Lionel Duroy et l'absente

Si, comme moi, vous vous passionnez pour la vie racontée de Lionel Duroy, cet écrivain qui triture son histoire et celle de ses étranges parents ayant mis au monde 10 enfants qu’ils n’avaient pas les moyens d’élever, ce livre paru cette année, L’absente, vous ravira. L’absente, c’est sa mère. Sa foutue mère qu’il a toujours détestée et qui le lui a bien rendu. Il l’a toujours trouvée moche et se demande comment son père, Toto (un petit nobliau qui vend des Tornado) peut être aussi amoureux d’elle, même quand elle devient folle d’avoir été déchue de sa caste, chassée manu militari de son chic appartement de Neuilly pour être relogée dans un « taudis » d’une sale banlieue prolo, indigne d’elle.
Donc ce livre trouve notre auteur en complète capilotade, totalement éparpillé dans sa tête comme dans sa vie : Esther, son dernier amour, s’est barrée avec leurs deux enfants, il a été obligé de vendre et de vider leur maison en pleine campagne, en province. Le jour du déménagement, il a enfourné dans sa vieille voiture tout et n’importe quoi : photos, jouets d’enfants, dossiers, livres, vêtements etc, en vrac. Le reste est allé au garde-meuble. Il ne sait que faire, ou aller. Il s’installe dans un petit hôtel de l’est où une libraire fan amoureuse excessive de lui le reconnaît et s’y accroche, contre son gré. Pendant son road-trip lui vient l’idée de faire le livre sur sa mère (ses parents sont morts depuis longtemps, il est fâché avec toute sa famille à cause de ses livres).
Pour cela, il fuit l’est et s’en va près de Bordeaux, un château où toute la famille très riche de sa mère vivait, en grands bourgeois. Et dans laquelle vivait aussi une magnifique cousine dont il était follement amoureux et qui l’aimait bien. En faisant le tour du parc, il est surpris par un cousin et lui raconte un bobard pour pénétrer dans le château, se faisant passer pour un bricoleur (ce qu’il est). Il découvre avec tristesse que la cousine est morte après un mariage, un divorce et une vie à s’occuper de petits orphelins indiens. Il découvre aussi des secrets de famille et l’énorme histoire que sa mère a vécue dans sa jeunesse et qui lui révèle enfin pourquoi elle a épousé Toto, si peu en accord avec son rang, et pourquoi elle est partie de Bordeaux. C’est énorme quand on suit l’histoire et il raconte très bien cette épopée, tandis que la libraire de l’est de la France est venue le rejoindre et commence à le rendre amoureux. Et surtout, comment une cousine plus jeune du château l’a reconnu, car elle lit ses livres et suit ses interviews. Elle ne lui en veut pas de les avoir mystifiés et c’est elle qui le mettra en relation avec le vieil homme qui racontera sa mère, jeune et belle, ce qui le réconciliera avec cette femme dont il n’avait jamais découvert l’âme. Très beau livre.
C’est encore mieux si vous avez lu les livres sur son enfance, Priez pour moi (clic), Colère (clic), Le chagrin dont j’ai parlé dans ce blog.
Une video ou l’auteur parle de son livre ici.

L’absente de Lionel Duroy, 2016, aux éditions Julliard. 352 pages

Texte © dominique cozette

Les Fessebouqueries #329

Qu’est-ce qu’on s’est marrés cette semaine  ! D’abord nos rythmes circadiens fracassés sur le mur du temps, puis notre peur halloweenesque de la primaire LR mais ouf,  le brief était : surtout pas d’idées les mecs qui pourraient foutre la trouille aux électeurs, puis la terreur des parents d’enfants jeunes quand ils liront le prix Goncourt décerné à … une Arabe. Vous plaisantez, j’espère ! Mais non, pas du tout. D’ailleurs on va mettre des flics autour des librairies pour éviter l’amalgame. Trump, à côté, c’est de la pisse de chat. – De la pisse, quand même ! – Oui, mais de chat. – Certes, mais  ça pue grave. Tu l’as dit, Goofy. Une semaine, quoi.
– JB : J’ai bêtement voulu changer d’heure plus tôt que l’heure officielle et je me suis perdu dans une faille spatio-temporelle. Rdv marcredi 34 novobre à 89h58.
– ZPV : 2017 sera l’année du renouveau avec Trump, Erdogan, Poutine, Kim Jong-un et Sarkozy.
– LC : Astuce: Si l’année prochaine on s’y met tous, et qu’au lieu de bonbons on distribue des capotes, on peut éradiquer Halloween en 4 ou 5 ans.
– LF : Le Foll: « Hollande est un battant »…..un battant de la porte qu’il va prendre ou il est le bâton pour se faire taper dessus.
– AG : J’aime bien l’idée des légumes moches en conserve, mais je me demande à quel moment on est devenu assez con pour trouver des légumes moches.
– TK : L’heure d’hiver, cette arnaque qui nous fait perdre 1h de soleil et 3h de vie si tu tentes de régler l’horloge de ta voiture et de ton four.
– NP : Cette année pour Halloween je me suis déguisé en un truc qui fait super peur : un second tour Sarkozy-Le Pen.
– VE : De toute manière si Sarkozy perd aux primaires il faut que Juppé démissionne pour lui laisser la place.
– AB : On a trouvé un cerveau fossile de dinosaure vieux de 133 millions d’années ; contactée, Mme Boutin prétend que le sien est entier
– IV : Tous ces étrangers qui viennent manger le foie gras des français
– EM : Les Français mangent au MacDo, fêtent Halloween et regardent des séries américaines mais ont peur que des Syriens dénaturent leur culture.
– OV : – Ils ont donné le Goncourt à une arabe du coup je vais pas l’acheter.
- Tu l’achètes jamais. D’ailleurs t’achètes jamais de livre.
- Oui mais cette année je vais l’acheter encore moins. Bref, les fachos sont fâchés.
– ZPV : À tous les coups, les jurys du Goncourt et du Renaudot sont noyautés par le PS, les communistes, les protestants et les islamistes.
– ML : Le grand gagnant de cette primaire de droite, c’est Bayrou qui est au coin de sa cheminée ce soir, dans ses chaussons oranges et son canapé Henri IV, en train de se dire : « mais putain, qu’est-ce que j’ai fait ? »
– EM : La remontée de Donald Trump et Nicolas Sarkozy dans les sondages vous est offerte par le lobby mondial des fabricants d’anxiolytiques.
– KB : Résumé de ce Primaire-Le-Debat : 10 min sur Bayrou. 15 min sur le ni-ni. 20min sur l’islam politique. 1 min sur l’Éducation Nationale.
– HS : Je propose que tout enfant qui ne maîtrise pas la langue française à 10 ans soit abattu parce que c’est moderne. (Je tente une synthèse)
– TK : – Je veux 5 000 policiers de plus. – J’en veux 10 000! – 15 000 ET POUR 1 000 DE PLUS LA 2ÈME PIZZA EST OFFERTE. La-Primaire-Le-Debat
– JB : Il y a des gens qui se font tellement chier le samedi matin, qu’au lieu de se gratter les parties génitales en regardant des vidéos YouTube, ils vont faire du footing, des courses, ou s’arrangent pour travailler. C’est ça la France qu’on veut laisser à nos enfants ?
– OK : Bruno Le Maire : « Ma droite sait où elle habite ». Ca sent la contrepèterie …
– RR : Les Républicains veulent des flics, des prisons et des flingues. On attend la nomination d’un shérif.
– EM : Le CSA annonce le recrutement de 7000 intérimaires pour traiter les plaintes relatives aux émissions de Cyril Hanouna.
– JB : Je parie que, comme Hillary, Alain Juppé sera emmerdé par la DGSS pour avoir conservé illégalement des infos sur son Minitel.

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Que fœtus là ? #24

L’église catholique réprouve toute forme de contraception artificielle. Elle prône la méthode naturelle dont elle déplore qu’elle ne soit pas plus recommandée par le corps médical (qu’elle soupçonne d’être lié aux intérêts financiers des laboratoires). La méthode naturelle, c’est l’abstinence lors des périodes de fécondité, méthode aménagée par Dieu qui n’a pas jugé bon de rendre la femme féconde toute la durée du cycle. Cette méthode est assimilable à la vieille méthode Ogino, célèbre pour le  nombre d’enfants non désirés auxquels elle a permis de voir le jour  —  avec environ 75%  de fiabilité  —  appelés les bébés Ogino (Ogino était un gynécologue japonais).

« Que fœtus là » est une série où je m’interroge sur l’origine de l’humanité par le biais du fœtus : Comment es-tu arrivé là ? Qui t’a fait ? Où ? Pourquoi ? Comment ? Etait-ce par désir, par défi, par ignorance, de force, par conformisme, par habitude, par instinct de procréation, par esprit de domination, par accident ?… Cette extraordinaire banalité qu’est la procréation,  j’ai eu envie d’en savoir plus et de la partager. A suivre…(voir précédent article ici)
Texte et illustration © dominique cozette

Prendre le train avec Patti Smith

M Train est un livre flottant, oscillant entre rêverie, souvenirs, fantasmes, réalité et références arty et en même temps bourré de descriptions hyper précises du lieu, des odeurs, du goût des choses, des vêtements, de ce qui se passe chez elle, ce qu’elle donne à son chat, de l’environnement général, c’est fascinant le pouvoir d’évocation qu’elle possède dans son écriture qui a l’air de couler tout naturellement de son stylo.
Patti Smith s’habille toujours pareil. Son manteau (un vieux manteau noir effiloché et mité), son bonnet et ses bottes, passe un temps fou au café. Celui qui se trouve en bas de chez elle à New-York et ceux de toutes les villes qu’elle traverse, qu’elle visite, qu’elle peuple de ses visions. Elle traîne avec elle son inclassable appareil photo, polaroïd en noir et blanc et elle shoote avec discernement ce qui servira de support à ses souvenirs. Un jour, son manteau disparaître et il continue à lui manquer. Elle oubliera son polaroïd sur le banc de sa plage avant une tempête. Le café au bas de chez elle fermera à son grand regret. Les polas qu’elle a faites, parfaites, de la tombe de Genêt (je crois, ou Verlaine. Elle passe beaucoup de temps dans les cimetières) disparaîtront aussi. Elle oubliera son moleskine au café.
Elle raconte beaucoup de choses, grandes ou petites, simples ou littéraires, avec force détails. Elle dit comment elle s’est acheté une bicoque délabrée entre métro et bord de mer. Comment ils vivaient avec son mari musicien brusquement décédé, horaires farfelus, nourritures improbables, les voyages qu’elle entreprend pour visiter la chambre de Frida Kahlo, son amour des écrivains japonais dont elle va nettoyer/honorer les tombes lors de séjours-conférences. Des polaroïds de ses souvenirs agrémentent le récit.
Rien à voir, certes, avec Marguerite Duras, mais elles ont en commun la force qui les pousse à écrire, écrire, écrire, pour que rien ne se perde, filmer pour Duras, photographier pour Smith. Des artistes qui se fichent bien de l’image qu’elles renvoient mais qui ont la plume magique.

M Train par Patti Smith, 2015, traduit de l’américain par Nicolas Richard. Editions Gallimard en 2016. 272 pages imprimées en police Granjon. 19,50 €.

Texte © dominique cozette

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