J’avais adoré un livre de Nathalie Léger sur Barbara Loden, Supplément à la vie de Barbara Loden, ex-femme de Kazan, tellement écrasée par lui qu’elle avait fait un film (devenu culte) totalement déprimant et magnifique sur la fuite d’une femme qui n’en peut plus. (mon article ici, qui m’a donné vraiment envie de le relire). Nathalie Léger écrit sur les femmes, surtout celles qui s’en sortent mal. Ici, dans La robe blanche, il est d’abord question d’une plasticienne italienne de 33 ans, Pipa Bacca, qui a entrepris une performance originale : porter la paix dans les pays qui avaient connu la guerre, en se vêtant d’une robe de mariage et en partant en stop. Accueillie avec bienveillance par les chauffeurs et dans ses étapes, elle finira violée, assassinée et nue dans le fossé d’un petit bled d’Istambul, trois semaine plus tard (La façon dont s’est comporté l’assassin très vite retrouvé est hallucinante !)
Ce qu’évoque Nathalie Léger, c’est la symbolique de la robe de mariée, l’attente très souvent déçue des femmes lorsqu’elles la portent. D’ailleurs, je ne l’ai pas compris tout de suite, mais la mère de l’autrice à qui elle a raconté son projet de livre, et chez qui elle demeure, fait une demande expresse à sa fille : profiter de ce récit de robe blanche pour y raconter son expérience, la sale expérience de son mariage. Elle ressort d’ailleurs la robe et l’enfile pour la convaincre. Effectivement, le jour du mariage, le futur mari lui annonce que c’est pas elle qu’il aime mais une femme mariée. C’est un joueur, un irresponsable qui laisse femme et enfants croupir dans la merde alors qu’il s’amuse ailleurs. Puis il décide de la quitter et réussit à gagner le procès du divorce en ayant convaincu tous les amis et même les cousins de sa femme de plaider contre elle, femme et mère plutôt exemplaire, d’où une humiliation non digérée.
Pour appuyer cette thématique, Nathalie Léger cite et décrit de multiples œuvres d’artistes concernant la robe blanche, le mariage parmi lesquelles Marina Abramovic, Marie-Ange Guilleminot, Niki de Saint-Phalle, Jana Sterbak…
Belle réflexion d’une romancière qui écrit court mais extrêmement dense et délicat.
La robe blanche de Nathalie Léger 2018 chez P.O.L. 140 pages, 16 €
Tiens ferme ta couronne, drôle de titre pour ce livre hypnotique de Yannick Haenel. Moi qui n’aime que les histoires concrètes et plutôt réalistes, je suis tombée dans une sorte de fascination pour cette histoire époustouflante d’un héros tout ce qu’il y a d’ordinaire. Imaginez : un quinquagénaire qui s’abrutit devant des films de Cimino, notamment le voyage au bout de l’enfer (the deer hunter) en se saoulant de vodka sans pratiquement sortir de son studio. Parfois, il s’occupe du dalmatien du voisin, un joueur de poker invétéré, qu’il n’a pas vu depuis des jours, présentement. Ce reclus fumeur et asocial, Jean, a écrit un pavé sur Melville, the Great Melville, un scénario impossible à mettre en images mais dont il espère que Cimino saura le faire. Il rencontre une sorte de personnage improbable qui lui donne le numéro du réalisateur. Jean n’y croit pas. Il appelle malgré tout et tombe sur … Cimino, ravi d’avoir un admirateur et amateur de Melville, comme lui. Jean embarque alors pour New-York et vit une drôle d’aventure avec le réalisateur. Quelques mois plus tard, l’intermédiaire le recontacte pour savoir où ça en est, lui donne rendez-vous chez Bofinger (grande brasserie à la Bastille) et là, ils se saoulent et invitent Isabelle Huppert à leur table (elle connaît le type). S’ensuit le récit de Jean entrecroisé de celui d’Huppert qui a joué dans un Cimino en 79, etc…
C’est absolument insensé la façon que l’auteur a de raconter une histoire aussi bancale à base de cerfs, de daims, de chien perdu, de dette de jeu, de poursuite de mots, de quête d’une vérité sacrée. Sans parler d’une nuit passée au Musée de la Chasse et de la Nature avec des tas d’animaux et la directrice du lieu, femme très ouverte… Le lendemain, Jean se retrouve dans une mélasse absolue mais on a tellement envie de savoir ce qu’il va devenir. C’est totalement rocambolesque et captivant et d’une grande culture cinéma et littérature.
Tiens ferme ta couronne de Yannick Haenel, prix Médicis 2017 aux éditions Gallimard et Folio. 360 pages.
L’actu est très variée cette semaine 14, un vrai fourre-z-y-tout de nouvelles pas toujours réjouissantes. Côté femmes, une grande Agnès qui nous quitte sans avoir oublié de nous dire adieu, une Loiseau qui s’envole de ses petites ailes zélées vers un destin tintin des clopinettes pour l’écolo, une Blanche qui refuse une médaille en chocolat pas très reluisante, une Theresa qui May or May not on ne sait pas trop, une porte-parole Sibeth qu’elle mentirait, et Geneviève Legay qui s’en est bien pris une par un triste sire casqué. Côté hommes, un Ghosn de nouveau gone into the jail, un Bouteklika bouté, un Castaner très casse-toi-en-mer-migrant, un Sarkozy back to the Fouquet’s en grandes talonnettes, un Ramadan bien arrosé par le Qatar, voilà, voilà. Bon vouikende, amigas/gos !
– MG : Le gilet jaune plie mais ne rond-point.
– MK : « J’ai bousculé un flic », le nouveau tube qui cartonne de Geneviève Legay !
– CV : Varda est morte, c’est triste. Elle a fait des choses bien, et des choses à Demy, ne l’oublions pas.
– JB : En réponse aux différentes plaintes de la communauté vegan, le traditionnel poisson d’avril sera désormais une quiche végétale d’avril au tofu et brocolis.
– CC : c’était agaçant ce grand soleil ce weekend, t’avais envie de mettre une petite robe d’été alors que t’avais encore ton cul d’hiver
– AL : Le premier avril, c’est le seul jour où les gens vérifient une info avant de la croire.
– JB : Le saviez-vous ? À Levallois-Perret la tradition le 1er avril n’est pas d’avoir des poissons dans le dos, mais des casseroles au cul.
– MK : Et toi, fais gaffe ! Si tu mens tu peux finir porte-parole du gouvernement
– OM : En même temps faut être lucide, ce qui aurait été un bon poisson d’avril c’est qu’Emmanuel Macron nomme un porte-parole qui ne ment pas.
– CB : Aujourd’hui j’ai choqué mes élèves en leur apprenant, au détour d’une conversation, que je faisais le ménage et le repassage chez moi. J’ai dû expliquer à des 6e que, biologiquement, un pénis n’empêche pas d’entrer dans une cuisine.
– NP : — Ça a quand même dû lui faire un choc à Bouteflika. — De démissionner ? — Non, d’apprendre qu’il était président de l’Algérie.
– ES : Mort de Jean-Claude Mas, le fondateur des prothèses mammaires PIP. Il s’en est allé rejoindre les seins martyrs.
– OK : Décidément, le japexit de Carlos Ghosn n’en fini pas.
– AB : a) L’enquête PanamaPapers a permis à la France de récupérer 120 millions. b) Le montant global de la fraude fiscale serait de 100 milliards. c) OuateZeFeuque
– OM : Ce qui est quand même drôlement étonnant dans l’histoire avec Blanche Gardin c’est que Macron invite une humoriste alors qu’il a déjà Castaner et Schiappa à la maison…
– SI : Bouteflika a remis sa démission et sera exposé des la semaine prochaine à la Grande halle de la Villette , venez nombreux
– AN : Blanche Gardin est plus convaincante en un post et une décision que huit partis d’opposition réunis
– AB : Je ne connaissais pas Blanche Gardin ; bravo, elle a les « couilles » que Macron n’a pas. Je soutiens sa nomination comme ministresse du Parler Juste
– MK : Carlos Ghosn n’est plus résident fiscal français depuis 2002 mais appelle la France et son pote Macron au secours pour le sortir des griffes d’une justice nippone ni mauvaise. Etonnant, non ?
– AB : Arrosé de dollars par le Qatar, le douteux Tariq Ramadan rendra-t-il le produit de la quête en sa faveur aux niais qui le prennent pour un humble érudit ?
– OVH: L’émission politique. Les élèves de maternelle petite section de l’école européenne ont eu le droit de venir avec leur doudou.
– YB : Theresa May fière d’avoir mené à bien le Bouteflikaxit
– NP : « Si on sortait de l’Europe on aurait des milliards à réinvestir pour nos vieux et nos malades »… C’est marrant c’était un des arguments des pro-Brexit. Juste avant qu’ils reconnaissent que c’était un mensonge.
– CC : Running gag : Nicolas Sarkozy au conseil d’administration du groupe Barrière, leader des casinos français et propriétaire du Fouquet’s. Rien ne va plus !
– OVH : Nico va-t-il être obligé de reconnaître lui aussi l’enfant de Rachida Dati ?
– ES : Tous les journalistes virés pour harcèlement sexuel devraient se regrouper et créer un nouveau média destiné à assouvir leurs fantasmes : France Nymphos.
– PE : Est-ce que Geneviève de Fontenay aura droit à une retraite chapeau?
– GB : Bonsoir Vous vous endormez dans pays où le Ministre de l’Intérieur s’entend avec son homologue italien fasciste pour rendre des ONG complices de morts de migrants en mer avant d’aller livrer des bateaux aux autorités qui les torturent entre 2 shots de vodka. Bonne nuit quand même.
– GB : Loiseau qui fait la leçon sur les pesticides et conservateurs 3 semaines après que la majorité a repoussé leur interdiction en France. Ça part sur de bonnes bases.
– AB : Ce qu’on veut : • Le beurre, l’argent du beurre, le cul d’la crémière, le bébé et l’eau du bain. Ce qu’on aura : • L’eau du bain. #ActeXXI
– GV : Mon fils vient de demander spontanément une éponge pour nettoyer la table du repas, j’ai paniqué, je l’ai lancé par la fenêtre.
– CC : Dans les pays riches, tu gagnes des élections en agitant la peur de voir arriver des gens pauvres.
Chloé Delaume vient de sortir un petit livre, Mes bien chères sœurs — sous-titré « Désolée ça sent le fauve, il est temps d’aérer » — faisant l’état des lieux sur la place de la femme dans la société, la suprématie toujours évidente de l’homme et la quatrième vague du féministe qui se porte un peu mieux depuis les réseaux sociaux et les hashtags. « Internet a libéré la femme là où Moulinex a échoué ». C’est un livre fait de paragraphes souvent indépendants, d’une virtuosité littéraire assez étonnante, avec des tas de raccourcis et de formules hilarantes ou simplement créatives.
Elle remet au goût du jour un terme totalement oublié : l’uxoricide , qui désigne le meurtre de l’épouse par son mari. Assez de qualifier ça autrement, ce terme dit tout, déjà que c’est un meurtre (et non pas un drame passionnel ou autre dérivé). Elle sait de quoi elle parle : son père a assassiné sa mère avant de se suicider.
Pourquoi ce livre ? Pour tenter de (re)créer une société de femmes bienveillantes entre elles pouvant former masse face à la masse des « couillidés » du patriarcat qui imposent leurs lois, leur suprématie, qui s’approprient l’espace, la parole, les médias. Donc on arrête, les filles, de se tirer la bourre pour être l’unique élue dans un groupe masculin, c’est le syndrome de la Schtroumphette qui a peur qu’une autre lui ravisse la place. On arrête de dire les mots blessants quand ils arrivent genre connasse, pétasse etc… On applique bien la féminisation des métiers car — elle le dit et le répète — ce qui n’est pas nommé n’existe pas.
Pour autant, elle ne prône pas l’extinction des mâles, il y en a des très bien, mais celle de la hiérarchie et du plafond de verre. L’idéal serait l’horizontalité des rapports humains. Et voici une trouvaille sympa si ça marchait, si ça se répandait : dès que quelqu’un fait une remarque sexiste ou une blague grasse, dire « badaboum » simplement plutôt que de râler et d’entamer une polémique.
Ce livre qui n’est pas un manifeste ni un manuel est très plaisant car plein de bon sens, de piques, d’observations intéressantes. On peut picorer dedans n’importe comment.
Excellente interview d’elle dans Par les temps qui courent (lien ici).
Mes bien chères sœurs par Chloé Delaume, 2019 aux éditions de Seuil. 124 p. 13,50 €
Sophie des Déserts, quel joli nom, a écrit la bio de jean d’Ormesson avec lui et jusqu’à sa mort, même après en interviewant des proches dont sa femme et sa maîtresse institutionnalisée. Elle nous conte dans Le dernier roi soleil la vie, enfin une toute petite partie d’icelle de ce prince de la lumière joyeux, galant, tendre, charmant, ne médisant jamais, gardant ses problèmes dont les gros de santé par devers lui. Elle fut, cette vie, semée de pétales de roses et de tapis rouges, de jeunes filles en fleurs, de dames énamourées, de courtisans, de haies d’honneur, d’opportunités toutes de velours.
Le monde dans lequel il a vécu n’a rien de commun avec le monde. Petit lutin gourmand, il jouissait de tout et tout le faisait jouir. Il s’est fait inviter par tous les présidents, il était ami de tout le petit et grand monde de l’édition et des écrivains, il ne fréquentait que les beaux lieux, les belles gens et les nice people. Sa femme, raide et stricte, a tout de suite accepté ses frasques jusqu’à cet insondable amour pour une deuxième femme comme une autre épouse qui ont fini par cohabiter. Sans parler des autres. Jusqu’au bout, à l’hosto, les petites soignantes qu’il draguait goulûment. Sa fortune de famille plus celle de sa femme, fille Beguin, lui ont permis tous les luxes possibles et imaginables. Il est allé dans les plus beaux endroits du monde, a goûté aux meilleurs restaurants, a habité les plus beaux palaces et les plus belles demeures. Et châteaux. Casse-cou et prêt à tout, il a skié sur le tard mais jusqu’au bout, nagé jusqu’au bout, a même, sur la fin, joué sur les planches et fait du cinéma. Les jeunes l’adoraient qui lui envoyaient des tombereaux de lettres d’amour ou d’admiration. Et, généreux, il en a offert des déjeuner luxueux, des voyages, des moments, des fleurs, des pleurs parfois, des compliments !
Jean d’O c’est comme Edward Hopper : tout le monde l’aime ! Personne pour le détester. Son charme opère partout, principalement à la télé où il su nous émerveiller par son humour, nous hypnotiser par son regard, nous bluffer par sa culture. Ah, la belle vie !
Un livre qui donne la pêche même s’il nous montre combien on a raté le coche avec nos petites vies moyennes. La sienne, de toute façon, était unique et tellement bien remplie !
Le dernier roi soleil par Sophie des Déserts aux éditions Fayard/Grasset (c’est expliqué pourquoi dans le livre). 290 pages, 20 €
1/ Dit-on : de Hénin ou d’Hénin. Dois-je aspirer le h ou non ?
2/ Hénin Liétard est le nom de l’auteur Marcher sur les bas-côtés est le titre de l’ouvrage dont il n’est pas spécifié si c’est une bio. Je pense que oui. Hénin Liétard a connu une forme de célébrité en écrivant (éructant ?) dans Hara-Kiri puis Fluide Glacial. Il jouit d’une écriture pas piquée des hannetons, entre argot de bistroquet, sabir perso et patois eud’là-haut, les terrils où il passait son temps. Il a mieux connu, pour s’y être frotté, le noir des mineurs que celui de Soulages, et son ADN de fils de gueule noire est peut-être pour quelque chose dans sa tubardise qui l’a envoyé plusieurs années en sana. Lui, il est bien partout mais faut pas trop qu’on le fasse chier. Après des études (élémentaires) complètement merdouillées, on le pistonne pour des petits boulots pourris, mais vraiment. Où on le bizute méchamment. Il change de cap, enfin le cap est étroitissime, et on le retrouve au seuil de sa vie de jeune adulte à relever des compteurs EDF avec une peau de vache. Là encore, humiliations et le reste. Heureusement, le type part vite à la retraite, remplacé par le plus cool des fonctionnaires qui lui enseigne l’art de ne rien glander, du moins le minimum pour ne pas se faire virer. Le reste du temps se passe au bistro. Enfin, on le lâche seul relever les compteurs de ces messieurs-dames des corons, les sans grades bien sympas, aux pourboires généreux. Un jour, vla t-y pas que quatre grosses vieilles en mal de rut le prennent en sandwich et lui font son affaire !
Comme vous l’avez compris , c’est un récit truculent, hilarant, au langage bien fleuri et à la verve bien inspirée qui plaira aux amateurs du genre. Comme moi.
Marcher sur les bas-côtés par Hénin Liétard aux éditions du Dilettante 2019. 256 pages, 18 €.
Adieu petit bout de femme
petite tête de moine
au talent merveilleux
fée des émulsions
créatrice sans pareille
avez-vous vu ses Plages
toujours le petit sourire
des fabricants de bonheur
sa valeur number one
quelle patate elle avait
parfois en forme de coeur
glanant dans l’air du temps
les tronches les trognes
les visages des villages
les paysans des paysages
sans feux ni lieux ni foi ni loi
mais une bonne dose d’humanité
voyez la débouler tout là-haut
irradiant de lumière des projos
comme un petit lutin taquin
une joyeuse petite déesse
adieu Agnès
bienvenue au paradis
La semaine dernière, je me plaignais qu’il n’y eût pas plus de femmes dans notre chère actu, cette semaine je pourrais me plaindre de leur présence tellement désolante : la pacifique Geneviève L. bousculée grave par un flic et la non moins pacifique Agnès V. renversée par la faucheuse, alors que personne ne leur voulait de mal. Heureusement que notre président est un bon moraliste qui nous enseigne la sagesse, appuyé par la venue du grand sage chinois Xi machin qui lui, ne rigole pas avec les doigts de l’homme sur le pli du pantalon. Et puis la routine Gilets Jaunes, Brexit et élections européennes à l’aune d’un changement d’heure qui n’affecte en rien le sommeil de Touthankamon, les réservations du Fouquets et le bris des radars…
– AB : Afin d’éviter toute controverse ou récupération, pour l’Acte XX, les manifestants seront assommés par un huissier assermenté.
– JS : Je pense que si un branleur de 40 ans demandait à ma grand-mère d’être sage, elle lui dirait très poliment d’aller se faire cuire le cul.
– FC : Formidable Castaner ! Quand tout se passe bien, c’est de sa responsabilité, quand c’est une catastrophe, c’est celle du préfet!
– DC : Le président a dit que quand on était une femme fragile, la sagesse dictait de ne pas se trouver sous une charge policière. Le président, en plus de faire preuve de bon sens, possède un sens de l’humour débridé.
– PR : Suppression des droits civiques pour les plus de 70 ans. Processing…
– MK : Avec En Marche, la liste des Européennes ressemble à l’étal de la Foirfouille un jour de soldes
– AB : Vous n’êtes pas sans ignorer, donc vous savez à quel point je suis snob : ce soir, malgré la fermeture, nous dînerons au Fouquets pour déguster ses fameux rognons Sarkozy flambés à la Black Bloc
– NP : Faudra quand même qu’on m’explique le processus mental des gens qui passent leur temps à gueuler que Macron est un dictateur mais approuvent à 50% ou plus la nomination « temporaire » d’un militaire à la tête du pays en cas de vague d’attentats…
– PE : Leçon du jour : Varda, qui était sa moitié, rejoint Demy.
– ES : Macron reçoit le dirigeant chinois : enfin un Xi laid jaune à l’Elysée !
– PJ : Je ne ferai pas de mauvaise plaisanterie sur le fait que LREM ait choisi Loiseau pour conduire sa liste aux Européennes, ça ne volerait pas haut.
– OM : Je m’apprêtais à lire du Platon pour gagner en sagesse mais je crois que je vais plutôt aller me faire marcher sur la gueule par des CRS, ce sera plus efficace.
– RP : Agnès Varda nous a quittés. J’ai toujours voulu voir « Cléo de 5 à 7 » mais j’ai jamais pu, c’était mes heures de boulot.
– RR : Tous ces intellos qui critiquent Bouteflika et qui vont payer 15 € pour s’extasier devant Toutankhamon…
– ES : Avec sa sagesse à deux balles, Macron est plus proche du confusionnisme que du confucianisme.
– VS : Les types t’expliquent qu’il faut instaurer une taxe écologique tout en vendant 300 Airbus à la Chine. Et personne ne relève.
– SC : J’apprécierais que la bourgeoisie cesse d’utiliser le terme « prise d’otage » quand un mouvement social l’empêche de faire du shopping un jour par semaine.
– CC : Quand tu penses que même pour la réforme du changement d’heure, l’Europe donne jusqu’à 2021 voire plus aux états pour s’accorder sur l’heure d’été ou l’heure d’hiver. J’ai parfois l’impression d’être coincée dans la chanson de Brel « les Vieux » avec le klonk de l’horloge…
– CC : Je découvre une nouvelle position inédite du kama-sutra, certes un peu rude : le prélèvement à la source.- ES : Inauguration des Galeries Lafayette sur les Champs Elysées : mon conseil, attendez samedi, ils vont casser les prix.
– HT : La mortalité sur les routes en forte hausse : Doit-on saluer la meilleure régulation de l’espèce rendue possible par la destruction des radars ?
– ES : Canfin abandonne le WWF France et rejoint la liste En Marche : « Il était temps pour mois de briguer un nouveau panda ! »
– DS : J’ai éjecté d’un coup de pied la petite-vieille qui voulait monter dans le bus surpeuplé en lui gueulant « Quand on est fragile, on ne se met pas dans des situations comme celle-ci, pour avoir la quiétude, il faut avoir un comportement responsable ». Tout le monde a applaudi.
– NA : J’ai renversé une vieille qui traversait en dehors des passages. Son déambulateur a rayé mon pare-choc. Je crois que je vais porter plainte pour dégradation de bien privé.
– ES : Hé lé ga aujourdui cé l’acte vin alors on s’en pren aux boutiques Nicolas symbole de l’oligarchie qui nous saoule. Faite tourné
– PE : La Fédération Nationale des Coiffeurs est triste de vous annoncer le décès d’Agnès Varda qui aura beaucoup œuvré pour la promotion du bi-colorisme capillaire.
– AB : Cher George Clooney, boycotter les palaces du moyenâgeux sultan de Brunei, d’accord, mais qui peut se payer le luxe de ne pas y dormir ?
– GD : C’est fou. Après trois ans de suspense, nous sommes à quelques minutes de voir les Britanniques ne pas du tout quitter l’Union européenne !
– PI : — Ce week-end on change d’heure on va dormir une heure de moins. — Tu devrais te réjouir, t’auras une heure de plus pour dire ce genre de conneries.
C’est Luc Chomarat qui m’a tant séduite avec « un petit chef d’œuvre de littérature » (voir ici). Autant ce dernier était surréaliste et au second degré, autant Le polar de l’été est juste un roman. Mais un roman un peu polar extrêmement distrayant, léger, qui amène de nombreux sourires sur le visage. C’est l’histoire un mec dans la petite quarantaine, père de plusieurs enfants de femmes différentes, frustré de vacances au bord de la mer dont son père le privait car il détestait ça. Alors il se rattrape, il se trouve à la mer avec tous les gosses recomposés, sa splendide femme qui ne goûte pas ses formes d’humour plus une superbe jeune fille au pair, cherchant désespérément le sujet de son prochain livre. Quand bim ! il a une vision en un éclair : il va pomper un livre que possédait feu son père, très grand lecteur, dont il ne connaît pas le contenu mais dont la couverture, paysage de mer, le faisait rêver. Il va forcément le retrouver chez sa mère qui vit à pétaouchnock et qui garde tout. Il y va, celle-ci est tombée, s’est fait mal, et du coup, son frère, chiant, hippy attardé et sosie de Demis Roussos est venu aussi. Hélas ! Sa mère lors d’une soirée littéraire, a filé plein de livres à des voisins, le curé etc… Et bien sûr, le livre tant convoité, dont on ne trouve même pas la trace sur le net, n’est plus là. Va-t-il le retrouver et devenir un romancier winer, riche, entouré de belles filles ?
Le polar de l’été par Luc Chomarat, 2017, aux Points. 208 pages, 6,50 €
… avec la toute jeune Françoise Sagan et sa sœur, invitées par Tennesse Williams et son compagnon Frank Merlo qui héberge aussi leur grande amie Carson McCullers, la toute brisée écrivaine culte de 38 ans seulement. Jours brûlants à Key West de Brigitte Kernel se situe en 55. Sagan qui a 19 ans est exténuée par sa tournée de promo américaine pour Bonjour tristesse, Tennesse peaufine sa Chatte sur un toit brûlant face à Carson qui tape des pages et des pages, de conserve avec lui. Il y fait une chaleur torride, insupportable, qui assèche même les cactus, rien n’est agréable à faire à part boire, boire, boire et discuter dans le jardin. L’eau de la piscine est polluée à cause d’un oiseau mort mais impossible d’avoir le technicien. Aller à la plage toute proche est tout une affaire surtout que Carson ne peut plus marcher. N’empêche, on rit beaucoup, on joue à l’insouciance car on a du talent, on crée parfois des petits scandales, on côtoie ceux qu’il faut côtoyer pour être dans les potins, on déguste de bons gros poissons tout frais pêchés par le beau captain du port voisin… C’est le paradis. S’il n’y avait cette foutue canicule.
Mais aussi ces foutues attirances, ces envies, ces regards, ces tentatives de séduction, ces frustration de ne plus être le centre d’intérêt depuis que Françoise est là, qui attire et attise les désirs. Chacun pense que l’autre est totalement amoureux d’elle ou qu’elle est amoureuse de lui/elle, en dépit de toute préférence sexuelle. Le duel amoureux a surtout lieu entre Carson et Frank qui souffrent d’être plus ou moins délaissés par Tenn en faveur de la jeune femme.
L’intérêt supplémentaire de ces histoires d’ego et de cœur envoûtantes et sensuelles réside dans le fait qu’elles nous sont contées par Frank Merlo lui-même, huit ans plus tard, mourant, plaqué par Tenn depuis ces vacances et se consumant encore d’amour pour lui. Et elle. Il a choisi de raconter ce douloureux épisode à une éditrice française, lui demandant de remettre le livre fini à Tennessee et à Françoise Sagan. Ce style de narration ajoute du piment car Frank ne veut pas tout dire, il veut garder des secrets, mais si près de disparaître, il va peut-être les livrer à la Française venue de Paris pour l’écouter et l’accompagner dans ses derniers moments.
C’est passionnant de voir comment vécurent ces monstres sacrés, surtout lorsque c’est détaillé avec une telle finesse, un tel réalisme qui m’ont ressentir cette maudite chaleur jusque dans la fraîcheur de mes draps. En exergue du livre : « Cette histoire est vraie sauf tout ce que j’ai inventé ».
Jours brûlants à Key West, de Brigitte Kernel. 2018 aux Editions Flammarion et J’ai Lu : 250 pages, 7,10 €.