Les furies, roman préféré d'Obama !

Je vous ai parlé de Lauren Groff récemment à l’occasion de la sortie de ses nouvelles sur la Floride (lire ici). Encouragée par le Masque et la Plume, j’ai eu envie de lire les Furies et voilà, c’est choses faite. Un excellent roman très tendu, très musclé, d’une lexicographie incroyable  — merci la traductrice — et d’un fourmillement d’anecdotes stupéfiant. Il faut se concentrer pour ne pas oublier le déroulement de l’histoire qui se scinde en deux parties très nettes : la première et la deuxième, ha ha ha ! Pourquoi ? Parce qu’il y a mort d’homme à la fin de la première. Les Furies narre les relations fusionnelles entre deux personnages hors du commun, très grands en taille tous les deux, et charismatiques. Ils nous sont présentés ensemble, à l’âge de 22 ans, juste après un mariage discret et avant une scène de sexe, discrète aussi au niveau de la description mais brûlante, comme il y en aura tant dans le roman. Ils s’adorent, font l’amour tout le temps mais c’est elle, Mathilde, qui s’occupe de tout. Lotto, de son vrai prénom Lancelot, paresse dans la vie, sa mère étant richissime mais vivant cachée depuis son veuvage. Ensuite, Lauren Groff déroule la genèse de leurs existences, lui dans une famille riche mais rongé par l’acné, baisant à tout rompre toutes les filles, elle, rejetée par ses parents pour avoir poussé son petit frère dans l’escalier qui en est mort, pestiférée, ayant connu de grosses difficultés. Coup de foudre puis mariage puis vie de bohème car la mère de Lotto ne lui file pas d’argent pour cause de mauvais mariage. Fêtes, amis, alcool, drogues… Dans ce déluge de plaisirs étourdissants, elle réussit à cadrer cadrer et motiver son mari car il a du talent, elle en est sûre. Et bim, ça marche. Il devient un célèbre dramaturge envié de tous, invité partout, désiré par toutes. Mais il est fidèle. Jusqu’au bout. Et elle ? Elle le sert, elle l’attend, elle le baise, elle le nourrit, elle corrige la nuit ce qu’il a écrit le jour, elle le regarde avec avidité. Et boum ! Un événement se produit qui clôt la première partie.
Alors ? Hé bien l’histoire est re-cacontée. Les satellites qui tournent autour de ce couple lumineux se dévoilent, la passion n’est plus la même et jusqu’au bout, au bout du bout, des tiroirs vont s’ouvrir pour redistribuer les rôles  qui ne sont pas du tout ceux qu’on imaginait. C’est glaçant,  c’est incroyable, c’est horrible, c’est formidable ! Je n’en dirai pas plus. Ah si : sacré bouquin !

Les Furies par Lauren Groff. Titre original Fates and furies, 2015. Chez l’Olivier en 2017. Excellemment traduit par Carine Chichereau. Editions  Points, 524 p. 8,50 €.

Texte © dominique cozette

Une autre Floride

Lauren Groft, dont le roman « Furies » fut adoubé par Barak himself qui en fit son préféré, sort Floride, un recueil de formidables nouvelles ou plutôt de tranches d’ambiances tempétueuses. Tueuses ? Oui car ce qui se passe dans ces moment arrachées à cette terre qu’on croit paradisiaque, c’est un enfer, l’enfer de ceux qui n’ont pas les moyens de se protéger de la nature hostile, mouvementée, cruelle et glauque. Des portraits de femmes très à la hauteur mais débordées par les événements, les hommes ou les enfants, des fillettes abandonnées dans la sauvagerie d’un biotope effrayant, un œil de cyclone qui lorgne dangereusement sur une autre qui n’a pas réussi à sauver son voisin ou sa maison. Des choses assez marrantes involontairement quand le récit se situe en France avec des « salades de homards » dégustées vite fait dans une cafèt de Monoprix, si, si…, les vacanciers résidant en Champagne.
Un autre plus réaliste se situe à Yper, vers Etretat, où la mère de deux jeunes garçons vegans a choisi de passer l’été pour fuir la fatale saison humide de Floride. Elle vient visiter les lieux de son écrivain préféré, Guy de Maupassant, elle écrit une thèse sur lui mais elle finit par le détester à cause de ses mœurs dissolus non respectueux des femmes, tout en se nourrissant de bourgogne pas cher acheté à l’épicerie du coin, deux litres chaque soir.
Dans cet étourdissant voyage au bout de l’envers du rêve, on côtoie toutes sortes de bêtes toxiques, serpents, alligators, insectes de toutes sortes, chats sauvages, et des marais qui puent et renferment une faune pestilentielle, et des pluies incessantes, des cyclones, une nature écrasante que l’on aime(rait) bien fuir. D’où la France.
C’est un vrai plaisir de découvrir ces nouvelles, moi qui n’aime pas le genre,  car l’écriture est formidable, le vocabulaire très riche et les personnages intrigants et attachants.

Floride de Lauren Groft, 2019 aux éditions de l’Olivier, traduit par Carine Chichereau. 300 pages, 22,50 €.

Texte © dominique cozette

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