La servante écarlate, le livre…

Ne connaissant ni le livre ni la série (personnifiée par l’excellente Elisabeth Moss), je suis entrée dans l’histoire sur les conseils d’une proche. Je sortais à peine d’un livre très dur (voir article précédent) et me voilà plongée dans une ambiance presque pire, enfin différente mais jamais, jamais confortable. La Servante écarlate de Margaret Atwood est une dystopie très dérangeante pour la femme que je suis : les femmes qui y vivent sont soit les épouses stériles des Commandants, hommes faisant partie de l’élite, soit les femmes de services, cuisinières etc, soit, surtout, les servantes vêtues de sortes de cache-corps avec cornette cache-visage, le tout de couleur écarlate. Elles on été capturées car possiblement fécondes dans une époque où plus personne ne l’est. On a peut-être volé leur enfant pour le donner à un couple, en tout cas, elles sont emprisonnées dans cette maison, n’ayant pour unique rôle que de procréer. Pas de lecture, pas de loisirs, rien pour écrire, pas le droit de converser même si on peut échanger quelques brèves hors surveillance. Certaines se sont évaporées, on ne sait pas si elles se sont suicidées, si elles ont fui, si elles ont été exécutées. Les châtiments corporels sont féroces. Parfois se balancent quelques pendu(e)s coupables d’avoir transgressé les règles. Aucun sentiment n’est permis, aucun plaisir non plus, même et surtout lors du coït (la cérémonie cela s’appelle) où l’épouse se pose sur la servante pour simuler une insémination conjugale.
Il est possible de tricher : un médecin propose à notre héroïne de l’inséminer, comme d’autres l’ont fait. C’est passible de mort. Et puis, comme partout où la discipline est d’airain, on filoute les règles, on triche, on va où il ne faut pas, dans un endroit des plaisirs formellement interdit, mais connu de presque tous. Le style lui-même est factuel, froid.
C’est un livre qui met très mal à l’aise, un livre inhumain où rien de bien ne peut advenir car si le bébé arrive, il est aussitôt confisqué. Aucun affect n’est possible, la prison se construit irrémédiablement à l’intérieur des êtres.  Seule préoccupation positive : regagner sa liberté. Est-ce seulement possible ?

La Servante écarlate de Margaret Atwood au Pavillon Poche de Robert Laffont. Traduit par Sylviane Rué. 524 pages. 11,50 €.

Texte © dominique cozette

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