Federica Ber est le titre du livre de Mark Greene, un roman original, un récit déconcertant car on ne sait pas trop si l’on a affaire à une histoire d’amour improbable ou à un polar, peut-être les deux mais pas vraiment. L’amour y est curieux, le polar y est proche de l’irrésolu. Ce qui fait que le mystère persiste jusqu’à la fin alors qu’il ne s’agit pas d’un livre à suspense. Quoique.
D’abord, il y a ce fait divers inexplicable : un jeune couple amoureux auquel tout sourit, qui vient de remporter un énorme succès lors d’un appel d’offre architectural, est retrouvé mort au pied d’un à pic dans les Dolomites. Le plus fou, c’est que l’homme et la femme sont attachés l’un à l’autre par un lien, comme s’ils avaient voulu mourir vraiment ensemble. Ils sont vêtus comme pour aller dans un lieu chic alors qu’ils ont gravi de la pente et pas qu’un peu. Aucun indice, aucun témoignage ne permet d’adhérer à l’hypothèse du suicide. Cependant, il est question d’une tierce personne, une femme qui les accompagnait au début du week-end, avec qui ils ont pris des repas. Une femme secrète, discrète qui logeait dans un gîte. Et dont on connaîtra juste le nom.
Le fait divers traverse la frontière italienne. Le nom de l’accompagnatrice interpelle un homme, à Paris. Il se souvient parfaitement de cette femme étrange, rencontrée vingt ans plus tôt, et revue dans des circonstances inattendues, pour des pique-niques sur des toits, des rendez-vous non conventionnels, hasardeux même, dans une salle de jeux. Mais d’amour entre eux, pas grand chose. Une femme frêle mais d’une grande force physique, une femme capable de porter de lourdes charges et de vivre dans des ambiances délétères. Puis qui avait soudain disparu.
Vingt ans plus tard, l’enquête piétine. Il recherche sa trace, retrouve tous les lieux qu’ils avaient fréquentés ensemble, les toits aussi, avec un petit espoir.
Le livre a un charme fou, l’Italienne, celle qui est morte, nous donne l’image d’une femme muse, d’une sorte de poétesse de la vie qui en connaît le sens et sait comment le transmettre aux autres. Quant à l’autre, la mystérieuse, elle pourrait faire penser au rat d’un hôtel de Monte-Carlo (dont je ne retrouve pas le nom du film, il me semble que c’est Audrey Hepburn pourtant) et on a envie d’en savoir beaucoup plus sur elle, qui est-elle, d’où vient-elle, qu’a-t-elle de commun avec le couple. Mais l’auteur nous en dira-t-il un peu plus ?
Federica Ber de Mark Greene, 2018 aux éditions Grasset. 208 pages, 18 €.
Texte © dominique cozette