Salaude de journaliste !*

Ancien jeune

Pour ceux qui ne sont pas sur facebook que mon dernier billet sur les « salauds de soixante-huitards » a intéressés, je livre trois des commentaires que j’aime bien, parmi les nombreux suscités par l’article d’origine commis par une journaliste des Inrocks.

Commentaire d’Olivia, amie facebook, un peu plus jeune que moi :
« Un peu plus jeune que l’auteure, je ne suis qu’une soixantedizarde et j’ai connu l’insurrection des universités américaines, j’ai mis le feu à des poubelles à Harvard Square, Cambridge, Massachussets et abrité un mec blessé, recherché par la police. Puis, ce fut L’ULB (Université Libre de Bruxelles), la Nanterre des brumes du Nord, fac ultra socialiste qui nourrissait en son sein des misérables gauchistes, des maoïstes et même des Mao Spontex. A ce propos, je n’ai jamais compris pourquoi une marque d’éponges à gratter sponsorisait un mouvement d’extrême gauche, c’est sans doute pour comprendre ce concept étrange que j’ai fait une carrière en flèche dans la publicité, mais je m’écarte de mon propos. A l’ULB qui virait 68 en 70, là, j’ai bravé les piquets de grève, je les voulais mes cours d’Eco sur Keynes et mes conférences de PO sur le général Boulanger, mes leçons d’Histoire des USA et les 5 grands cas qui opposèrent la Cour Suprême à des péquenots qui ont influencé le social (j’ai oublié lesquels, vous pensez, c’était il y a 40 ans, j’ai pas gardé les polycopiés).
Je voulais parler l’Espagnol et apprendre à dire très vite « Cada dia,a la siete, las gente se precipitan por la bocca del métro » – je ne vous fais pas l’affront de vous traduire ça. Je détestais le prof d’Anglais qui ressemblait au colonel Clifton et qui me collait des C à cause de mon accent ricain. Quant au » flamoutche », je me faisais une joie d’avoir des zéros partout. J’ai eu 15 sur 20 à l’oral d’histoire avec une question sur Colbert en brodant entièrement sur les Rois Maudits que je venais de lire, puis ras le bol d’aller aux amphis non sans faire au préalable mon autocritique devant le « Boss » du mouvement maoïste, qui avait plusieurs petites amies en même temps, tel un pacha en son harem.
Bref, j’ai fui à Paris où la paix étant revenue, ça pompidolisait confortablement, en pleine 30 Glorieuses et j’ai fait ma prépa Sciences Po, comme tout le monde, j’avais dix neuf ans. Mais si je vous raconte tout ça, c’est que mon premier stage, je l’ai fait dans une grande agence de Pub dont les mânes subsistent encore rue du Faubourg Saint-Martin (ou rue Saint-Martin) sous le nom de Euro RSCG BETC. C’est là que s’est produit l’incroyable, on m’a proposé de rester et de travailler pour de bon.
Hé ben, j’ai abandonné mes études, croyez le si vous le voulez, à l’époque on avait cet incroyable choix : ce qui fait qu’ayant commencé à cotiser très tôt, je pouvais décemment m’attendre à partir à la retraite mes 60 balais révolus et mes centaines de trimestres accomplis, en septembre 2012 et paf! Voilà qu’on me colle 8 mois de plus et je ne serai libre de mes entraves cotisantes qu’en mars 2013. Et voyez-vous, si cela peut aider les retraites de mes enfants, j’en ai fait quatre pour les allocs, je suis tout à fait d’accord, car eux, ils n’ont connu que les grèves de fac et de train pour aller à la fac, tandis que je m’échinais sur Pampers ou sur Ariel, Renault ou Citroën, l’Oréal ou Jeanne Gatineau. Et je fais partie de ces chiens de baby boomers qui vont en plus toucher une retraite plus que confortable, de quoi me faire lyncher avec les nantis, lors de la prochaine révolution, ceux là même que la dame des Inrocks a dans le collimateur. Enfin, moi je dis la guillotine peut attendre. Et le ciel aussi. »

Commentaire d’Yvain, ami facebook, fils d’une soixante-huitarde, également amie facebook :
« Et bien moi, grâce à ma 68arde de mother, je peux rêver, penser, m’instruire, ne plus avoir peur de dire NON, rencontrer ds gens différents, respecter les autres, flaner, ne rien faire et même si tout s’écroule, même si tout ce qui fait que je suis libre disparait peu à peu, je voulais vous dire merci à vous, m’dame Cozette, mother et other pour avoir eu le cran de sacrifier un tantinet votre jeunesse pour vous mettre en danger dans le seul but que je puisse être LIBRE !
Car, tout de même, soyons lucides, qu’ai-je fait pour changer le monde, mis à part gueuler Devaquet au Piquet en 1986? (l’inverse de 1968 d’ailleurs)! RIEN, si ce n’est d’essayer de vous imiter! Et c’est ma génération qui a amené les marques, le paraitre, le bling-bling et mes enfants me le reprocheront peut-être un jour!
Alors les générations à venir n’ont qu’à se bouger les fesses au lieu de tirer sur leurs aïlleuls!
Moi, je vous aime! »

Commentaire d’Alan, ami facebook, pas encore vieux mais plus si jeune :
« L’article des inrock est consternant.
Que ces jeunes mollassons soient incapables de comprendre que le modèle français arrive
au bout à cause d’une société délibérément bloquée par les élites qui s’en foutent plein les
poches, passe encore.
Qu’elle soit incapable d’aller voter ou de s’engager politiquement, O.K.
Qu’elle se complaise dans des attitudes de victime obligée de rester chez Papa-Maman, hôtel ou la pitance le lavage et le repassage sont assurés, d’accord.
Qu’elle n’ait pas le courage de partir n’importe où ailleurs où rien n’est bloqué, pourquoi pas
c’est difficile, faut un peu de c….(coeur, courage, couilles etc…)
Mais qu’elle en veuille à ses géniteurs soixante huitards alors là les bras m’en tombent.
Je commence dès aujourd’hui à apprendre les moeurs chinoises car assurément dans 20 ans c’est le modèle qui prévaudra en France.
Et à mon avis les jeunes très courageux et lucides que je connais sauront parfaitement s’y adapter.
En même temps je ne suis pas hostile à piquer les vieux soixante huitards qui coûtent plus qu’ils ne rapportent(y’en à très peu!). »

Rappel  du pourquoi de  mon coup de gueule :
Ce n’était pas un billet contre les jeunes mais contre ceux qui poussent les jeunes, quoi qu’ils fassent ou ne fassent pas, à demander des comptes aux 68tards, aux retraités, aux vieux. Cette tendance à la culpabilisation, ces accusations mal fondées, n’en sont qu’au stade embryonnaire. Avant que le monstre ne nous jaillisse à la gueule, je réclame son euthanasie définitive.

* J’ai écrit « salaude » car une féministe avisée m’a fait justement remarquer que le féminin de « salaud » n’était pas « salope ». Et je trouve qu’elle a bien raison !

Texte © àquidedroit. Dessin © dominiquecozette

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