Les Papesses d’Avignon, c’est d’enfer !

L’exposition les Papesses à Avignon, c’est du lourd. Cinq artistes « papesses » en hommage à Jeanne, la seule femme pape, morte en couches avec son bébé pour ne pas se faire choper. Il faut bien donner un titre aux expos, d’autant que celle-ci investit le Palais des Papes — pour de monumentales oeuvres — en plus de la confortable galerie Lambert.
Ces cinq monstres de la création sont Camille Claudel, Louise Bourgeois, Kiki Smith, Berlinde de Bruyckere et Jana Sterbak.
Dès l’entrée, j’ai  été scotchée par le travail, répugnant pour certains, admirable pour d’autres dont moi, de Berlinde de Bruyckere, sculptrice flamande née en 1964, présente pour la seconde fois cette année à la biennale de Venise. Les pièces exposées ici sont principalement faites de chair, d’os et de sang, je veux dire de cire tellement bien travaillée qu’on dirait de vrais parties humaines ou animales. Sidérant.

La souffrance, la mort, les assemblages fusionnels, les mutilations, les inventions de monstres sont une résurgence de son éducation bien-pensante mêlée à l’ambiance morbide de la boucherie familiale. La mythologie l’a beaucoup inspirée, de légendaires cerfs aux bois fantastiques ont façonné son inspiration.

Le plus impressionnant est ce cheval monstre, gigantesque, dérangeant, vraie peau, fausse anatomie, pendu comme à un croc de boucher sous l’immense hauteur de plafond du Palais des Papes

Et entre autres nombreuses autres sculptures de Berlinde de Bruyckere, voici Caroline aux cheveux en crin de cheval, et « cousu ensemble » :

Passons à l’inénarrable Louise Bourgeois dont certaines oeuvres sont  tellement connues, comme les araignées, que je ne les ai pas photographiées. Ainsi que ses installations, vastes, qui ne rendent pas bien comme on dit. Voici donc quelques dessins et peintures que j’aime beaucoup, qui traitent de la conception et de maternité. Il faut voir aussi le film  où elle exprimait son féminisme : c’est très très drôle ! Sacrée nana !

Pour les mêmes raisons, j’ai fait l’impasse sur la délicate Camille Claudel. Je vous offre quand même cette oeuvre superbe et une lettre écrite de sa main où elle avoue aimer le saucisson. C’est touchant, d’autant que ses missives n’étaient jamais envoyées à son frère Paul, interdiction  de leur mère, et étaient conservées dans son épais dossier médical visible ici pour ceux/celles que les documents passionnent. C’est passionnant…

Une papesse que je ne connaissais pas : Kiki Smith, grande figure de la mouvance féministe américaine à la fin du siècle dernier.  Elle a réalisé dans cette expo beaucoup de couronnes, oui, des couronnes de rois, avec des étoiles, qui m’ont laissée de marbre. Mais j’ai énormément apprécié ses magnifiques tableaux, dessins sur papier népalais,  bronzes et quelques sculptures.


Pour finir, voici Jana Sterbak, mais si, c’est elle qui a inventé la robe en viande, portée par Lady Gaga (je ne parle pas de Liliane Bettencourt). Elle n’arrête pas de créer de drôle de vêtements étonnants. Entre autres, une robe électrique qui irradie lorsqu’on s’en approche (imphotographiable), un petit haut avec toison virile incrustée, une chemise de nuit en organdi avec le même motif, et, idéal pour les soirées qui s’éternisent, des chaises au siège et au dossier de glace qui fondent en quelques heures en ne laissant que leur ruine… Elle fait aussi beaucoup de boules, de très belles et très grosses boules, mais les boules, bon, hein…

Pour en savoir plus, allez sur le site des Papesses. Ou direct à Avignon, c’est à 5 mn de la gare, et il y a un petit resto de tapas très miam : Tapas locas, 15 rue Galante, 7/7 de midi à 1 h. du mat’. N’y venez pas de ma part, j’y vais incognito…

Texte © dominique cozette

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Chiharu Shiota serait-elle l’épouse nippone de Spiderman ?

Encore une artiste incroyable ! Imaginez une immense pièce habitée d’une sorte de toile d’araignée gigantesque finement réalisée et impénétrable. Deux lampes placées pendant le « tressage » figurent un double coeur qui bat. Cette installation a nécessité une centaine de pelotes de laine noire et trois jours pleins à deux personnes, l’artiste et son assistant. C’est impressionnant de technicité, vous pouvez d’ailleurs voir la video ici.
Et quand c’est fini, vous demanderez-vous peut-être comme je l’ai fait ? Hé bien on détruit tout, voilà. Et si une institution ou un collectionneur a acheté l’oeuvre, elle sera entièrement refaite selon la géographie de l’endroit.
Pour ceux et celles qui, comme moi, sont abasourdis par le long travail de persévérance que représentent de tels installations, allez-voir cette installation exemplaire. En bonus, vous découvrirez une seconde oeuvre  près de ce labyrinthe : une boîte en plexiglas qui contient une poupée prise dans les rets de laine plus fine, sorte de miniaturisation minutieuse de l’oeuvre monumentale.
Chiharu Shiotsa est née au Japon en 1972 et travaille à Berlin. Elève de Marina Abramovic, elle s’est nourrie du travail de Louise Bourgeois et Ana Mendieta. Elle a participé à de nombreuses manifestations internationales notamment la dernière biennale de Venise, elle a exposé à la Maison Rouge en 2011 et travaille aussi à des décors de théâtre.
Ce ravissement des yeux se trouve à la galerie Templon, à deux pas de Beaubourg. Et aussi du BHV où l’on peut acheter de la laine, des clous et des agrafes pour tenter de composer sa propre toile chez soi. Bon courage !

Texte © dominique cozette

 

 

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