Le mariage vert

Fifi, de sa belle voix grave, aime railler le mariage gris inventé par un cerveau ayant dépassé sa date de péremption.  Pour mieux vendre sa création personnelle et originale : le mariage vert. Dans sa grosse multinationale où il coule des jours heureux, il a expérimenté avec succès un premier stade de développement durable du couple en proposant le covoiturage à de jeunes personnes bien mises et sentant bon le thé vanille. Cette opération durait le temps que durent les roses, une petite semaine, ses conquêtes demeurant en général très loin de son point de chute, un loft avec terrasse dans le beau XIIème. Lui vint alors une meilleure idée de recrutement de chair canon à canoniser de suite dans sa crypte douillette : leur proposer la botte, alias le mariage vert. Le mariage vert, c’est une façon de fiançailles qui commencent par une parade amoureuse de bon aloi : préparation d’un dîner fin au piment d’espelette (l’ingrédient tombe-filles) arrosé de Sangue d’Oro, le vin fait à la main et sans électricité par Carole Bouquet soi-même, exceptionnel, rare, qui coûte la peau des yeux. Mais hélas, le caviste n’en a pas forcément ce soir-là alors on se rabat au dernier moment sur une petite récolte de chez Nicolas. C’est l’intention qui compte, n’est-ce pas. Puis arrive la cérémonie proprement dite au son d’une musique folklorique irlandaise, le nouveau Renaud peut faire l’affaire, où Fifi le romantique déclame une sorte de flamme à la beauté qui ne demande qu’à entendre ce discours. Appuyant son fantasme d’un imparfait amour sur les mérites écologiques d’une cohabitation quasiment fusionnelle. Sauf que comme lui, elle a juste envie de baiser et basta. La couche de l’homme est fraîche, ses préservatifs sentent le foin à moins que ce ne soit un joint qui  s’allume discrètement, l’accouplement peut avoir lieu. Puis la nuit se passe normalement, avec de nombreuses émissions de méthane de la part de l’amant roots, qui, de plus ronflera comme un sourd jusqu’après que la jolie fleur, ensuquée, décide de ne pas donner suite et de repartir vers un célibat plus reposant.

Texte et dessin © dominiquecozette

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