– PE : Comment en vouloir aux riches de préférer aller acheter leur pain en jet plutôt qu’en voiture, en ces temps où l’essence manque mais pas le kérosène ?
– HD : Afin de limiter les discussions clivantes sur l’actualité du moment, je propose que M’Bappé se mette en ménage avec Annie Ernaux et qu’on mette PPDA à la France insoumise en binôme avec les membres de la commission de purge, et qu’on indexe le cours du PQ sur le baril de brut …
– EL : Est ce vous connaissez un prix Nobel qui a été autant insulté par les illettrés qu’Annie Ernaux ? Tous prix confondus ?
– ADN : Électricité trop chère, les CRS remplacent le taser par des orties.
– DT : Les gens pensaient Covid. Maintenant ils pensent qu’au plein.
– PA : Le plus heureux des hommes sera celui qui terminera l’année avec le plein d’essence, un pot de moutarde, une bouteille d’huile de tournesol, qui n’aura chopé ni le covid ni la grippe ni la gastro et qui aura survécu aux bombes nucléaires de Poutine. Bonne chance !
– MPG : Bruno Le Maire : « Je demande à chaque internaute de s’excuser pour s’être moqué de mon col roulé sur les réseaux sociaux. »
– NA : On imaginait 2022 avec des voitures volantes fonctionnant à la fusion nucléaire. On se retrouve dans un remake de Mad Max.
– ZSG : Laurent Wauquiez mis en cause pour un dîner à 100.000 euros financé par la Région ? Il faut bien avouer aussi à sa décharge que le cours de la pomme de terre s’est envolé.
– DC : On ne dit plus je vais dîner chez Ducasse. On dit je vais dîner avec Wauquiez.
– OB : On m’a raconté une blague sur l’essence, et jerricané.
– MT : Je suis pas moche, j’ai fait le choix de la sobriété esthétique.
– JML : Je ne comprends pas pourquoi des hackers russes s’en prennent à nos hôpitaux alors que le gouvernement s’en occupe tout seul.
– RS : On comprend mieux maintenant pourquoi tous ces gens éblouis par le soleil ratent le cendrier et jettent leur mégot par terre.
– PI : En racontant ma vie de parent j’ai dissuadé involontairement deux femmes d’avoir des enfants. Et toi c’est quoi ton petit geste pour la planète ?
– OM : On n’en peut plus, on est à bout ! Quand est-ce que les salariés vont cesser de bloquer les usines de moutarde ?
– AS : Apparemment, c’est plus facile de discuter avec Poutine qu’avec la CGT.
– EL : Wauquiez, c’est pas le mec qui en a marre de tous ces assistés au RSA qui vivent largement ?? Il vient juste de dépenser deux cents RSA en un repas !
– RS : On voit Goldman à la télé. Je dis à ma fille de 7 ans, « tu sais j’avais toutes ses cassettes“ — “c’est quoi une cassette ? » — “c’est comme un CD mais en plus vieux » — “c’est quoi un CD ? » Je pars pleurer dans le jardin.
– PA : Elle est là, la saison du « Je laisse la porte du four ouverte pendant qu’il refroidit, ça va chauffer l’appart ! ».
– ZSG : Demain je suis invité à un mariage. Pour le cadeau, j’hésite entre un service de table en argent, un jerrican d’essence, une bouteille de gaz ou une paire de moufles.
– VL : Le Van Gogh aspergé de soupe était protégé par une vitre. Donc, aucun tableau innocent n’a été blessé (c’est bon, rassurés ?), et les activistes ont prouvé leur point : les « braves gens » s’indignent environ 10 quadri-zilliards de fois plus pour un tableau que pour le climat.
– GD : Ce qui me fait marrer, c’est que la plupart des gens outrés se seraient moqué des Tournesols alors. Van Gogh était considéré comme un tartouilleur de bas étage par tout le monde à l’époque, sauf son frère et Gachet.
– VI : Si Van Gogh était vivant, les mêmes qui hurlent aujourd’hui à l’art qu’on assassine le traiteraient de fainéant, d’assisté, et exigeraient qu’on lui fasse sauter son RSA. « Payé pour peindre des fleurs ? Et puis quoi encore ?
– FI : Aujourd’hui, alors que le « j’assume » devient synonyme de « je vous emmerde », inquiétons nous.
– JB : J’attends avec impatience la création de l’emoji « Non, mais en réalité c’est beaucoup plus compliqué que ça, et il faut aborder cette problématique sous plusieurs angles, en tenant compte de sa dimension socio-économique ».
Un coup de gueule, ça faisait longtemps. Mais là, ça déborde. Oh c’est juste un tweet* scrollé par hasard, qui parle d’un père, un père magistrat, excusez du peu, pas un sans dents, un cassos, un Insoumis (ha ha), non, le vice-président du tribunal judiciare de Dijon, un type très honorable dans sa belle province — qui propose forcément à ses commensaux de se servir généreusement de moutarde — époux d’une magistrate avec qui il fréquente depuis des années des sites échangistes (chacun fait ce qu’il veut entre adultes consentants, ce n’est pas le propos) sur lesquels il a commis l’acte infâme. Qui concerne sa fille. Et figurez-vous que c’est un client du site échangiste, choqué vraisemblablement par la proposition, qui l’a dénoncé ce chouette papa.
Bien sûr, il y a des dénonciations qui peuvent mettre mal à l’aise, pas toutes, je suis pour #metoo, mais laisser faire sans rien dire, je ne trouve pas que ce soit plus moral, en tout cas, fermer les yeux n’a jamais été efficace. A voir le nombre de personnes condamnées par rapport aux personnes agressées, violées ou tuées, aux enfants surtout qui n’ont pas les mots. A voir le chemin de croix dans lequel s’engagent les plaignant.e.s lorsqu’elles cherchent de l’aide, notamment celle de la police ou de la justice, à savoir que ces personnes sont souvent soupçonnées d’être (un peu ?) responsables de ce qui leur arrive, à avoir vu pleurer des hommes solides comme des rugbymen évoquant les violences d’entraîneurs ou de curés sur leur jeune corps…
à constater comment le silence fait la part belle à la culture du viol et de l’inceste. Le silence est la principale cause de la perdurance de ces crimes.
à entendre les voix adverses, principalement issues du patriarcat, ou de partis radicaux, ou du monde des puissants ou juste de petits phallocrates pas forcément violents qui ne savent peut-être même pas pourquoi on les ennuie avec ça,
à ne pas en croire mes oreilles lorsque Elisabeth Badinter elle-même s’est mise dans le camp des bien-pensants qui s’indignent qu’on se mêle des affaires privées et que, bon sang, les victimes n’ont qu’à « prendre leurs responsabilités », c’est à dire ne pas attendre que la prescription soit effective pour porter plainte. Merde (non elle n’a pas dit merde mais l’a pensé) « mais quand même, dix ans, ce n’est pas si mal ».
se dire que des gens d’importance dans la lutte contre les violences en sont encore à ignorer — alors que c’est dit, su, avéré, raconté, filmé — à ignorer donc le refoulement des événements traumatiques durant souvent plus de dix ans. Qui surgissent brusquement dans la vie brisée des victimes, leur permettant de comprendre pourquoi elles ont été aussi mal toute leur vie,
et de continuer à entendre cette phrase « il faut faire confiance à la justice », seule façon autorisée par ces honnêtes moralisateurs de régler le problème. C’est cela : faire confiance à la machine judiciaire tellement dégradée qu’il faut attendre des mois, voire des années son jugement. Et encore à condition que l’accusé présumé innocent ne fasse pas appel, ce qui décale d’autant l’éventuelle condamnation, remet tout en cause, laisse le crime impuni pour encore combien de temps…
et puis savoir que si tu es plaignant.e, si le présumé innocent (quand je pense que PPDA, après 90 récits de viols à ce jour est malgré tout présumé innocent) a les moyens de démolir ta vie avec ses trois avocats stars, de mettre en pièce ton intimité comme ton corps l’a été, de faire douter la partie adverse sur ta moralité,
c’est la colère alors, la rage, l’indignation.
Tout ça parce que j’ai eu connaissance d’un fait qui montre bien comment marche « la justice de notre pays de droit » comme ils disent, à qui il faut faire confiance. Même si l’accusé est immonde. Voici le fait :
Un magistrat de Dijon, il s’appelle Olivier Bailly, offrait sa fille de 12 ans à qui voulait bien sur des sites coquins. En 2019 et 2020. En première instance, en mars 22 (donc deux ans après la dénonciation) il avait pris deux ans de prison, dont un ferme. Je le redis : pour avoir proposé à des hommes d’avoir des relations sexuelles avec sa fille de 12 ans. Pas cher payé. Et fin septembre, ce magistrat bon père de famille voit sa peine allégée par la cour d’appel de Besançon. Il ne fera finalement que du sursis.
Il y a très peu d’article, la presse n’en parle pas beaucoup. Vérifiez sur le net, vous verrez. Donc, mis en examen en 2020. Puis appel et hop, allègement de la peine. Des juges très cléments pour leur pote car l’art. 227-2 du Code pénal prévoit que « Le fait de favoriser ou de tenter de favoriser la corruption d’un mineur est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. »
Je relis l’article du Monde, car ce n’est pas tout : il a proposé sa fille de 12 ans sur des sites libertins pendant neuf mois. Pas une petite fois comme ça, en passant, pour être chouette avec un pote désireux de bouffer de la chair fraîche et à l’origine garantie. Oui mais c’était mon enfant, je suis son père, elle m’appartient, j’en fais ce que je veux, ça ne regarde personne. Mais il ne proposait pas que des rapports sexuels. Tant qu’à faire dans le trash, dans le monstrueux, on va pas se contenter de caresser son minou, ah non, il y a des truc plus marrants à faire, l’agresser par exemple, lui faire du mal comme vous voulez, comme vous le sentez, c’est vous le mec bon dieu ! Si vous trouvez que j’exagère, lisez ses verbatims ci-dessous qui sont à gerber, mais comment peut-on demander à des mecs de faire ça non seulement à son enfant, mais à n’importe quel enfant, à n’importe quelle personne. C’est tellement immonde.
Quelques verbatims :
«Tu vas la forcer» répétait le magistrat à ses interlocuteurs. Il leur suggérait qu’elle soit «humiliée», qu’ils urinent sur elle, qu’ils s’y prennent à «plusieurs», voire qu’ils la mettent dans un «réseau de pédo».* Dans ce dossier, Médiapart précise qu’aucun interlocuteur d’Olivier Bailly n’a été inquiété. Aucun de ces hommes ne sera mis en cause durant la procédure. «Une occasion manquée», regrette l’avocate de l’association Agir contre la prostitution des enfants. Il est vrai qu’il n’y a pas eu, heureusement, de passage à l’acte. Ça n’excuse rien.
Et sinon, heu… Ah si. Ce brave homme, bon époux, magistrat important, people respecté dans sa ville, a deux autres enfants, par contre, il n’a plus le droit d’exercer (ça c’était avant l’appel). Il ne doit plus approcher de mineurs pendant dix ans. Mais il habite toujours sa maison avec ses enfants !!! Oui, bon on ne va tout de même pas priver ce notable de son petit confort de vie. Et c’est-y pas drôle ça, qu’il ne soit même pas déchu de son autorité parentale ?
Sinon, comment vit la jeune fille ? Oh, elle n’a pas à se plaindre, elle aurait dû recevoir 5000 balles de dommages et intérêts, en première instance, notez, mais peut-être qu’après l’appel, cette somme a été négociée à la baisse ou purement et simplement annulée. Et les deux autres enfants, et sa femme, et son entourage ? Il va encore acheter son journal sans se cacher ? On lui donne toujours du mon cher confrère s’il va jouer au golf ? Je m’interroge.
Ah j’oubliais son avocate, une femme donc, Pauline Neveu (est-elle maman ?) qui avait alors, en mars, plaidé sa relaxe. Vous me direz, c’est son boulot.
Alors oui, assaillants divers, harceleurs, violeurs, qu’avez vous à craindre de la justice de notre pays de droit, dont certains justiciables d’ailleurs se trouvent parmi les hautes instances de notre pays. Hé bien continuons à lui faire confiance.