Retraites : salauds de soixante-huitards !

Dans un article des Inrocks, on m’a traitée de salope de soixante-huitarde.* Alors, usant de mon droit de réponse, j’ai envoyé ce mail :
Chère Anne Laffeter
C’est sympa, votre article sur les retraites et les “salauds de soixante-huitards”.
Vous avez raison, on est de vraies catastrophes ! On n’aurait jamais dû vous faire naître, comme ça, hop, pas vu pas pris !
On aurait vieilli entre nous, fumant des pétards, s’habillant de coton indien et s’ornant de fleurs fanées. On n’aurait pas dû aller bosser non plus parce que merde, ça fait chier, et puis filer toutes ces cotisations pour nos vieux à nous qui nous emmerdent encore, flûte. On n’aurait pas dû gâter-pourrir nos petits (vous), les emmener au Club, au ski, les inscrire à la danse, au dessin, au poney. On n’aurait pas dû flatter leurs penchants pour les dorothéades, les disneytudes et autres conneries clinquantes. On aurait dû être plus sévères, leur montrer que la vie c’est qu’une tartine de merde même si ça ressemble à du Nutella, leur interdire cette putain de télé qui bouffe le cerveau disponible. Leur filer des livres, plutôt, et leur faire la morale, comme jadis nos aïeux. On aurait dû mieux calculer l’avenir et les habituer aux frustrations.
Alors, pour nous faire pardonner, on va essayer de mourir vite, en clopant, bouffant des saletés, picolant, bravant des dangers, pratiquant le jeu du foulard, partant à la guerre, se proposant comme cobayes pour la science, se transformant en kamikazes pour faire sauter tout ce nid de  salauds qui profitent du système et  font raquer ces générations sacrifiées (scarifiées ?).
Tout pourra alors repartir à zéro, sainement, comme vous le déciderez. Mais bientôt, à l’aube de votre soixantaine, vous sentirez chez vos gosses comme une impatience. Celle de vous liquider. Y a pas de raison que leur génération se remette à payer pour les vieux que vous serez devenus.
Cordialement
Dominique cozette

* Pour voir l’article, tapez « retraites, salauds de soixante-huitards » sur Google (pas réussi à mettre le lien sans buguer).

C’est les vacances. Enfin au Grand Journal. Moi je fais pareil sauf que je n’arrête pas tout. Je continue à vous envoyer mes billets. Mais pas tous les jours. Mais je continue. Mais pas tous les jours…

Texte et dessin © dominiquecozette

Social media & sharing icons powered by UltimatelySocial
Twitter