Pour les mohicans, le cow-boy s'appelle Val.

Denis Robert est un de mes héros préférés. Son courage dans sa lutte contre Clearstream qu’il a fini par gagner après 10 ans de misères, saisies, pressions, mensonges, procès etc… m’a bluffée. Et ses livres, je les déguste.
Voici le dernier, un récit, Mohicans. C’est quoi ça ? Les derniers des Mohicans de l’épopée Hara-Kiri/ Charlie. Un jour, Denis Robert s’est pris de nostalgie en constatant que les jeunes journalistes ne savaient pas qui était Cavanna, au pire le confondaient avec Kavannagh, l’humoriste canadien.  Ignoraient  que l’auteur des Ritals, avec son pote Choron, avait créé l’organe de presse le plus subversif, le plus fort de notre (de ma) génération. Aucun journal ne ressemble à ce qu’a été le journal bête et méchant — interdit plusieurs fois —  aucun dessinateur de presse aujourd’hui ne peut dénier l’influence de cette bande de purs farfelus plus ou moins anars dans leur inspiration.
Moi qui ai connu la naissance de cette feuille jubilatoire, à la quelle je n’ai pas toujours adhéré car il faut bien dire que l’humour potache ou misogyne n’est pas ma tasse, ça me désole tout autant.
C’est ça, la nostalgie de Denis Robert, affligé par ce qu’est devenue cette entreprise qui a toujours   défendu bel et ongles la liberté d’expression, puis dévastée par des imposteurs, des vautours, des charognard (c’est moi qui dis ça, pas Denis Robert), des gens sans vergogne qui ont sucé le sang de ces créateurs de génie pour ensuite écraser leur coquille vide. Ces gens qui, à force de faire le tour des plateaux télé ont fini par s’approprier ce qui a été créé, alors qu’ils n’étaient même pas nés. Ces arrivistes, petits marquis, suceurs de potentats pour devenir potentats.
Denis Robert, qui a réalisé un film sur Cavanna juste avant sa mort trouve ça injuste. Cavanna, super écrivain, bricoleur de génie, gentil géant gaulois,  et Choron, un peu plus filou, un peu plus marlou, qui s’est sabré tout seul, escroqués par des profiteurs !!! Comme ça arrive tout le temps, notez. Parce qu’ils sont des poètes, qu’ils ont l’esprit ailleurs que dans la raie du porte-monnaie, parce qu’en signant des papiers à la con, ils font confiance à un avocat qui se prétend leur ami. Et qui joue double jeu.
Denis Robert est un écrivain de confiance. Il cite ses sources, il explique pourquoi, il raconte par le menu, il donne des liens pour qu’on puisse vérifier. C’est un journaliste de fond. C’est pourquoi son livre est passionnant. C’est pourquoi celui qui se sera élevé sur les cadavres des moribonds, en se faisant un pognon fou, terriblement obscène (ah, mais bien sûr, pas illégal…), on ne peut pas lui pardonner. Pourtant, c’était un comique à ses débuts. Un drôle. Beaucoup moins drôle lorsqu’il a pris la tête du journal (un patron assez pourri, avec sa garde-chiourme, ses interdictions, ses humiliations qui a viré Siné, ne l’oublions pas). Et encore moins drôle lorsqu’il a dirigé France Inter. Et vous savez quoi ? C’est Cabu, le gentil, qui a fait rentrer ce loup dans la bergerie.
Denis Robert n’aura jamais réussi à comprendre comment le gentil Cabu (et bien d’autres) a pu se rallier aveuglément à Val contre ses amis. Et pourquoi tous (à part Charb et Riss qui étaient actionnaires) lui ont laissé la plus grosse part du gâteau.
Et surtout pourquoi  Cavanna s’est laissé faire, ne gagnant plus que des nèfles, une maigre pitance limite charité en se faisant tondre (il touchait 0,44% sur les ventes contre 60% pour Val. Cherchez l’horreur).
Val vient de sortir aussi un bouquin sur Charlie. A votre avis, qui, de Denis Robert ou de Philippe Val voit-on tourner en boucle sur les plateaux ?
A la fin de l’article en lien ici 6 minutes de radio avec d’une côté Denis Robert et de l’autre Philippe Val.

Texte © dominique cozette.

Mohicans de Denis Robert aux éditions Julliard. 2015. 303 pages, 19,50 €

L’année 65 racontée à mes blecteurs*

En 1965, ça pète de partout ! Ouille-ouille ouille !
Ça pète sur le Viet-Nam, que bombardent allègrement les Etats-Unis, et dans les rues de New-York avec les manifestants contre cette guerre inique. Ça pète entre l’Inde et le Pakistan, ça pète sous le Mont Blanc pour finir d’ouvrir le tunnel, ça pète à Harlem pour ce pauvre Malcolm X, bing, t’es mort ! et aussi à Paris pour ce pauvre Ben Barka, bang, terminé.
Ça pète de joie chez les Françaises qui, tenez-vous bien jeunes femmes d’aujourd’hui ! sont autorisées à ouvrir un compte en banque, à travailler et à gérer leur bien sans que leur mari ait son mot à dire !!! Oui, oui oui ! Même s’il est contre, d’ailleurs : couché, le mari ! Ce qu’essaie de dire Sylvie Vartan au sien, de mari tout juste épousé, qui est plutôt du genre à découcher !
Ça pète sec chez les grenouilles de bénitier qui s’offusquent de ce qu’on autorise la messe en français. Et ça pète pas très haut, niveau commentaires, devant  la mini-jupe qui est de sortie dans la rue. Visionnez les incroyables réactions des réacs de l’époque à la Gaminerie du boulevard Saint Germain, ça vaut son pesant de baffes.
En revanche, ça pète très haut dans l’espace. C’est la guéguerre entre l’est et l’ouest ! Le premier à sortir « dehors » avec son cordon ombilical est le cosmonaute Leonov, suivi trois mois plus tard par l’astronaute White. Nous, en France, on lance un petit truc, une chtite fusette,  j’sais plus quoi.
Sinon et à part ça, de Gaulle est le premier président français élu au suffrage universel, à 55% des votes contre François Mitterrand qui traite sa politique de dictature. Le Royaume Uni suspend la peine de mort pour cinq ans tandis que les minettes se dessinent des cils sous l’œil et des taches de rousseur sur les joues. Trop cute !
Monod et Jacob reçoivent le prix Nobel de médecine et Kodak lance le Super 8 pour les amateurs.
Côté lettres, ça pète le feu du côté d’Hara-Kiri, le journal bête et méchant, qui lance son édition livres avec quatre auteurs-phares : Cavanna, Wolinski, Gébé et Topor. Sortent aussi, outre les K. Dick, Calvino, Updike attendus, la Chamade de Sagan et l’immarcescible succès de Perec : Les Choses (que je vous conseille de relire).
La plus grosse panne d’électricité des temps frappe 30 millions de personnes à New-York dont 800 000 bloquées dans le métro. Combien de bébés neuf mois après ?Je pose la question.
Nous, on a l’EDF qui alimente nos télés et on se régale avec une émission iconoclaste, Dim Dam Dom, et quelques feuilletons pas piqués des vers : Belphégor avec Juliette Gréco, Belle et Sébastien — non, ce n’est pas un groupe mais une fille et son chien — Max la Menace ou comment téléphoner de sa chaussure quand le mobile n’existe pas, et les Saintes Chéries ou les premiers pas de madame la Bourge qui veut s’émanciper des clichés qui l’étouffent (femme au volant, mort au tournant, ce genre).
Le film français pète la forme avec d’inoubliables succès  defunesques tels le corniaud et le gendarme à New-York .
New-York où B.B. qui n’a jamais pété plus haut que son beau cul parce qu’elle n’en avait pas besoin, débarque avec le succès que l’on sait pour la promo de Viva Maria. New-York encore qui offre  deux James Bond pour le prix de deux :  Goldfinger et Opération Tonnerre. Mais en France, on n’est pas de reste avec deux Godard : Alphaville et Pierrot-qu’est-ce que j’peux faire – Le-Fou. Les palmes azuréennes vont à Richard Lester avec « le knack… et comment l’avoir ». Très dans le vent !
Une grande dame se la pète mais elle a bien raison avec « seulement » quatre pièces de théâtre dans la même année, et dans les plus belles salles de Paris : Marguerite Duras !
Ça pète encore plus fort dans les baffles avec Satisfaction (Stones) Vs Help (Beatles). La Reine, sensible à leur image propre sur soi, décore les quatre chevelus à cravate. A part ça, c’est l’explosion des groupes anglo-saxons que nous connaissons tous : The Doors, Loving Spoonful, Herman Hermit, Kingsmen… Un ovni : James Brown avec son père qui arbore son  brand new bag, enfin qui montre plutôt comme il est loin d’être ringue car il connaît toutes les danses de ses morveux de kids.
Tandis que nous en France, on a Capri c’est fini et Aline pour qu’elle revienne, et même si tu revenais, de l’Egyptien blondinet à ressorts, le folkore américain de miss-aux-couettes, les mains sur tes hanches du gendre idéal italo-belge, l’amitié — pour remonter le niveau —  de la belle grande tige dont Dylan et Jagger sont amoureux, mais aussi l’immense succès de la Petite gainsbourrette, poupée de cire. Mais hélas, hélas, hélas, on subit pour la première fois la fausse Piaf à la coupe au bol qui vient de remporter le crochet à la télé, sans imaginer que c’est elle qui nous fera entrer, quarante deux ans plus tard et de façon calamiteuse, dans la beaufitude sarkozienne et sa constellation de bouffons (je m’égare) !
En 65, il y aura des naissance : Emmanuelle Béart, Philippe Torréton, Step de Monac, Beigbeder, Bjök, Rachida Dati, Barouin. Ah, j’allais oublier le plus important : Pascal Obispo !
Sont partis en 65 le bon docteur Schweitzer pour qui minuit  sonna au clocher de Lambaréré. Mais aussi Winston Churchill, Nat King Cole, Somerset Maughan, le Corbusier et Stan Laurel.
Quant à moi, hé bien, les garçons, les chansons, le bac, la fac et … aucune conscience politique. T’façon, j’étais mineure !

Pour voir ou revoir les années précédentes : L’année 64 ici

Texte © dominique cozette / Photo © pour M.A.T, toutes dans une caisse et hop ! (pull Mayfair si ça dit quelque chose à quelqu’un)

* Blecteurs = lecteurs de mon blog

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