Vernon Subutex suite et fin.

Hélas, ça s’arrête. Faute de combattants. On y est. Les marginaux, les out of the blue, les cassos, les niqués de la vie, la communauté de Vernon, après avoir écumé leur vie comme on râcle une mousse de saleté sur un frichti mal rincé, envoient leur lettre de dèm à cette foutue vie de cette époque merdique. Mais avant ça, Virginie Despentes nous familiarise, je veux dire nous empathise avec des personnages comme on n’en voit peu à la télévision, des bancales, des trans, des bizarres ou des violents. On s’y attache même quand on les déteste. Vernon, lui, reste pur, pas très actif puisque tous le considèrent comme un gourou. Ils organisent ce qui devient leur rêve, ou « rave », appelés convergences, les nuits entières dans des lieux sauvages, coupés du monde, interdits de connections et de dope. Seulement l’immense et inexplicable communion de ces lourdés de la société emportés par les musiques ordonnancées par Vernon Subutex, les menant tous à un orgasme a-sexuel et pharamineux. Inoubliable. Raison de vivre. C’est bien joli tout ça, mais il y a des vengeances qui se préparent, des tatouages pour en brûler d’autres, des chasses aux femmes, des viols et des violences. Il y a aussi des nanas islamisées qui en reviennent, qui fuient, des trahisons filiales et tout ça. Ça fourmille comme toujours chez l’auteure.
Ça fourmille aussi sur notre société, l’actuelle, celle qui nous met à cran, qui nous érige les uns contre les autres, qui interdit de vivre à la marge — et puis quoi  encore ? —  qui s’étonne que les armes qu’elle fabrique recrachent leur haine sur sa petite gueule d’amour. Ça vibre, c’est chaud, c’est tumultueux. C’est sanglant. C’est parfois poésie et musique, désir d’amour. Tout ça, quoi.
C’est un fin décisive qu’elle nous livre, pas de tome 4, impossible. Je suis néanmoins réservée sur le tout dernier chapitre qui commence en 2077 et continue quelques décennies après. La SF m’intéresse moins même si VD  tient à ce que Vernon Subutex lui survive, d’une façon ou d’une autre, se recrée, ne meure pas. Grandeur d’âme de l’écrivaine. C’est chouette quand même voire touchant.

Vernon Subutex 3 de Virginie Despentes. 2017 aux éditions Grasset. 400 pages. 19,90 €
Les articles concernant les tomes 1 et 2 peuvent être lus ici.

Texte © dominique cozette

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