L'humour Echenoz

Appâtée par la critique unanimement hilarante du Masque, j’ai acheté Vie de Gérard Fulmard d’Echenoz qui m’avait épatée avec 14, minus opus sur la grande guerre. Ce n’est pas mon genre de critiquer un livre que je n’ai pas aimé, mais ce n’est pas que je ne l’ai pas aimé, celui-ci, c’est que je n’y ai rien compris. A sa décharge, il grouille de personnages interlopes et bizarroïdes, dont je ne retiens rien au chapitre suivant, de vocabulaire alambiqué que j’apprécie et de tournures rigolotes. Rien n’est perdu, sauf peut-être mes neurones qui ont tendance à se diluer dans l’usure du temps car lorsque je lis d’autres critiques, je note que l’Obs l’encense : « Jamais là où on l’attend, l’auteur de « Je m’en vais », de « Ravel » et de « 14 » invente aujourd’hui le polar marabout (bout d’ficelle, selle de cheval….) afin d’établir, à sa manière, burlesque, que les officines politiques sont des cloaques, que les stewards se crashent, que le pire est devant nous et « le hasard, l’ignorance des causes ». Tout cela mené dans une prose de claveciniste, à un rythme de galopeur et avec une légèreté de fulmar boréal. » Que les Echos s’en réjouissent « « Vie de Gérard Fulmard », polar parodique et ludique, un pur concentré du génie échenozien qu’on quitte trop tôt, trop vite et à regret sur une ultime pirouette. Il est vrai qu’on y était entré par un tour de malice : « J’en étais là de mes réflexions quand la catastrophe s’est produite. » Là où ? Là où vous voulez. » Et quelques autres médias s’en délectent, ceux qui ne me privent pas de leur lecture vu que je n’y suis pas abonnée ou que je ne les ai pas dé-adblockés.
Donc, si vous aimez les polars absurdes qui se passent dans d’irréalistes arcanes politico-cloaquesques, si les portraits de personnages improbables et burlesques vous font rire, si les faits divers advenus rue Erlanger vous passionnent, ils sont plutôt flippants, vous aimerez ce livre qui détaille entre autre la défenestration de Mike Brant, l’assassinat puis l’ingestion d’une étudiante batave par un petit Nippon, et autres drames de la vie comme la chute d’un débris céleste sur l’hypermarché d’Auteuil. Et vous vous attacherez, ou pas, au petit bonhomme ringard qui donne son titre au livre, un loser qui monte une sorte d’agence Duluc sans aucune expérience.
Il est évident que l’auteur s’est amusé à écrire cette histoire abracadabrantesque en pariant peut être qu’il y semerait des situations et des mots extravagants comme nous le faisions jadis pour agrémenter nos harassantes réunions de prépro. Une sorte d’exercice de style. Pourquoi pas ? Car même si j’y comprends que pouic, je ne peut pas nier (de crabes) que c’est plaisant à lire et que ça n’a rien à voir avec notre navrante réalité !

Vie de Gérard Fulmard d’Echenoz, 2020 aux éditions de Minuit. 236 pages, 18,50 €

Texte © dominique cozette

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