J’avais adoré un livre de Nathalie Léger sur Barbara Loden, Supplément à la vie de Barbara Loden, ex-femme de Kazan, tellement écrasée par lui qu’elle avait fait un film (devenu culte) totalement déprimant et magnifique sur la fuite d’une femme qui n’en peut plus. (mon article ici, qui m’a donné vraiment envie de le relire). Nathalie Léger écrit sur les femmes, surtout celles qui s’en sortent mal. Ici, dans La robe blanche, il est d’abord question d’une plasticienne italienne de 33 ans, Pipa Bacca, qui a entrepris une performance originale : porter la paix dans les pays qui avaient connu la guerre, en se vêtant d’une robe de mariage et en partant en stop. Accueillie avec bienveillance par les chauffeurs et dans ses étapes, elle finira violée, assassinée et nue dans le fossé d’un petit bled d’Istambul, trois semaine plus tard (La façon dont s’est comporté l’assassin très vite retrouvé est hallucinante !)
Ce qu’évoque Nathalie Léger, c’est la symbolique de la robe de mariée, l’attente très souvent déçue des femmes lorsqu’elles la portent. D’ailleurs, je ne l’ai pas compris tout de suite, mais la mère de l’autrice à qui elle a raconté son projet de livre, et chez qui elle demeure, fait une demande expresse à sa fille : profiter de ce récit de robe blanche pour y raconter son expérience, la sale expérience de son mariage. Elle ressort d’ailleurs la robe et l’enfile pour la convaincre. Effectivement, le jour du mariage, le futur mari lui annonce que c’est pas elle qu’il aime mais une femme mariée. C’est un joueur, un irresponsable qui laisse femme et enfants croupir dans la merde alors qu’il s’amuse ailleurs. Puis il décide de la quitter et réussit à gagner le procès du divorce en ayant convaincu tous les amis et même les cousins de sa femme de plaider contre elle, femme et mère plutôt exemplaire, d’où une humiliation non digérée.
Pour appuyer cette thématique, Nathalie Léger cite et décrit de multiples œuvres d’artistes concernant la robe blanche, le mariage parmi lesquelles Marina Abramovic, Marie-Ange Guilleminot, Niki de Saint-Phalle, Jana Sterbak…
Belle réflexion d’une romancière qui écrit court mais extrêmement dense et délicat.
La robe blanche de Nathalie Léger 2018 chez P.O.L. 140 pages, 16 €
texte © dominique cozette