Cher petit rat

Tu es mort, applati raplapla sur le bitume parisien du 13ème arrondissement et ce, dans l’indifférence générale. Cher petit rat, peut-être t’attendait-on quelque part, mais tu as traversé sans regarder  et vlam, te voilà écrapouti. On devine encore tes humeurs aqueuses qui dessinent autour de toi l’auréole de sainteté que personne ne te décernera, car, petit rat, les gens ne t’aiment pas. Les gens ont peur de toi, on se demande pourquoi. Ils te trouvent radin, crade, laid, répugnant et vont même, honte à eux, jusqu’à te comparer à Eric Zemmour, laisse tomber, un mec pas intéressant. Avec une queue plus petite que la tienne.
Cher petit rat qui a tenté de survivre dans ce monde bétonné de toutes parts, sois quand même heureux de ton sort car d’autres rats croupissent dans des laboratoires, bouffis de tumeurs cancéreuses par nous inoculées, abrutis de médocs qu’on n’ose pas avaler, rongés de maladies humaines, stressés d’apprentissages stupides, et torturés, vivisectés, prisonniers d’un enfer indicible.
Cher petit rat, j’espère que tu as eu le temps de connaître l’amour et la gourmandise, que ta vie aura été, sinon prospère, du moins heureuse. Adios, ratounet !

Texte et photo © dominique cozette

L’année 67 racontée à mes blecteurs *

On entre de plain-pied dans l’ère hippy qui n’est pas non plus la période cool qu’on se plaît à imaginer : aux USA, les émeutes raciales sont d’une rare violence avec des centaines de morts bien qu’un Noir siège pour la première fois à la Cour Suprême, qu’en Virginie, on interdit d’interdire les mariages interraciaux et que le président Johnson incite les parents à accompagner les enfants de couleur différente à l’école. On interdit aussi la discrimination de l’âge à l’embauche car les plus de 40 ans, jugés trop vieux, ont du mal à trouver un job. Les femmes en ont marre de la mâle dominance et se regroupent en masse au sein du Women’s Lib. Le Pentagone manifeste contre la guerre au Viêt-Nam qui a déjà tué 15 000 GI, en mobilise 400 000 et coûte 20 milliards de dollars par an.
Et pas cool non plus ailleurs dont Israël et la guerre des 6 jours, la Grèce et les colonels au pouvoir, l’Australie et le droit de vote consenti aux Aborigènes mais qui restent sous curatelle. En Bolivie, le Che est abattu de deux rafales et devient une figure christique sur les photos qui le représentent barbu et à moitié nu,  tandis que Régis Debray  est condamné à 30 ans de prison. Il sera libéré en 70.
Au Canada, de Gaulle lance « vive le Québec libre » et en Afrique du Sud, le professeur Barnard réalise sa première greffe du coeur qui ne tiendra que quelques jours. Bonnes nouvelles pour certains : les Suédois se mettent à rouler à droite et, sans rapport je pense, ils sont les premiers à légaliser la pornographie.
Plus près de chez nous, à vrai dire en plein chez nous, on subit la première marée noire, celle du Torrey Canyon qui souille nos plages et celles des Cornouailles anglaises et englue nos pauvres oiseaux de mer, noires icônes devenues hélas banales.
Des millions de curieux se pressent pour voir  Toutankhamon qui revient aujourd’hui. On assiste au lancement du premier sous-marin nucléaire, le Redoutable, les grenouilles de bénitier sont séstabilisées par la messe en français, les chômeurs — car le chômage existe oui oui —  se réjouissent  de la création de l’ANPE et les salariés, eux, de l’obligation pour les entreprises de les intéresser  aux fruits de leur travail. La Carte Bleue nous laisse perplexes, en revanche la télé couleur nous estourbille avec les décors flashy qu’on nous inflige et les tenues fluos qu’on impose aux invités. Le plus intéressant reste sans conteste l’adoption de la loi Neuwirth qui autorise la contraception : vive la pilule ! La libération sexuelle approche à pas feutrés ou à gros sabots, je ne me souviens plus.
En France toujours, le tout confort dans la maison est loin d’être général : seulement 18,6% des foyers ont les WC dans la maison. Pour 38,6%, c’est la cabane au fond du jardin avec concert de mouches les jours de soleil et engelures aux fesses l’hiver, et 25,6%  partagent les toilettes à la turque (en général) avec les autres locataires de l’immeuble. Pour d’autres :  rien, on fait comme le crocolion : on se retient.
La France compte 500 000 fonctionnaires (contre 5, 3 millions en 2009) et 11,5 millions d’écoliers et étudiants soit une personne sur 4 (pour 15 millions de nos jours).
Culturellement, ça roule avec les parutions de Debord et sa Société, Vaneigem et son Traité, Deleuze et Derrida. Nathalie Sarraute se joue au petit Odéon…
Le bon peuple s’émeut du mariage d’Arnavour avec Ulla, sa blonde jeunette, et de celui du King Elvis et sa jeune brunette, Priscilla. La minijupe continue à faire loucher les hommes, et la mannequine star la mieux payée s’appelle Twiggy et pèse 41 kg après le pipi du matin.
Sont nés en 67 : Kool Shen et Joey Starr, Kurt Cobain, Sandrine Bonnaire, Julia Roberts, Nicole Kidman, Amélie Nothomb et … Carla Bruni.
Sont partis : la plus piquante, Françoise Dorléac, la plus opulente Jayne Mansfield, la plus mythique, Vivien Leigh, la plus impec, Martine Carol.  Mais aussi Spenser Tracy, John Coltrane, Edward Hopper, Ottis Redding, le maréchal Juin. Magritte a  cassé sa pipe qui n’en était pas une.
Quant à moi, je sors un 45 tours et puis s’en va, je rate droit avec plaisir et m’inscris en psycho à Censier avec plaisir.

Texte © dominique cozette (Sources Internet diverses + Les années hyppies de Jacques Pessis)

L’année 66 ici.
(Vous pouvez voir les années précédentes à partir de l’année 55 dans la catégorie « du vrai »)

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L’année 66 racontée à mes blecteurs *

Le monde bouge en 66 avec l’avènement d’Indira Gandhi en Inde, le retrait de la France de l’Otan voulue par de Gaulle qui demande au président des Etats-Unis le retrait des troupes du Viêt Nahm.
Par ailleurs, ce même de Gaulle inaugure la longue série d’explosions atomiques dans le Pacifique ainsi que la première usine marée-motrice, sur la Rance. Il lance diverses mesures allouées aux PME pour résister à la concurrence européenne et faire la nique au déficit : réussite totale puisque la dette aura disparu en 1970 ! (pas pour longtemps…)
66, c’est le début de l’affaire Ben Barka, et l’apparition hallucinante du shadow cabinet, gouvernement fantôme d’opposition créé par Mitterrand.
Aux Etats Unis, les émeutes raciales battent leur plein favorisant  la naissance de deux mouvements de la cause noire, le Black Power et les Black Panthers. Parallèlement, les B52 US  bombardent allègrement le Viêt Nahm et l’administration US  livre des armes tactiques à l’état d’Israël.
Le World Trade Center commence à gratter le ciel tandis que les premières communautés hippies s’installent en Californie.
De l’autre côté de la terre, Mao entame sa révolution entourés de Gardes Rouges, très remontés contre les Tibetains.
Chez nous, Malraux ouvre la première Maison de la Culture et ça se passe à … Amiens *(tiens, tiens, voilà où ça mène !). Les salaires des femmes plafonnent :  36% moins élevés que ceux des hommes. Est-ce pour cela qu’Yves Saint-Laurent les vêt (les femmes, mais certainement pas les salariées ci-dessus mentionnées)  d’un superbe smoking ? Paco Rabanne lui, les fait défiler dans des tenues drôles et  importables, fabriquées dans du rhodoïd et autres matériaux industriels.
Cette année-là, on assiste aux adieux scéniques de deux entités monstres : Brel et les Beatles, l’un à l’Olympia, où va se produire Bob Dylan pour  sa première en France, et les quatre chevelus à San Francisco. Lennon annonce qu’ils sont plus célèbres que Jésus Christ, ce qui provoque des tollés d’intolérance. George, plus matérialiste, épouse Patti Boyd. Et  la Reine, reconnaissante des devises qu’ils rapportent au royaume, les décore de l’ordre de l’Empire. Ainsi que Mary Quant, l’inventrice de la mini-jupe, que ne prise pas la très scandaleuse Sophia Loren pour  épouser son Carlo Ponti.
Cette année est à marquer d’une pierre blanche avec une invention extraordinaire pour les musiciens en herbe : le mini K7 Philips, petit enregistreur portable au piètre son mais générateur de maquettes infinies et, ne l’oublions pas, des premiers piratages de disques.
Au ciné, on a droit à deux formidables Godard : Made in USA et Masculin-Féminin avec Léaud et la très prometteuse Chantal Goya qui était une adorable petite brunette avant sa période Bécassine. On découvre le chabadatesque Lelouch, on se marre à la Grande Vadrouille avec de Funès et Bourvil, on vibre avec le Bon, la brute et le truand, on se signe avec Rivette et sa Religieuse, on braie avec Bresson, son âne Balthazar et son autre Anne, Wiazemski.
Les séries télé, c’est la folie : citons les Globe-Trotters avec les jeunes débuts d’Yves Rénier pas encore calamiteux, Thierry la Fronde qui deviendra culte pour un président aux goûts de …  bref, Au nom de la loi avec le génial Steve Mc Queen, ma sorcière bien aimée, Flipper le Dauphin…
Pierre Sabbagh fera un carton avec au Théâtre ce soir  et son générique : « les décors sont sont de Roger Hart et les costumes de Donald Cardwell »
Qu’est-ce qu’on écoute en 66 ? des 45 tours deux titres qui ont supplanté les quatre titres en récession. Antoine élucubre avec ses chemises à fleurs, ses pilules et ses attaques contre Johnny qui va rétorquer avec « cheveux longs et idées courtes ». Faire l’amour va pouvoir enfin se dire, merci Polnareff, Dutronc poursuit sa glamoureuse carrière avec les Play-boys, Bernard « Tapy » se gaufre avec l’oubliable Un dernier verre, Mireille Mathieu sévit grave tandis que deux Salvador, Adamo et Henri, sont au hit. On danse sur Gainsbourg et son Qui est in, qui est out. N’oublions pas Michelle des Beatles, Sheila et autres yéyéteries.
En 66 vont disparaître l’homme qui n’aura jamais ri, Buster Keaton, le beau Monty Clift, le surréaliste André Breton et l’homme aux rats, Walt Disney.
Naîtront Laurent Garnier, le couple David Hallyday et Estelle, la belle Sophie Marceau, le séduisant Vincent Cassel et l’oreilleux Dany Boon. Deux poids lourds aussi : Tyson et Cantonna.
Quant à moi, je me tire en Beaulieu avec mes soeurs et une copine à Cadaquès où on s’éclate tout l’été au club des Naufragés et aux fêtes cosmogoniques du Maîtrrrre de Porrrrrt Lllllllligattttt !

* Rectificatif de Bob A : Petit Bémol pour l’inauguration de la première maison de la culture. Ce ne fut pas en 1966 à Amiens, mais en 1961 au havre appelée également le Musée Malraux)…Et entre temps en 1963 fut inaugurée celle de Bourges dirigée par mon ami Henri…

Texte © dominque cozette (sources Internet diverses) et photo © c’est écrit dessus

L’année 65 ici.
(Vous pouvez voir les années précédentes à partir de l’année 55 dans la catégorie « du vrai »)

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Naissance

(J’ai écrit cet article il y a dix ans. Quand elle a eu un compte rond. Dix ans plus tard, il n’y a rien à jeter…)
C’était un jour comme aujourd’hui, clair, radieux, irréprochable. C’était un jour J. Le jour J. Le jour où le petit inconnu aurait un sexe, une taille, un poids, une apparence, un visage et une existence.
Ce fut un jour féminin. Un jour tout rose. Où je ne me demandai pas comment faire. Car je sus que je saurais. Je sus que ma vie avait pris le tour qui convenait, qu’elle avait pris tout son sens et que l’essentiel prendrait tout mon espace.
Les fées d’habitude, elles se dépêchent, elles se démènent,  elles courent d’une couche à l’autre mais là, malgré leur dos broyé à se courber comme ça, restaient penchées sur le berceau, touchées par la grâce de ce petit bourgeon.
Je ne me demandai pas comment  lui apprendre à grandir, à regarder, à écouter, à profiter. Je sentis qu’elle saurait faire ça toute seule, qu’elle me lâcherait la main trop souvent et que c’est moi qui devrais apprendre à grandir, à la regarder, à l’écouter et à profiter d’elle.
J’ai tout de suite vu qu’elle était quelqu’un, qu’elle était elle. Spéciale, unique.  Surtout pas un clone. Elle avait pioché dans nos ADN comme on cueille un bouquet, sans faire la fine bouche devant nos imperfections.
Je ne me posais pas de questions encombrantes, ne me faisais pas de soucis inutiles, ne m’alarmais pas outre mesure. Cette petite créature me mettait en confiance. Loin de m’inquiéter, elle me montrait que la vie c’est simple, que l’amour coule de source, que les soins sont faciles, que l’instinct a raison.
Je savais néanmoins que je ne serais pas une bonne mère, car nulle ne l’est, que je lui ferais peut-être du mal ou de la peine parfois, qu’il serait normal d’avoir envie de l’étouffer sous l’oreiller, de crier plus fort qu’elle et d’abandonner mes principes pour redevenir sauvage. Mais globalement, je sentais que ça marcherait d’enfer entre elle et moi. Et j’étais sûre que ça serait toujours une superbe aventure.
Bien sûr, il y eut les peurs, les terreurs, les angoisses. L’accident possible, le bad boy bouleversant, les provocs de jeunesse, les tentations dangereuses, les tests imbéciles, les pervers de tout poil. Ça fait partie du deal, on en prend pour perpète.
Pacifique, généreuse, tolérante, altruiste, la maternité est ma seule religion. Il n’y a pas plus puissant que cette vie qui jaillit de notre corps et nous tient pour toujours par le bout du nombril. Rien de plus  banal, mais de plus extraordinaire, rien de plus animal mais de sacrément divin, rien de plus intime mais de tellement universel, rien de plus quotidien mais de plus exaltant.
La petite chose est devenue grande, elle  m’a construite, a affuté mes sens et ma conscience, m’a fait toucher l’infini, le surnaturel, le merveilleux et le miraculeux. La plus belle histoire de ma vie.

Texte et dessin © dominique cozette

 

Aventures des Toiles, comment que je me la pète !

Figurez-vous que l’un de mes tableaux a suffisamment plu à François Gadrey, PDG de la très belle marque Aventures des Toiles, pour qu’il en fasse l’un des thèmes de sa collection été 2013. Sept artistes par saison ont ainsi le bonheur de représenter un thème sur une large palette de très beaux vêtements, robes, ensembles, hauts, jupes, pull, etc…
J’ai débarqué au Creusot la semaine dernière pour voir les collections et là, chers amies/amis, j’ai roucoulé !


Vous allez me dire que sur les belles mannequines, c’est une chose… Non, parce que toutes les femmes qui étaient là portaient une, deux ou trois pièces de vêtements de saisons passées, de la dame qui fêtait ses 80 ans à pratiquement tout le personnel féminin de l’usine, et aux acheteuses, responsables de magasins, représentantes,  petites, grandes, rondes, maigres, jeunes ou mûres.  Toutes avaient fière allure, c’était très joyeux !

La visite de l’usine le lendemain m’a donné d’autres sentiments de satisfaction : c’est une marque éthique qui fait appel aux talents nationaux, aux machines et à la main d’oeuvre françaises. Pas d’esclaves à 29 € par mois au fin fond de l’Asie, pas d’abattage, pas de pratiques douteuses. C’est respectueux. Plus cher que chez H&M mais ça le vaut. Et les personnes qui travaillent là ont l’air bien plus heureux que dans certaines boîtes que j’ai fréquentées. Elles adorent leur job. Et tant mieux parce qu’en même temps, il faut vivre au Creusot. Le lundi soir après nos agapes, trouver un bar ouvert c’est comme demander à Samir Nasri de dire s’il vous plaît. Mais Paris n’est qu’à 1h20 et tout autour, la campagne est magnifique, et le vin mondialement apprécié. Le bourgogne.

Et puis, dans cette usine, voir des techniciennes travailler sur des rouleaux de tissu ou de maille issu de mon tableau, ça fait drôle ! C’est énorme !
Je vous signale qu’il y a un très beau concept store Aventures des Toiles à Paris dans le Marais, 38 rue Sainte Croix de la Bretonnerie. Les soldes viennent de commencer, c’est le moment de découvrir les dernières collections !

Ce dernier modèle est un petit pull d’été en maille, c’est une stylisation de mon tableau, très fin, très chic. J’ai hâte de le porter mais il faut attendre 2013.
Pour en savoir plus sur Aventures des Toiles, voir le site ici, très complet, assez technique, avec des vidéos pour présenter les différents postes de la création et le blog actu.
Pour finir, voici le tableau :

La légende a été gommée sur les modèle car tout le monde n’aurait pas eu envie d’exhiber  I’m fuckin’ so great ! Oh my God ! Keep in contact. See you later (= CUL). Trop clivant.
Je ne vous parle pas des autres artistes 2013, je n’ai pas les photos mais ils seront en ligne avec moi dès que la collection sortira. Vous verrez, tous sont magnifiques et chacun a son style.

Texte et tableau © dominique cozette. Photos © Aventures des Toiles.

Autre rue, autres moeurs… Daguerre.

Cette charmante petite rue parisianissime présente une explosion de petits commerces à touche-touche sur  sa partie piétonne d’environ 500 mètres. Jugez plutôt : Sur près de 50 commerces on compte :

1 poissonnerie gigantesque
3 boucheries plus une rôtisserie-boucherie
2 fromageries hénaurmes
2 boulangeries dont une juste « pains spéciaux »
1 pâtisserie
1 glacier style classe
1 chocolatier belge dont le prénom est Jeff
1 sandwicherie
1 crêperie bretonne forcément
4 commerces de fruits et légumes paradisiaques, cirés chaque matin et arrosés
1 maison de la pâte non italienne, I suppose, sinon ça sera una pasteria
7 traiteurs mirifiques régionaux et exotiques dont 4 font également restauration sur place
1 boutique d’huile d’olive chicos
1 boutique de miel et autres naturalités
2 supermarchés  dont 1 Franprix et le Monoprix d’angle
3 cavistes
3 brasseries cosy blindées

Puis, au rayon non bouffe :
2 opticiens, normaux, comme tous les opticiens
1 bazar ancien mais moderne car ancien
1 boutique de chaussures assez moyenne
1 collanterie !!!
1 parfumerie Nocibé
I coiffeur Biguine
1 boutique vidéo avec plein de DVD récents pas chers
1 bijouterie des familles pas encore entrée dans le giron de LVMH
1 point fleurs, alias petite boutique mignonne et odorante
et 1 pharmacie, faut ce qu’il faut.

Et il manque, et il manque… y a pas quelques chose qui vous manque, vous ? Eh bien moi, il me manque une librairie.
Vous allez me dire qu’il y a une FNAC pas loin, sûrement. J’en sais rien, d’ailleurs. Alors je vais vous rétorquer qu’acheter ses livres dans une FNAC, c’est enrichir monsieur Pinault de PPR. Chacun fait ce qu’il veut de son blé, je le fais aussi, souvent par flemme. Mais une librairie de proximité, moi je trouve que c’est aussi sympa que le clocher d’un village.

Sinon, à l’autre bout de cette foire à la papille, là où les piétons sont assignés au trottoir pour cause de rares voitures, là où est encore the boutique de l’accordéon, se trouve le fief de la formidable artiste qu’est Agnès Varda. Il y a très longtemps, une cinquantaine d’années, elle avait acheté une cour toute pourrie avec une sorte de cabane insalubre. Aujourd’hui, elle a deux immeubles peints en rose (je ne crois pas qu’il lui appartiennent mais sa société de production occupe deux RdC) et, juste en face, une boutique avec toutes les créations de l’artiste, vidéos, livres, DVD, albums, produits dérivés et celles de feu son époux chéri, Jacques Demy.
Je vous parle d’elle parce que j’ai revu « les plages d’Agnès » où elle retrace sa vie de façon très ludique, très créative. Si vous voyez ce DVD, prenez-le, c’est vraiment un grand moment d’amour et de fraîcheur. Ça manque, parfois.

Texte, photo et dessin © dominique cozette

 

Violence conjugale dans ma rue

Non, en fait, pas dans ma rue. Pour changer, j’ai pris le petit chemin qui sent la noisette, où un terrain est laissé en friche pour les fleurs, les papillons, les oiseaux. Des petits immeubles sympas. Quelques personnes qui circulent.
Et soudain, une femme qui hurle. En langue étrangère. Il y a de quoi. Un type l’a attrapée par derrière et l’étrangle. Il relâche, elle lui crie dessus, il la serre, il l’emmerde, il la poursuit. Arrivée à leur hauteur, je lui demande, à la fille, si tout va bien. Le type me lance un regard assassin, un regard qui fait peur. Les gens ralentissent. Le type se rapproche de la fille. La fille me répond : ça va, on s’amuse. Et ils se mettent ensemble, genre complices, et me voilà comme une conne, à m’occuper des affaires des autres.
Quelques secondes plus tard, même cirque : il la brutalise, elle hurle, les gens regardent, ne sachant trop quoi faire. Je parle avec une autre très  jeune femme qui confirme qu’ils ne s’amusent pas. Tant qu’il y a des gens qui circulent, je me dis bon…en restant vigilante.
Le petit chemin débouche sur une rue, je suis en avance sur eux. Elle se remet à hurler, il la serre, ils s’injurient, elle essaie de lui échapper et manque de se faire écraser. Un passant m’interroge, je le mets au courant. Il est OK pour intervenir avec moi. Alors, même jeu. Le type revient vers la fille, lui prend la main et ils disent qu’ils s’amusent.
Alors on leur fait la morale. Je dis qu’un homme n’a pas à brutaliser une femme, qu’une femme n’a pas à hurler dans la rue si c’est juste pour s’amuser. On ne joue pas à ça. Mon comparse ajoute que ça risque de mal tourner et que des gens peuvent appeler la police.
Ils nous écoutent poliment et repartent devant moi en se tenant la main. Le type fait quelques gestes tendres qu’elle fait mine d’apprécier. Il se retourne pour voir si je suis là. Puis arrive une voiture de police qui apparemment les recherche et stoppe à leur niveau. Les flics alignent le type contre un mur. Lui prennent ses papiers. Et puis comme je ne vais rester plantée, je repars.
Pourquoi je vous raconte ça ? Parce que ça me touche. C’est le genre de violence ordinaire que subissent beaucoup de femmes. C’est le type d’homme habité d’une telle rage qu’elles ont peur des représailles et font tout pour qu’il ne soit pas inquiété. Parce qu’elles savent qu’un jour ou l’autre, elles vont le payer. A moins que quelqu’un s’en mêle, je ne sais pas.
C’est banal, c’est courant. C’est intolérable.

Texte et dessin © dominique cozette

Il n’y a pas de fumée sans fric

Un scientifique, Robert Proctor,  vient de sortir un pavé de 750 pages sur l’industrie du tabac, ses scandales, son CA, ses ravages etc… Le livre est remarquable car c’est une étude qui porte sur les « tobacco documents » sortis du secret depuis 1990, soit 13 millions de documents numérisés. Puis épluchés pendant 10 ans. Enorme. Car il met à jour l’énorme complot des puissantes firmes de tabac pour entraver toute mise en garde. On sait depuis 1920 que le tabac est cancérigène. En 53, les dealers de la mort se réunissent pour s’entendre pour ne pas ébruiter l’affaire, qui le sera quand même dix ans plus tard.
Enorme aussi le marché passé grâce au plan Marshall, la fameuse aide à la reconstruction de l’Europe de l’après-guerre, pour rendre accro les Européen, fumeurs de brunes moins nocives parce que plus difficilement inhalables. C’est le sénateur de Virginie, ce bon tabac doux, qui a eu l’idée d’un package où, pour 2 dollars de nourriture, un dollar de tabac était envoyé à l’Europe.
On peaufine la douceur des fumées, on les sucre, on les bidouille pour qu’elles aillent plus vite au plus profond des poumons en accélérant l’addiction. Je ne vous parle du polonium 210 qui, en vingt clopes dans la poche, équivaut à 300 radios thoraciques. Ni du plaisir à fumer qui n’est qu’une pure fabrication marketing contrairement aux drogues ou à l’alcool qui, eux, produisent ivresse ou sensations fortes.
Tout ce qui pourra être tenté pour augmenter l’enrichissement du secteur sera fait. Tout ce qui pourrait éveiller des soupçons de la part des autorités sanitaires, des gouvernements, des fumeurs, sera tu. Beaucoup d’organismes anti-tabac, ou indépendants seront infiltrés ou arrosés. Des experts de l’OMS reconnaissent avoir été roulés dans la farine.
La cigarette est l’invention la plus meurtrière de l’humanité. Elle tue plus que le paludisme, plus que le sida, plus que la guerre, plus que le terrorisme. Et surtout : plus que tous ces éléments réunis. On estime à 100 millions les victimes du XXème siècle. Et peut-être à un milliard pour le siècle actuel (en même temps, on est trop, non ?).
Chaque année, la production de clopes pourrait remplir la pyramide de Khéops et dépose, en se consumant, 60 000 tonnes de goudrons dans nos poumons. Il y a beaucoup d’autres choses à apprendre dans cet article du Monde du 25 février, ici d’où ces infos succinctes  sont tirées. Ça vaut son pesant de mégots.
Une réplique m’avait frappée  dans un film iranien (je crois)  :
– ça ne vous dérange pas si je fume ?
– Non, non,c’est vous que ça dérangera plus tard.
Ah, j’oubliais le titre du bouquin : Golden holocaust (et non pas golden low coast, ou goldo hole low coast)

Texte (d’après le Monde) et peinture © dominique cozette

L’année 65 racontée à mes blecteurs*

En 1965, ça pète de partout ! Ouille-ouille ouille !
Ça pète sur le Viet-Nam, que bombardent allègrement les Etats-Unis, et dans les rues de New-York avec les manifestants contre cette guerre inique. Ça pète entre l’Inde et le Pakistan, ça pète sous le Mont Blanc pour finir d’ouvrir le tunnel, ça pète à Harlem pour ce pauvre Malcolm X, bing, t’es mort ! et aussi à Paris pour ce pauvre Ben Barka, bang, terminé.
Ça pète de joie chez les Françaises qui, tenez-vous bien jeunes femmes d’aujourd’hui ! sont autorisées à ouvrir un compte en banque, à travailler et à gérer leur bien sans que leur mari ait son mot à dire !!! Oui, oui oui ! Même s’il est contre, d’ailleurs : couché, le mari ! Ce qu’essaie de dire Sylvie Vartan au sien, de mari tout juste épousé, qui est plutôt du genre à découcher !
Ça pète sec chez les grenouilles de bénitier qui s’offusquent de ce qu’on autorise la messe en français. Et ça pète pas très haut, niveau commentaires, devant  la mini-jupe qui est de sortie dans la rue. Visionnez les incroyables réactions des réacs de l’époque à la Gaminerie du boulevard Saint Germain, ça vaut son pesant de baffes.
En revanche, ça pète très haut dans l’espace. C’est la guéguerre entre l’est et l’ouest ! Le premier à sortir « dehors » avec son cordon ombilical est le cosmonaute Leonov, suivi trois mois plus tard par l’astronaute White. Nous, en France, on lance un petit truc, une chtite fusette,  j’sais plus quoi.
Sinon et à part ça, de Gaulle est le premier président français élu au suffrage universel, à 55% des votes contre François Mitterrand qui traite sa politique de dictature. Le Royaume Uni suspend la peine de mort pour cinq ans tandis que les minettes se dessinent des cils sous l’œil et des taches de rousseur sur les joues. Trop cute !
Monod et Jacob reçoivent le prix Nobel de médecine et Kodak lance le Super 8 pour les amateurs.
Côté lettres, ça pète le feu du côté d’Hara-Kiri, le journal bête et méchant, qui lance son édition livres avec quatre auteurs-phares : Cavanna, Wolinski, Gébé et Topor. Sortent aussi, outre les K. Dick, Calvino, Updike attendus, la Chamade de Sagan et l’immarcescible succès de Perec : Les Choses (que je vous conseille de relire).
La plus grosse panne d’électricité des temps frappe 30 millions de personnes à New-York dont 800 000 bloquées dans le métro. Combien de bébés neuf mois après ?Je pose la question.
Nous, on a l’EDF qui alimente nos télés et on se régale avec une émission iconoclaste, Dim Dam Dom, et quelques feuilletons pas piqués des vers : Belphégor avec Juliette Gréco, Belle et Sébastien — non, ce n’est pas un groupe mais une fille et son chien — Max la Menace ou comment téléphoner de sa chaussure quand le mobile n’existe pas, et les Saintes Chéries ou les premiers pas de madame la Bourge qui veut s’émanciper des clichés qui l’étouffent (femme au volant, mort au tournant, ce genre).
Le film français pète la forme avec d’inoubliables succès  defunesques tels le corniaud et le gendarme à New-York .
New-York où B.B. qui n’a jamais pété plus haut que son beau cul parce qu’elle n’en avait pas besoin, débarque avec le succès que l’on sait pour la promo de Viva Maria. New-York encore qui offre  deux James Bond pour le prix de deux :  Goldfinger et Opération Tonnerre. Mais en France, on n’est pas de reste avec deux Godard : Alphaville et Pierrot-qu’est-ce que j’peux faire – Le-Fou. Les palmes azuréennes vont à Richard Lester avec « le knack… et comment l’avoir ». Très dans le vent !
Une grande dame se la pète mais elle a bien raison avec « seulement » quatre pièces de théâtre dans la même année, et dans les plus belles salles de Paris : Marguerite Duras !
Ça pète encore plus fort dans les baffles avec Satisfaction (Stones) Vs Help (Beatles). La Reine, sensible à leur image propre sur soi, décore les quatre chevelus à cravate. A part ça, c’est l’explosion des groupes anglo-saxons que nous connaissons tous : The Doors, Loving Spoonful, Herman Hermit, Kingsmen… Un ovni : James Brown avec son père qui arbore son  brand new bag, enfin qui montre plutôt comme il est loin d’être ringue car il connaît toutes les danses de ses morveux de kids.
Tandis que nous en France, on a Capri c’est fini et Aline pour qu’elle revienne, et même si tu revenais, de l’Egyptien blondinet à ressorts, le folkore américain de miss-aux-couettes, les mains sur tes hanches du gendre idéal italo-belge, l’amitié — pour remonter le niveau —  de la belle grande tige dont Dylan et Jagger sont amoureux, mais aussi l’immense succès de la Petite gainsbourrette, poupée de cire. Mais hélas, hélas, hélas, on subit pour la première fois la fausse Piaf à la coupe au bol qui vient de remporter le crochet à la télé, sans imaginer que c’est elle qui nous fera entrer, quarante deux ans plus tard et de façon calamiteuse, dans la beaufitude sarkozienne et sa constellation de bouffons (je m’égare) !
En 65, il y aura des naissance : Emmanuelle Béart, Philippe Torréton, Step de Monac, Beigbeder, Bjök, Rachida Dati, Barouin. Ah, j’allais oublier le plus important : Pascal Obispo !
Sont partis en 65 le bon docteur Schweitzer pour qui minuit  sonna au clocher de Lambaréré. Mais aussi Winston Churchill, Nat King Cole, Somerset Maughan, le Corbusier et Stan Laurel.
Quant à moi, hé bien, les garçons, les chansons, le bac, la fac et … aucune conscience politique. T’façon, j’étais mineure !

Pour voir ou revoir les années précédentes : L’année 64 ici

Texte © dominique cozette / Photo © pour M.A.T, toutes dans une caisse et hop ! (pull Mayfair si ça dit quelque chose à quelqu’un)

* Blecteurs = lecteurs de mon blog

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