Faisons tous comme Philippe Katerine en cette saison d’agapes, remercions chacun des animaux sacrifiés à notre gourmandise.
Poulet N°728 120
Poulet de Vendée
Elevé en plein air
89 jours et 90 nuits
Parmi 380 autres poulets
Alimenté avec 75% de céréales
Le 3 décembre 1998
A l’abattoir de St Fuljean
Electroculté, Vidé, déplumé, lavé, conditionné, labellisé le poulet
Le 11 décembre 1998
je l’ai acheté 52 francs 55
Chez le boucher chauve,
Rue de la bastille.
Je l’ai mangé chaud le midi,
Froid le soir, avec une bouteille de vin rouge.
Je l’ai adoré le poulet
C’était un des mecs les plus rebelles et les plus talentueux du monde. Il a fait scandale en dessinant des femmes, vieilles, jeunes, moches, en tout cas jamais magnifiées car il avait crayon cruel et réaliste. Ses autoportraits n’échappe pas à cette noirceur. Les chairs sont blanchâtres, les organes sexuels rougeoyants, les corps pathétiques, les poses disgracieuses, on voit des poils et des origines du monde assez trash, et d’ailleurs il passera quelques jours en prison pour obscénité ou atteinte à la pudeur ou quelque chose de ce genre. Il s’était lié avec une femmes légère qu’il dessina sous toutes les coutures puis il épousa une gentille jeune femme. En 1915, il est mobilisé. Il continue son oeuvre et commence à être reconnu. En 1918, lors le l’expo de la Sécession Viennoise, le groupe qu’il a créé, il vend presque tout. Hélas, sa femme, enceinte de six mois, meurt brutalement de la grippe espagnole. Il la suivra trois jours plus tard. Et d’ailleurs, trois jours après, Apollinaire est foudroyé à son tour.
je le pleure encore et encore. Il n’avait que 28 ans, vous imaginez !!! Moi, j’imagine et je brandis mes poings menaçants vers le dieu qui n’existe pas et qui tue le talent. Salaud, j’y dis !!! Et comme il n’existe pas, je suis furieuse et alors je me console en me plongeant dans ses chères monographies.
A côté de ça, je me prends à tenter d’essayer de faire un petit dessin rapide, à la Egon, voilà, comme quand j’étais gosse et que je faisais Elvis de profil. Voilà ce que ça donne, ne m’en veuillez pas car je vous donne un lien avec plein de superbes dessins de cet artiste exceptionnel : lien
Si ça ne marche pas, vous tapez Egon Schiele sur Google, vous avez une palanquée de sites extrêmement nourris (comme nous ce soir, ouarf ouarf !).
« Au début des années 80, au Canada, j’ai fait la connaissance de Bulle Ogier et de sa fille, Pascale, et je suis devenu très proche de Pascale. D’elle, je dirai juste ceci : elle combinait la plus sensible féminité, la beauté et l’esprit d’un criminel intellectuel. Toute autorité, tout ce que l’on tente d’imposer à votre cerveau lui faisaient horreur et la mettaient en colère. Pas de contrôle sur Pascale. Elle était très sélective, mais seulement pour pour pouvoir échapper à ce contrôle. On ne rencontre pas souvent une personne aussi jeune et aussi avisée du monde. J’aimais sa culture, je l’aimais, elle : cette façon de se comporter en criminelle. Elle était une personne. Elle était comme personne. »
Pascale Oger (1958-1984).
Photo Faux. Sipa. Texte Jim Jarmusch recueilli par Philippe Azoury pour Libé.
Gilbert Garcin est né en 1929, en pleine crise donc. Et sa première expo photo a lieu en 93. Si je calcule bien, il a 64 ans lorsqu’il débute. C’est cela même. Après une vie de labeur, durant une retraite bien méritée comme on dit bêtement, il décide de faire un stage de photo à Arles. Coup de foudre. Et c’est parti ! Avec un humour féroce, il va imaginer des saynètes de la vie où la dérision le dispute à la vanité. Ses montages en noir et blanc, beaucoup de noir et peu de blanc, le mettent en scène, tel un petit Tati, dans un paysage désolant comme un dessin de Chaval et absurde comme une image de Sempé. Regardez sa bio : la première année, il fait quelques photos, l’année suivante un peu plus, l’année d’après, encore plus et encore et encore. Alors voilà-t-il pas qu’il engage sa petite femme, sa mémère qui était tranquille dans la cuisine à dénoyauter des olives et vider des rougets (ils vivent à Marseille peuchère !), pour la photographier à ses côtés, dans des mises en scène aussi désespérantes que burlesques. En 17 années denses, il a exposé partout en France et dans de nombreux pays, il a fait l’objet de moults essais, a publié ou figuré dans divers ouvrages. Et pour 2010, il a déjà dix expositions programmées dans le monde entier. Quelle belle retraite ! Moi je dis : respect. Allez donc voir son site !
Réponse de Gilbert Garcin à réception de mon mail l’informant de ce blog :
« J’apprécie votre écriture mais redoute toujours d’être enseveli sous les commentaires.
Cordialement
Gilbert Garcin
Ma femme me prie de vous signaler qu’elle achète les olives dénoyautées et les rougets vidés. »
Pour la journée contre les violences conjugales, je vous laisse devant cette chanson du grand Boris Vian(dé) parce que, parce que… y a quand même des nanas qui le cherchent ! Bon, ça a été écrit par un homme dont on sait qu’il tapait énormément. Mais c’était sur sa Remington. Ça n’empêche pas une pensée pour Marie Trintignant et les 200 autres qu’on tue chaque année. (Oui, je sais, je ne suis pas drôle !)
Il s’est levé à mon approche
Debout, il était bien plus p’tit
Je me suis dit c’est dans la poche
Ce mignon-là, c’est pour mon lit
Il m’arrivait jusqu’à l’épaule
Mais il était râblé comme tout
Il m’a suivie jusqu’à ma piaule
Et j’ai crié vas-y mon loup
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Envole-moi au ciel… zoum!
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Moi j’aim’ l’amour qui fait boum!
Il n’avait plus que ses chaussettes
Des bell’ jaunes avec des raies bleues
Il m’a regardé d’un œil bête
Il comprenait rien, l’malheureux
Et il m’a dit l’air désolé
Je n’ferais pas d’mal à une mouche
Il m’énervait! Je l’ai giflé
Et j’ai grincé d’un air farouche
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Je n’suis pas une mouche… zoum!
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Moi j’aim’ l’amour qui fait boum!
Voyant qu’il ne s’excitait guère
Je l’ai insulté sauvagement
J’y ai donné tous les noms d’la terre
Et encor’ d’aut’s bien moins courants
Ça l’a réveillé aussi sec
Et il m’a dit arrête ton char
Tu m’prends vraiment pour un pauve mec
J’vais t’en r’filer, d’la série noire
Tu m’fais mal, Johnny, Johnny, Johnny
Pas avec des pieds… zing!
Tu m’fais mal, Johnny, Johnny, Johnny
J’aim’ pas l’amour qui fait bing!
Il a remis sa p’tite chemise
Son p’tit complet, ses p’tits souliers
Il est descendu l’escalier
En m’laissant une épaule démise
Pour des voyous de cette espèce
C’est bien la peine de faire des frais
Maintenant, j’ai des bleus plein les fesses
Et plus jamais je ne dirai
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Envole-moi au ciel… zoum!
Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny
Moi j’aim’ l’amour qui fait boum!
« J’ai eu un rapport le 16 décembre avec mon copain et le 24 décembre avec le meilleur ami de mon copain parce que j’avais rompu et je croyais que c’était pour de bon et je me sentais seule et je n’ai pas eu de règles quand je les attendais le premier janvier et depuis mon copain est revenu il veut faire sa vie avec moi et hier je me suis mise à vomir et j’ai fait un test je suis enceinte. De qui est l’enfant ? » *
* J’ai connu une fille qui s’était posé la même question mais elle savait que le problème serait réglé dès la naissance puisque l’un de ses deux amants était indien et l’autre très blond. De ce fait, elle n’a pas pu faire endosser la paternité à l’un des deux durant sa grossesse. Donc ni après, je suppose car je n’en sais pas plus. L’enfant doit avoir une vingtaine d’années aujourd’hui.
Drôle de vie. Une mère qui tient un estaminet qui pue la frite, où pochetrons, marins et assassins viennent se mettre minables, faut pas être bégueule, je vous jure. Du coup, ses filles, elle te les colle dans une pension, c’est triste les pensions de ces années-là, t’as des engelures et la gourme aussi, des poux souvent, des pestes qui mouillent ton lit, qui crachent dans ton gâchis parmentier, d’autres qui pissent dans ton casier ou te volent ton équerre, y avait pas de supermarché et de made in China dans ce temps-là, t’avais une équerre pour toute ta scolarité. Et puis le père qui s’est barré en leur transmettant un risque avéré de cancer de la peau avec son mélanome trash sur la joue qui se retrouve au bas de leur dos. Comme elles sont de province, dans une ville portuaire charentaise ou l’inverse, elles ne rêvent que d’une chose : monter à Paris. Ah ! Paris ! L’une est persuadée que là-bas, l’Opéra n’attend qu’elle (à 20 ans, faut être naïve !), l’autre imagine donner des leçons de solfège, c’est déjà plus raisonnable. Le problème, c’est qu’elles cherchent l’amour avec une telle opiniâtreté que n’importe quel crétin, flairant la bonne arnaque, va te leur raconter les pires bobards pour les mettre au boulot rue Saint Denis. Tapiner en ressassant leurs grands rêves d’artistes, tel est leur destin. Et la mère ? La mère, elle s’en fout, elle est trop space, elle laisse des inconnus chercher son fils à l’école. Dont elle a plaqué le père parce qu’il avait un nom à la noix. Bref, c’est une bande de nases, vraiment nases. Ah, j’oubliais : les filles sont jumelles. De fausses jumelles, des vraies connes.
(Je déconne : j’adore des Demoiselles de Rochefort !)
* Pourquoi éditer ce vieux machin ? Parce que je l’avais gardé au cas où, et le cas où, c’est maintenant. Et puis Delerm, en fait, père ou fils, je m’en bats l’anse, c’est juste pour publier cette photo réalisée sur un mur de Saint Paul Trois Châteaux. Chirac aurait aussi bien fait la farce.
Si vous aimez les fauteuils, les fauteuils, les fauteuils, vous aimerez le site de ce peintre, Joël Gangloff car il ne peint (joliment) que ça. Enfin, que ça… il y a aussi des échelles, des tréteaux, des seaux, des pots. Des traces de l’homme, comme il dit dans son site. Moi, je ne sais pas pourquoi j’aime sa peinture, mais je l’adore ! Je l’ai vue deux fois, lors de deux marchés de l’art à la Bastille, et je suis tombée en arrête (je laisse la faute, tant pis, je trouve ça mignon) devant ses toiles. Richesse de la matière, fondu des couleurs, simplicité du sujet, unité d’action… Oh lala, que je suis une piètre critique ! Mais si vous prenez le temps de vous asseoir cinq minutes et de regarder ses oeuvres, hé ben heu, hé ben je suis sûre que vous aimerez. Et si vous n’aimez pas, je vous parlerai une autre fois de gens qui photographient des poissons, qui tordent du fil de fer ou qui cuisent de la terre. Enfin, on verra…
C’est un endroit qui ne ressemble ni à la Louisiane ni à l’ l’Italie mais ça pourrait être joli, c’est le Sud, le temps dure longtemps et la vie pas vraiment, quelques petites années, et toujours en été.
Il y a plein d’enfants qui se meurent sur le sable, il n’y a pas de chiens ni de chats, il manque de tout, pas d’eau, rien à manger.
Un jour ou l’autre il faudra qu’il n’y ait plus la guerre mais on ne sait pas quoi faire pour l’empêcher, c’est le destin. Si ça arrive, tant mieux pour le Sud, ce serait vraiment bien, on pourra alors vivre plus d’un million d’années, et toujours en été.
Toujours en été, Nino, auteur de la chanson originale, s’est tiré une balle de fusil dans un champ de blé, il ne se remettait pas de la mort de sa mère. Nino, je l’ai un peu connu dans son époque flamboyante, dandy, Bentley et Jaguar, pourquoi n’avoir pas gardé Ferrari comme nom, verres de Murano, cigares commak, masseur pour ses deux femmes, mais ça, c’était aussi à l’époque où je portais un ensemble tunique-pantalon en soie indienne couleur émeraude.
Pourquoi je vous raconte tout ça ? Parce que personne ne pourra le raconter à ma place. C’est fort comme justification, non ?