Ne pas confondre avec la fête des femmes

26 février 2010 : La cour suprême de Birmanie a confirmé la condamnation du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi à 18 mois supplémentaires d’assignation à résidence…
Fashion week : un petit débardeur brodé de chez Balmain pour 8000 euros…
Entre ces deux infos, la journée internationale de la femme installe ses stands dans une partie des médias du monde. Que va-t-il en sortir ? Que va-t-on nous montrer, nous vendre ? La femme sera-t-elle encore l’avenir de l’homme comme demain on rase gratis ? Mais demain c’est quand ? C’est demain, petit malin ! Mais alors l’avenir… eh bien, l’avenir, c’est le contraire du passé mais c’est pas aujourd’hui. Ni demain la veille. Donc y a encore du boulot avant que par exemple les décideurs du monde soient des femmes (oh fan de pute, parlez pas de malheur !). Qui va piano va sano, ouais, mais faudrait pas non plus que la femme s’endorme sur ses zakis. Moi, c’est fini, j’ai plus besoin de ça, l’avortement, le code du travail, l’allaitement… Mais tout de même, faudrait que ça bouge un peu plus vite, les mecs ! Je ne parle pas de vous qui me faites l’honneur de me lire.
Donc à l’année prochaine ! Il y aura j’espère moins de petites filles excisées, plus de fillettes à l’école dans des pays ingrats, mais moins à travailler comme bêtes de somme dans des grandes villes près de chez nous, et encore moins à se faire enfiler comme des petites perles précieuses dans des pays ensoleillés par des bourrins venus d’ailleurs.

Texte et peinture © dominiquecozette

Boys band des sixties

Quelques tranches de vie de garçons dans les années 60 qui écrivaient des lettres parce que ça se faisait. Parfois, dans les lettres, ils disaient : je t’appellerai lundi vers 18 h. Et on s’arrangeait pour recevoir l’appel, pendant que nos pères chassaient le buffle à coup de lances et que nos mères frottaient les silex pour allumer le feu.

« Merde, chierie de putain de chiasse de saloperie de caca de mes deux et de bonne-sœur enceinte. J’en ai marre mais marre et encore marre bordel. T’as compris, tout me fait chier et me répugne. Il n’y a aucune liberté possible sur ce globe à la con où l’on vit comme des cons car on est des cons. C’est vrai oui ou merde ? » (JEB. St Cloud, 67)

« Ma sœur t’a trouvée extra pour de nombreuses raisons, la première étant la suivante : lorsqu’on te parle, tu écoutes, véritablement concernée et tu réponds ensuite. A notre époque, c’est tellement rare que c’est une qualité fantastique » (JEB. Rouen, 67)

Tu n’es pas expressive ma chérie, tu ne dis jamais rien, je préfère que tu me fasses des reproches, si j’en ai besoin, que de te voir toujours muette, j’ai toujours peur que tu t’ennuies avec moi et c’est très désagréable. (AB. Joinville, 64)

Hier soir, je suis allé écouter Barbara chanter à la fac, et en arrivant une demi-heure après le début, j’ai réussi à entrer sans payer ma place. Ce qui fait que j’ai passé une soirée fort agréable. (JN. Paris, 65)

Je t’envoie toutes les congratulations que j’adresse à Dylan pour ses deux derniers 33 T que j’apprécie en ce moment dans la fumée d’une bonne « cigarette ». Je te les adresse sur un navire à rames longues et rythmées guidé par de grands barbus casqués et poilus. (JR. Londres, 66)

Poème Souvenirs secrets :
La source pleure encore au bas de la prairie
et toujours une enfant en robe rose ou blanche
qu’on chérira demain comme tu es chérie
à la nuit vient l’entendre et vers elle se penche
de tout le chaste élan de son âme attendrie
une enfant aux yeux bleus ainsi que la pervenche
une enfant aux yeux bleus qui s’appelle Domi
(AS. Joinville 1962 ou 3)

Texte collectif. Dessins © dominiquecozette

Un ministère détonant

"Hey, t'as vu, Corinne ? Il a de ces idées, not' Président !"
"Hey, t'as vu ça, Corinne ? Il a de ces idées, not' Président !"

Je me demandais l’autre jour (vous démarrez un roman comme ça et ça va direct poubelle) pourquoi notre bien-aimé Président ( je dis bien-aimé mais pas par moi, vous pensez, et j’ai même mis un pet majuscule, bref, je fais du remplissage) ne créerait pas le… le quoi ???? le Ministère de l’Opposition. Quelle classe ! Ça aurait de la gueule, d’autant que les ministres de l’opposition, ils seraient obligés de jouer leur rôle d’opposant pour bien montrer comme le Président à l’esprit large de rameuter des gens qui ne pensent pas comme lui et qui peuvent le dire. Ils diraient par exemple : je désapprouve totalement la politique sécuritaire du ministre de l’Intérieur, je suis contre la politique de Besson, je regrette que le Président aille dans ce sens etc… Bref, ils l’ouvriraient, contrairement aux UMPistes qui eux, ne peuvent l’ouvrir sans subir des remontrances. Dons les UMPistes seraient irrités que d’autres ministres puissent s’exprimer. Et le Président, ça le ferait marrer car il aime bien foutre la merde, faut le reconnaître.
Le seul problème, c’est de recruter les vrais opposants. Parce que les faux opposants, c’est facile. Ils sont d’ailleurs dans l’Ouverture, d’autres se pressent à la porte pour les nouvelles inscriptions de la saison prochaine. Mais les vrais ? Ils ne pourraient pas, ils diraient, non mais, pas de ça Coco, moi dans un gouvernement sarkozyste ??? Non mais ça va pas !!! Puis finalement, ils iraient quand même parce que s’il faut attendre la Saint Glinglin pour avoir son macaron sur le pare-brise, sa pension à vie et ses trépidantes anecdotes de vrai politicien vues de l’intérieur (sans i majuscule, je parle du dedans), hé ben, bref. Oui, monsieur le Président, vous n’allez pas être déçu par ma détermination à vous contrer, blabla… (sourire ironique du Président).
Vous allez me dire : elle est idiote ton idée. Ça servirait à quoi, ce ministère de l’opposition ? Qu’est-ce qu’il ferait, le Président, quand un opposant lui dirait « je ne suis pas d’accord avec telle mesure » ? Hé bien, il répondrait : « c’est normal puisque vous êtes dans mon opposition, ça prouve bien que ma mesure va satisfaire mes électeurs ! ». Ainsi, il enfoncerait le clou du bien-fondé de sa politique.
(Note : je viens de m’inscrire à Sciences Pauvres « section enseignement par courriel », c’est chouette la politique,  et on peut vraiment y exercer sa créativité !)

Texte et dessin © dominiquecozette

Le paradis des riches fraudeurs.

Vous me direz, en France, les riches n’ont pas trop à se faire de soucis entre la mollesse à débusquer leurs évasions fiscales et la quasi absence de sanction. Eh bien il y a peut-être mieux et c’est la porte à côté, en Allemagne, figurez-vous, dont notre dirigeant s’est entiché de la sienne. Comme  je ne suis pas trop l’économie internationale, je pensais qu’Allemagne = rigueur, ordre, règlement-règlement !!! Eh bien non ! Pas du tout ! Il y a aussi  l’évasion fiscale, pas de raison !, qu’on estime à plus de 300 milliards d’euros ! Impunie. Bon, ça peut changer vaguement. Le ministre des finances de Merkel s’est fait tirer l’oreille pour acheter le DVD contenant les informations sur ces comptes. Il a récupéré 170 millions. Une paille ! Mais un début de menace car les riches commenceraient à pétocher et viendraient se signaler au fisc. Bon.

Ce même ministère rechigne aussi à faire son travail pour évaluer les gros comptes : pratiquement aucun  contribuable très riche ne paie les 42% correspondant à l’imposition maximale. Les 450 ménages les plus aisés ne versent que 34% de leurs revenus. Là-dedans ne sont pas pris en compte (ni payés)  les revenus du capital  (pourquoi s’emmerder avec ça !)  ni les revenus locatifs (alors que plus de la moitié des Allemands sont locataires). Non,  l’Etat n’est pas très curieux sur la situation financière des ménages aisés. En voici une autre preuve : il a commandé une étude sur la pauvreté et la richesse : 216 pages sont consacrés aux pauvres et 10 seulement aux  riches. Vous me direz que c’est parce que les défavorisés l’intéressent beaucoup plus. C’est exact ! Mais pour une raison bizarre : figurez-vous que leurs maigres ressources  sont épluchées au centime près ! Au centime près ! Alors que les fonctionnaires ne disposent que  de trois heures et demie pour vérifier la déclaration d’une grosse légume ! Sachant qu’elle débouche sur un rappel moyen de 135 000 €. Bof, 135 000 petits euros, c’est une paille par rapport aux monstrueux centimes que les pauvres pourraient  carotter. Salauds de pauvres ! Tous des voleurs et des menteurs, des profiteurs de système et d’aides sociales, non mais je te vais les mater moi !

Texte © dominiquecozette d’après un article de Daniel Haufler (Berliner Zeitung) dans Courrier International récent.
Dessin qui n’est pas Merkel mais on dirait que ça serait sa soeur en 1985 © dominiquecozette

PS : Article sur ce sujet dans Libé d’hier qui passe le traitement réservé aux salauds de pauvres sous silence.

Je veux du bonheur, je vire à droite

UMPéattitude
UMPéattitude

C’est décidé, je vais prendre ma carte à l’UMP. Ça va choquer beaucoup d’amis, ça va en rassurer d’autres, mais si je fais ça, c’est purement égoïste. En effet, être à gauche est très inconfortable de nos jours, rien ne va, peu d’espoir de changement, bonjour tristesse. Tandis qu’à droite !!! Le paradis ! Je ne vous dis que ça (pour ceux qui ne connaissent pas, bien entendu). A droite, on est optimiste car on peut s’appuyer sur un président qui s’occupe de tout, avec toutes ces personnes fort sympathiques autour de lui qui approuvent tout ce qu’il fait. Ça stresse moins, quand il y a harmonie.
Donc à droite, le chômage est en baisse constante. Rien que ça, ça met de bonne humeur. A droite, y a plus de racaille, finis les petits malfrats, les violences conjugales et les maladies (vous avez vu avec quelle efficacité la grippe A a été renvoyée hors de chez nous, comme ces étrangers sans papiers qui viennent piquer nos allocs). D’ailleurs, dans les villes de droite, y a pas de tags sur les murs et pas de jeunes à capuches, ils ont tout compris les jeunes à droite, ils s’habillent proprement, parlent sans accent banlieue et trouvent du travail, sont moins cons que les jeunes que j’ai dans ma ville à gauche. Re-donc quand on est à droite, on est plus confiant parce qu’on est la Majorité. La Majoritén c’est l’UMP. Si vous tapez UMP sur Google, vous tombez dessus, c’est le premier site de la page, cliquez -> UMP.org.. Le sous-titre dit : »ce vous cherchez (sic), au moment où vous en avez besoin ». Et les rubriques sont assez… prometteuses : annonces personnelles adultes, Pamela Anderson nue, éjaculation faciale, Sarkozy… Notez, quand on est une femme, c’est moins alléchant, mais enfin, on se dit que décidément, pour un mouvement de droite dont on attend qu’il soit un peu réac, il est vraiment décomplexé,  il a bien brisé tous les tabous.
Normalement,  je devrais déménager dans une commune de droite pour être dans cette belle communauté de gens insouciants et heureux mais je me suis renseignée, ils ne font pas beaucoup pour la culture, c’est peut-être un détail pour vous mais  pour moi ça veut dire beaucoup :  dire adieu à mes trois théâtres, ma super médiathèque, mes petites salles de concert, mes ateliers dessin, modèles vivants, gravure, sculpture etc, mon ciné-club qui programme à longueur d’année des super films en VO. Donc je reste dans ma ville de gauche, triste et pessimiste. En même temps, c’est pas écrit là que je suis devenue UMP, hein ? Mon bonheur, ça ne regarde que moi (en plus,  je continuerai à voter à gauche pour que ma commune reste sympa, qui le saura ?). Ah, que la vie est belle !

Texte et dessin © dominiquecozette

PS : En commençant ce texte, je ne savais pas que j’allais tomber sur ce site UMP un peu spécial… Ce sont les surprises du direct !

Allez les verts caca d’oie !

« Il existe deux conceptions du développement durable. Celle symbolisée par Nicolas Hulot se résume à « polluer un peu moins pour pouvoir polluer plus longtemps » : elle a le gros inconvénient de diluer les responsabilités. L’autre  conception est incarnée par la présidente du Medef Laurence Parisot, qui affirme que si un peu de croissance pollue, beaucoup dépollue; ou par Claude Allègre qui appelle à passer d’une écologie dénonciatrice et culpabilisatrice à une écologie réparatrice. Cette nouvelle écologie veut adapter la planète aux besoins du productivisme en étendant le champ de la marchandisation à la nature grâce à la monnaie carbone. Ce capitalisme vert tend à réhabiliter le monde de l’entreprise et celui de la technoscience, au moment où l’on commençait à les montrer sérieusement du doigt. Les firmes capitalistes ne sont plus les acteurs de l’effondrement écologique mais les nouveaux chevaliers verts. Merci Yann Artus-Bertrand et toutes les ONG financées pas les firmes ! »

Texte © Paul Ariès  (in Les Inrockuptibles) Dessin © dominiquecozette (ce n’est pas le portrait de Paul Ariès mais ça lui ressemble un peu).
Paul Ariès, militant écologiste, est rédacteur au Journal de la Décroissance et directeur du journal Le Sarkophage. Il fut l’un des organisateurs du contre-Grenelle de l’environnement à Lyon, le 6 octobre 2007. Il a publié plusieurs ouvrages dont Apprendre à faire le vide : pour en finir avec le » toujours plus ».

Bonus du Libé du jour « Il ests possible de reconnaître un secteur polluant à son nombre de publicités faussement écologiques. Plus l’activité est polluante, plus les indistriels ont recours à l’écoblanchiment ! » Stephen Kerckhove, délégué général de l’association Agir pour l’Environnement.

Journaliste, boulot de merde ?

A la question des Inrocks « Pourquoi avoir choisi d’en faire un livre et pas un feuilleton pour un magazine ? » Florence Aubenas répond :
« Je crois qu’il y a un certain nombre de sujets sociaux — les sans papiers, la précarité — qui posent problème pour les journaux. Ils veulent les traiter tout en craignant d’avoir l’air ennuyeux, sinistres pour le lecteur. Face à ce type de sujets que les journalistes proposent, j’ai vu des générations de chefs de service lever les yeux au ciel, commander cinq feuillets et les réduire à deux, voire ne pas passer le papier du tout. Si la presse jouait pleinement son rôle d’intervention, d’engagement, ces papiers passeraient. je ne me voyais pas aller en réunion de rédaction au Nouvel Obs pour dire que je voulais faire de longs articles sur les femmes de ménage ou la précarité. Traités au cinéma ou dans les livres, ces sujets prennent une autre dimension. (…) J’ai pris un an de congé sans solde, j’avais mis de l’argent de côté. Et, surtout, je ne voulais pas faire un livre « Moi, femme de ménage ». je suis très amie avec l’artiste Sophie Calle et, même si ma démarche n’est pas la même, peut-être son culot à se mettre dans certaines situations m’ont-ils contaminée. »
A lire, forcément, il y a de l’humanité dans ce livre mais ma petite librairie ne l’a pas encore reçu. Je préfère l’acheter chez les petits commerçants vu que le prix est le même* ( qu’à la FNAC où les salariés ne sont pas très bien traités, comme c’est bizarre, et qui appartient à un très riche monsieur qui cherche à la revendre donc turbulences en vue… (* grâce à la loi Lang, merci Jack) et qu’un bouquin sur les précaires, on va pas enrichir un commerce libéral en l’y achetant.
Autre anecdote de Florence : les employeurs et consorts ne risquaient pas de la reconnaître bien qu’elle usât de son vrai nom et qu’elle fût très peu grimée, pour la bonne raison que quand tu es un précaire, tu passes totalement inaperçu, personne ne te regarde et a fortiori ne te voit…

Texte © Florence Aubenas/Inrockuptibles 17 fév 10. parlant de son livre « le quai de Ouistreham ».
Photo de mon balai** © dominiquecozette
** si vous avez une bonne vue, vous verrez le logo Carrefour sur mon balai. Ce n’est pas moi qui l’ai acheté mais j’aurais pu le faire moi-même  dans ce haut lieu de l’économie ultra-libérale vu que Jack Lang n’a rien décrété sur le prix des balais, qui sont donc forcément plus chers dans les commerces de proximité. Comme quoi c’est pas parce qu’on a de belles idées qu’on est une belle personne.

Vu à la radio

Avant, tu étais invité(e) à la radio pour causer dans le poste, tu y allais comme ça, pas coiffé(e), pas sapé(e), pas maquillé(e), mal chaussé(e) etc… Tu pouvais faire des mimiques, des grimaces, des gestes insensés pendant qu’on te posait des questions ou que des infos tombaient. Tu pouvais aussi mettre les doigts dans ton nez, fumer une clope, mettre une main aux fesses, boire de l’alcool, être moche sans que ça se sache, auréoler tes aisselles, te gratter le ventre, que sais-je… Mais voilà que les studios radio sont devenus des relais d’internet, du zapping, du Petit et du Grand Journal. Et voilà qu’on montre tout ce qu’il s’y passe. Enfer et damnation, plus rien ne sera jamais pareil. Le secret de la confession en feutré disparaît pour faire place soit au cabotinage, soit à l’immobilité totale (après une  prise en flag d’exploration nasale, Roselyne Bachelot se statufie dorénavant sans ciller). Tout ça pour quoi ? Pour faire de la mauvaise télé ! C’est pas que ça me dérange vraiment, je m’en tape même le transistor,  c’est que ça change l’esprit.
A partir de maintenant, on ne comprend plus qu’on passe la voix de quelqu’un sans une image qui bouge et qui va avec. On s’étonne qu’on ne soit pas dans les coulisses de la chose et dans les chiottes des coulisses. On veut tout voir, tout savoir, avoir des preuves, des vu-de-mes-yeux-vu, des sources sûres. Imaginer n’est plus intéressant, c’est même pénible, ça fatigue la tête. A partir de maintenant, on veut du making off, du webcamé, du coloscopique, du trou se serrure. Moi je dis : pourquoi on ne fixe pas un petit écran sur la radio pour la regarder ? Quelqu’un (à l’intérieur de ma tête) me rétorque : t’es con, ça serait de la télé, voyons ! Voyons, bien sûr, mais qu’est-ce qu’on est con, parfois. Enfin, je parle pour moi et je vous jure que si j’étais filmée en train de me fustiger ainsi, ça passerait en boucle sur Youtube  !

texte et dessin © dominiquecozette (sujet très très vaguement inspiré de « au poste » de Judith Sibony)

Une sacrée tante !

Ma tante était assez médium et particulièrement radin. Quand elle voulait que quelqu’un l’appelle, elle s’allongeait à côté de son téléphone en pensant très fort à son interlocuteur et dans l’heure en général, il ou elle l’appelait, comme ça, elle ne payait pas la communication. Le nombre de fois où je l’ai appelée et où elle répondait : « Ma chérie, justement, je pensais à toi… » et là je savais que je m’étais fait téléphoner le bulbe. Elle faisait des rêves prémonitoires, il n’y avait plus qu’à envoyer le faire part (joie ou peine). Et puis, elle avait fait du « mind control », donc elle s’expédiait dans son « laboratoire »,  sorte de cocon virtuel où elle se sentait beaucoup mieux et pouvait faire venir dedans des gens qu’elle avait envie de voir. C’était une dépressive profonde, elle a fini par se suicider, je la comprends, mais elle m’a laissé un message téléphonique qui disait : « Passe me voir lundi », ce que j’ai fait, j’ai trouvé son corps sur son canapé littéralement recouvert des photos des gens qu’elle aimait. Putain, pour une fois que c’est elle qui téléphonait.

Texte © Olivia van Hoegarden
dessin © dominiquecozette

(Suite à un article où par un enchaînement d’idées on en est venues à évoquer les dons de medium de certaines personnes, Olivia m’a envoyé ce texte. Je l’ai trouvé très dense, très fort, très émouvant et lui ai demandé l’autorisation de le publier, voilà. J’ajoute qu’Olivia aimait beaucoup sa tante malgré cette fin plutôt trash).

Spirale infernale

Monsieur Takata, ou donnez-lui le nom nippon qui vous arrange, arrive au bureau comme tous les matins. C’est un labo de recherche. Je ne sais pas s’il faut un s à recherche. Je ne crois pas. Il bosse comme un dingue, il est sur le point d’accéder à la reconnaissance scientifique planétaire. Son projet, nom de code Vortex, va pouvoir être publié, après des années d’études, d’essais, d’erreurs, de choux blancs. Il va aussi enfin pouvoir en toucher trois mots à sa femme qui, bien que discrète, piaffe d’impatience devant l’omerta de son époux. Imaginez les milliers d’heures où lui et ces collaborateurs étaient penchés sur le problème Vortex, leurs espoirs, leurs déceptions, cette obsession qui souvent les empêchaient de dormir et les précipitaient dans des soirées Geishas/Saké à volonté où ils pouvaient décompresser quelques heures. Et ça y est ! Champagne français pour tout le monde, ils sont nés, ils vivent normalement et ils ont même procréé !!!
– Qui ?
– Les petits escargots à coquille inversée.
– Pardon ?
– Les petits escargots dont l’enroulement de la coquille est dans l’autre sens. Et qui ont donné eux-mêmes naissance à des escargots à coquille normale.
– Heu, moi je veux bien, mais vous ne croyez pas que tous ces cerveaux auraient pu réfléchir à des trucs plus intelligents, plus utiles ?
– Comme quoi ?
– Eh bien au hasard, tiens, aux pédales de frein ou d’accélérateur de voitures hybrides !
– Mais monsieur Takata (ou le nom que vous aurez préféré) travaille dans la recherche GÉ-NÉ-TIQUE. Pas dans la bagnole. Vous seriez pas un peu con, vous ? Vous n’auriez pas l’hippocampe retro-spiralé, des fois ?
Non, je ne crois pas, quoi que les hippocampes par les temps qui courent, qui les maîtrise encore ?  Enfin, cette recherche nous servira peut-être un jour, comme la souris transparente, le rat avec une oreille humaine greffée sur le dos, le lapin phosphorescent et les jeunes appelés du contingent devenus cobayes involontaires durant nos essais nucléaires…

Texte © dominiquecozette d’après un article dans S&V de ce court mois.

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