Ör, un bon roman islandais avec trois Güdrun

Ör est le cinquième roman de l’Islandaise Audur Ava Olafsdottir. Elle a un nom bien de chez elle et un style qui me ravit quand j’y glisse l’oeil. Ör raconte l’histoire de Jonas qui en a tout simplement marre de la vie. Il ne s’emballe plus pour rien, il n’a pas touché de femme depuis longtemps, sa mère Güdrun est gâteuse et en bonne santé, sa femme Güdrun l’a quitté en lui annonçant que sa fille bien aimée Güdrun n’est pas de lui mais de celui qu’elle fréquentait à leurs débuts. Il n’a pas vraiment d’amis, alors il va chez son gentil voisin, qui lui fait un gâteau, et lui demande de lui prêter son fusil. Pour se suicider. Mais il répugne à l’idée que c’est sa fille qui peut le trouver. Il réfléchit à se pendre, idem.  Eurêka, se dit-il, le mieux n’est-il pas de se rendre dans un pays en guerre où la mort arrive n’importe quand. Il laisse tout en plan, même son portable mais embarque sa petite boîte à outil car il faudra peut-être fixer un crochet pour s’y prendre.
On le retrouve dans ce pays où vient d’être déclaré le cessez-le-feu. Il avait réservé dans un hôtel qui était mieux en photo, forcément, c’était avant. C’est un frère et une soeur plus son petit gars qui tiennent l’hôtel de la tante, morte. Il n’y a rien dans cette ville dévastée, les commerces sont vides, pas de resto, rien.
Il se donne quelques jours pour mettre son projet à exécution mais il commence à se rendre utile avec sa petite boîte à outil. Et puis il aime bien les gens de l’hôtel. Bref, que va-t-il se passer ensuite ?
Je ne dis pas que le suspense est insoutenable. Mais ce texte est original, assez poétique, l’homme est attachant et l’histoire aussi. Tout ce qui a trait à la guerre est impressionnant. Le lieu n’est pas précisé, je pensais à la Serbie sauf que l’hôtel est au bord de la mer. C’est sûr que les touristes vont mettre un certain temps à revenir s’y baigner.
Les deux autres livres, très bien,  que j’ai lus d’elle sont sur ce blog.

Ör de Audur Ava Olafsdottir aux éditions Zulma. Traduction de Catherine Elyoffson. 242 pages, 19 €

Texte © dominique cozette

Un livre à l'eau de rose, la bonne

L’Islandaise Audur Ava Olafsdottir (j’ai simplifié au niveau des petites barres ou accents sur les lettres !) nous tient en suspens avec une histoire toute simple et toute charmante dans son dernier opus traduit en français : rosa candida. Oui, bon, c’est du latin mais on ne le perd pas en se plongeant dans ce récit car, pour une fois, les prénoms sont sexués. La fille s’appelle Anna, la petite fille Flora Sol.
Le héros est un jeune homme orphelin d’une mère aimée, qui vit harmonieusement avec son père et partage ses week-ends avec son jumeau (faux), sorte d’autiste sage.
Un soir de fête, il couche avec Anna et l’histoire s’arrêterait là si Anna venait lui annoncer, dans pathos, qu’elle est enceinte. C’est une petite fille tout ce qu’il y a de chouette, qui fait ses nuits et sourit tout le temps. Le jeune homme lui rend parfois visite. Sans plus. Puis il décide de ne pas faire les études que son père lui préconise. Il adore les jardins et les fleurs alors il part dans un autre pays s’occuper du jardin célèbre d’un monastère dont personne ne s’occupe. A part le fait qu’il n’a pas l’occasion de la moindre sexualité, il s’adapte à merveille et, avec le moine cinéphile, dévore des cassettes en VO sans sous-titres chaque soir. La façon qu’a trouvée le moine d’apprendre la vie.
Puis un jour, Anna se pointe avec la petite qui a 9 mois. Elle demande au garçon de la garder un mois le temps qu’elle rédige son mémoire sur la génétique. Et elle reste chez lui, finalement. Et entre eux se tissent des liens dont il ne sait pas quoi penser. C’est toute l’histoire du livre. C’est joliment écrit, le jeune père se prend les pieds dans ses sentiments et son désir, la petite fille, surdouée, nous enchante et Anna, dans ses livres, regarde tout ça distraitement. Que pense-t-elle ?
Beaucoup de questions sur la vie, l’amour, la mort, la religion jalonnent le livre qui n’est en fait qu’une longue interrogation sur le sens des choses. Mais c’est  ce n’est pour autant pas une prise de tête, chacun peut y cueillir sa fleur.
Un livre tendre comme ça, ça fait du bien, c’est moi qui vous le dis.

Rosa Candida de Audur Ava Olafsdottir chez Zulma.  2010 pour la traduction française, 2007 pour la VO. 264 p. 8,95 €

Audur ava olafsdottir nous interroge sur le couple.

L’exception d’Audur Ava Olafsdottir (je vous fais grâce des accents et des barres sur les lettres) est un roman troublant et d’un style très cut, très agréable. Pas de mélo pour cette histoire qui en est un. C’est la Saint Sylvestre, le champagne pète et c’est le moment que choisit un tendre époux pour annoncer à sa douce femme qu’il va vivre différemment, avec un homme, son collègue de bureau. Ils ont vécu onze ans de façon exemplaire pour tous les autres, il a était un mari hyper attentionné, un amant prévenant et un père formidable. Leurs jumeaux, un gars et une fille, on 2 ans et demi. Et arrive enfin la lettre leur annonçant que l’enfant adoptif — un projet entrepris des années auparavant — les attend à des milliers de km d’ici, de l’Islande.
Il est homosexuel mais ça ne l’a pas empêché de tomber sous le charme de cette belle jeune femme que tout le monde aime, voulant essayer de construire une famille et y réussissant. Seulement voilà, l’amour a frappé à nouveau sous les traits du collègue, et bien qu’il ne se soit jamais privé d’aventures avec les hommes. Pas mal d’hommes.
Ce livre nous livre sans pesanteur les interrogations que peuvent se poser une femme dans ce cas. Remettant sa mémoire en route, elle revit leur relation et s’aperçoit qu’effectivement, elle aurait pu voir, si elle y avait pris garde, que son mari aimait bien les hommes. Elle restera la (seule) femme de sa vie, il continuera d’être charmant avec elle, de s’occuper des enfants, mais elle restera seule.
Et puis, coup du hasard, le père biologique de cette femme désirera la rencontrer. L’aventure sans lendemain de sa mère avec un étranger aura des lendemain pour le moins inattendus.
C’est un livre tout ce qu’il y a de plaisant, avec ses personnages bien campés, sa psychologie précise et sa touche de neige dans les longues nuits d’hiver de ce pays étonnant.

L’exception d’Audur Ava Olafsdottir aux editions Zulma, 2012. Et 2014 pour la VF par Catherine Eyjolfsson. 340 pages, 20 €.

Texte © dominique cozette

 

 

 

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