Très courtois, Nicolas Fargues !

En effet, la courtoisie qui fait partie de son titre — la ligne de courtoisie — c’est l’extrême obligeance d’un écrivain à faire court quand il n’ a rien à raconter. De faire court et stylé. L’exercice de Fargues est époustouflant. Certainement très agaçant pour d’autres qui peuvent allègrement critiquer son ampoulage et ses affèteries mais c’est drôle, tellement la caricature est forcée.
Je ne sais pas si ce bouquin est bon, je ne crois pas, franchement, mais il m’a bien distraite en ces temps où on se fout des torgnoles à travers la tronche, où on se bourre-pif de sondages croisés et où on s’injurie à longueur de chroniques, de twitts et de temps de parole.
Chez le beau Nicolas Fargues (ben oui, il est beau), on retrouve la vraie vie, c’est à dire la vie chiante et morne d’un écrivain solitaire au creux de sa vague, maniaque de la propreté, qui décide de s’installer (fuir) à Pondichéry quelques temps. Juste avant, il organise un dîner d’adieu pour ses proches qui n’en ont rien, mais rien, à foutre ! Son fils est le prototype de certains petits cons d’aujourd’hui, mou du canapé, lâche et fuyant. D’ailleurs, la lâcheté est une des seules choses transmises par le père qui ne veut jamais de vagues, qui se fait donc gentil avec tout le monde pour ne pas déplaire… Il y a la fiancée du fils, une pétasse à bustier et yorkshire, son frère — avec femme ethnique très douce —  toujours aussi critique surla vie stupide que mène le héros, alors que lui, avec son job sûr … Sa fille, bof bof etc…
Le lendemain, même punition avec son éditeur, chaleureux au temps des succès. Quant à ses parents, des petits étriqués, naturellement. Banal, certes, mais les portraits sont super léchés, jusqu’à la bave.
Parti en Inde où il affronte l’adversité d’un endroit inconnu où il se fait avoir dans les grandes largeurs, il revient en trombe pour un problème de pension alimentaire qui promet de peser lourd sur son avenir d’auteur sans idées… C’est dans un bureau de poste qu’il ose enfin se rebeller … bref espoir d’une vie peut-être meilleure.
(La ligne de courtoisie est le trait tracé sur le sol pour se tenir en retrait devant certains guichets).

La ligne de courtoisie par Nicolas Farges chez P.O.L. 2012. Imprimé en 2010 (???) dans l’Orne. 166 pages écrites gros.
Texte et dessin © dominique cozette

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