Son mari

Mon mari de Maud Ventura est un très grand succès, j’ai attendu qu’il soit en poche pour l’acquérir. Au début, j’ai trouvé ça un peu moyen, cette femme toujours tellement amoureuse de son mari au point de se pourrir la tête avec des questions sur son amour à lui… Ils ont deux enfants mais elle, ça ne l’intéresse pas, ce qu’elle veut, c’est qu’ils aillent ait fissa pour que la soirée en tête à tête avec son mari puisse commencer. Pourtant, ils mènent une vie exemplaire, tout le monde envie leur couple, ils ont réussi, elle est traductrice et lui a une très bonne situation. Une belle maison, des amis sympas et ils sont tous les deux très beaux. Cela suffirait à son bonheur si elle n’était pas aussi opiniâtre à décoder TOUS les gestes, mots, actes de son mari. Le pire est arrivé lorsqu’il a comparé, lors d’un jeu chez des amis, sa femme à une mandarine, ce petit fruit ordinaire et sans panache. Depuis, elle rumine, elle en pleure. Elle pense qu’elle ne représente plus rien pour lui alors qu’il est tout pour elle. Elle tente de lui prendre la main, elle lui reproche intérieurement de ne plus lui rouler des pelles, l’appeler trois fois par jour pour lui dire qu’il l’aime. Etc. Alors parfois elle prend un amant d’un jour pour se détendre et elle sait que son mari, le soir-même, lui fera l’amour avec frénésie.
Au fur et à mesure de la lecture, on se dit que cette femme est vraiment pénible, chiante voire totalement malade. Maniaque et dépressive car elle pleure très souvent. Et on sent que ça va mal se terminer.
Mais la fin est très inattendue. Et assez rigolote.

Mon mari de Maud Ventura, 2021, 268 pages.

Texte © dominique cozette

Mon mari

Je ne vais pas vous parler du mien, de mari,  mais de celui que Maud Ventura décrit dans ce livre au titre éponyme. Jadis, j’avais commis « ma femme », fièrement publié chez Grasset, où je débinais, en tant que mari, les exigences d’icelle qui voulait un chien, puis un bébé, puis travailler etc.
Ici, ce n’est pas du tout ça : cette narratrice de femme est tellement amoureuse de son mari qu’elle est tétanisée par le fait qu’il ne semble l’aimer autant qu’elle. Si elle lui prend la main en regardant la télé, il la lui retire cinq minutes plus tard. Quand il rentre du boulot, il ne l’embrasse pas à pleine bouche. Il ne lui offre aucun cadeau matériel (qu’elle pourrait garder) mais des séjours à Venise, des voyages etc. Quand ils ont fait l’amour, il lui tourne le dos et s’endort aussitôt. Bref, elle a un mari parfait qui gagne très bien sa vie, qui l’a épousée malgré son niveau social modeste, qui s’occupe parfaitement des enfants et des fêtes d’anniversaires de ceux-ci, qui leur fait des gâteaux, qui est fidèle même s’il dévore d’autres femmes des yeux, qui est beau. Ils ont une très belle maison et des amis formidables mais… elle n’est pas si heureuse qu’on le croit.
D’ailleurs, à chaque fois que son mari commet une faute, elle le note dans son carnet et lui attribue une peine, genre elle lui cache son portefeuille ou ses clés de voiture, ne l’embrasse pas pendant trois jours etc… Le meilleur de l’histoire, c’est qu’elle le trompe. Non qu’elle ait particulièrement envie d’un autre homme, quoique ça change, mais à chaque fois, son mari lui fait l’amour comme s’il flairait un danger.
Bon. J’entends partout dire que c’est roman hilarant. Non, pas vraiment. Il est même parfois répétitif et nous ramène dans les années cinquante aux USA où les femmes devaient être  parfaites, soignées, avec la bonne couleur de cheveux, la robe qu’il faut, le maquillage adéquat. Au second degré, c’est assez drôle surtout que… l’épilogue est totalement inattendu : c’est la vraie trouvaille du livre. C’est un premier roman, tout est pardonnable !

Mon mari de Maud Ventura, 2021 aux éditions de l’Iconoclaste. 360 pages, 19 €

Texte © dominique cozette

 

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