J’ai d’abord été attirée par la couverture qui me rappelait mes années de lycée, les minuscules talons, la coiffure qui rebique, les bas qui plissent (la fille du milieu), le soutien-gorge pointu, l’allure un peu mal dégrossie d’une jeunesse qui ne se sait pas encore phénomène. Je ne connaissais pas cette auteure, Margaret Drabble, 75 ans aujourd’hui, qui a fait partie des gens ayant hebergé Rushdie au début de sa fatwa et dont c’est le 18ème roman.
Un bébé d’or pur nous conte, par la voix d’une amie de son groupe d’artistes, journalistes et intellos, la vie de Jess, Jessica, anthropologue complètement conquise par la pureté des enfants rencontrés au bord d’un lac d’Afrique dont les pieds et les mains, en pinces de homard, ne les empêchent pas de vivre tout à fait normalement. Sa vie de voyages d’études et de découvertes est lancée.
Puis, revenue à Londres, elle donne naissance à une petite fille, un bébé d’or pur qui charme tout le monde avec son sourire, sa gentillesse, sa facilité à vivre. Du pur bonheur. Jess ne dit pas qui est le père de l’enfant, on suppose que c’est son professeur à l’université, marié et plus âgé. Jess est tellement heureuse avec sa petite Anna que tout le monde adore ! Peu à peu, à côté des autres enfants de sa tribu d’amis, Anna va montrer des retards ce qui ne semble pas affecter sa propension au bonheur. Mais plus elle grandit, moins l’enseignement est adapté à son cas, malgré la bonne volonté de tous. Elle sera envoyée dans une structure spécialisée mais s’en acomode car cette fillette ne veut pas causer de souci. Tout au long de sa croissance et lorsqu’elle sera une jeune femme, elle se comportera de façon légère, malgré une grave maladie.
Ce livre raconte l’histoire d’une génération de femmes, middle-class ou aisées, à Londres, plutôt féministes et passionnées par la vie qu’elles ont choisie. Jess continuera à œuvrer pour l’anthropologie, curieuse des autres, partageant ses savoirs, nous enseignant pas mal de choses, mais sans voyager, pour s’occuper de sa fille, la prunelle de ses yeux, l’épine de son cœur. Elle se marie un moment avec un type sympa et joyeux mais pas très intello, exultera avec un Africain rencontré dans un centre de soins, craquera peut-être pour un bonhomme sensible et attentionné, la narratrice ne sait pas. Elle rapportera dans le livre le comportement de grands écrivains ayant eu un enfant handicapé, nous faisant réfléchir sur les problèmes de culpabilité. Et sur le gros souci de l’avenir : que deviendra Anna, si naïve, si sensible, si fragile lorsqu’elle disparaîtra ?
Elle nous raconte aussi les histoires parallèles d’amis, de collègues, de relations. Un livre de facture classique, foisonnant, très agréable. Cet article de Libé en dit plus : L’article de Libé avec photo de l’auteure, superbe !
Un bébé d’or pur (The pure gold baby) de Margaret Drabble, 2014 pour la France aux éditions Christian Bourgois, 400 pages, 22 euros.
Traduit par Christiane Laferrière.