On m’appelle monsieur Préluminaires, je ne sais pas pourquoi. J’éteins toujours pour faire l’amour, je n’allume pas de bougie ni de veilleuse, j’aime bien être dans le noir total, je ne supporterais pas qu’on me regarde en train de faire « ça ». Parce que je m’applique. Et quand je m’applique (à peindre, à écrire, à dessiner), je fais une sale tête, on me l’a dit maintes et maintes fois. Une sale tête qui évoque le sérial killer, m’a t-on dit. Comme si j’avais envie de tuer la personne avec qui je suis en cheville.
Oui, en cheville est le mot car je m’occupe en premier de ses pieds. Je suis un fétichiste du pied, entre autres. Il faut du temps pour embraser un pied. Et il y en a deux. Ensuite, je passe aux creux poplités, les chairs tendres derrière les genoux. Puis je saute aux oreille. Les oreilles, c’est complexes, extrêmement érogène et très inervé. Beaucoup de temps aussi même si je n’en fais qu’une sur les injonctions de la personne qui brûle déjà de finir.
Mais je n’en suis pas là. Il me faut la nuque et les aisselles. Les aisselles ! Un spot de choix. Bon, les classiques seins, tout le monde connaît, le nombril, puis les reins et le haut de la raie. Le haut de la raie est une spécialité régionale mise au point par monsieur Larêt sur sa maîtresse Aude. A ce qu’on dit. Ensuite on en arrive à la banlieue des parties génitales proprement dites, il y a à faire croyez moi. Disons que deux heures sont déjà passées avant que je ne m’attaque au clitoris qui, comme chacun sait, nécessite un soin exceptionnel. Très souvent, lorsque je suis sur le point de m’introduire dans la personne, la personne est profondément endormie. Alors je ressors, me lève, sors de la chambre, allume la télévision et regarde un film de Martin Scorsese ou de Claude Zidi. Ça dépend de mon humeur.
Texte et peinture © dominiquecozette
Si vous voulez voir ce tableau en grand, il sera exposé avec tous les autres à l’Aiguillage, la galerie des Frigos, du 26 mai au 12 juin. Plus de détails ici.