Par où commencer ?
Par août commencer.
Août 1949.
Petite famille en bord de Marne à Joinville-le-Pont Pon-pon
le papa, la maman et las chiquidinas *
la petite toute neuve dans les bras, moi celle du milieu,
et la grande très sérieuse.
Plus loin, les guinguettes, chez Gégène, on y va souvent,
les couples endimanchés qui virevoltent
le petit gros à moustache et la grande maigre… aussi !
au son joyeux de la musette et du pied d’plomb du batteur.
Une guenon enchaînée dans le marronnier tire les queues de cheval,
les vélos rigolos tournent autour de la piste avec des selles dos à dos
des roues ovales, des pédales impossibles,
des guidons sous les fesses, ça rigole et ça tombe.
Les frites et les saucisses et le gros rouge sur les nappes à carreaux.
Nous on a un kayak, on se baigne dans la Marne aux fragrances de vase.
J’aimerai toujours ce parfum de misère.
La très grosse boulangère s’appelle madame Prompte
la boucherie est chevaline près de marchand de couleurs
quel beau métier !
mon père fume des Disque Bleu
et conduit une 4CV Renault 2515 BV 75.
Dans l’épicerie des Martin, pas encore rachetée par Ahmed,
une seule marque de yaourts en pot de verre
des petits suisses, des petit-beurre et les sucettes Pierrot Gourmand.
Les patates moches sont maculées de terre,
comme la barbe des poireaux, tout est bio.
Mon père tape do/fa sur le piano en chantant ils ont des chapeaux ronds
c’est archi-faux et ça fait rire : l’homme s’amuse.
Les touches do/fa restent à jamais tachées de nicotine.
Ma mère ne joue rien mais elle chante toute la radio,
et ma grand mère martèle la Marche Turque.
Je n’en garderai que de bonnes séquelles.
- souvenir de la chanson de Henri Genès : Tantina de Burgos
https://www.youtube.com/watch?v=48rhXGNzH7Y
Après notre divorce, G. m’avait volé mon album photo, retrouvé dans sa cave après sa mort. Les photos étant moisies-pourries, je les ai coloriées pour ne pas les jeter. Mon ex AD m’a conseillé « d’en faire quelque chose »… (à suivre)
© image et texte dominique cozette