Fabriquer une femme

C’est le dernier livre de Marie Darrieussecq, une autrice qui ne me passionne pas toujours. Dans Fabriquer une femme, elle reprend les deux filles qu’elle nous avait présentées dans d’autres romans (que je n’ai pas lus), Rose et Solange, habitant un bled nommé Clèves où elle a déjà situé ses histoires. Ces deux ados, les meilleures amies du monde, habitant l’une en face de l’autre, commencent à diverger à l’âge de quinze ans. Car à quinze ans Solange accouche très très douloureusement d’un môme dont elle ne voudra pas, dont elle ne sait pas trop qui est le père. C’est la cata. Rose, elle, continue son petit bonhomme de chemin, sage, studieuse et commence à se dévergonder gentiment lorsqu’elle va étudier « en ville ». Elle découvre l’alcool, les fêtes, le sexe.
Ce qui est marrant dans ce livre, c’est qu’il nous est raconté par les deux bouts de la lorgnette, d’après Rose, puis d’après Solange. Ce ne sont pas les mêmes sons de cloche, bien sûr. L’une fait ses études, retrouve ses parents le week-end, une famille solide, aide ses voisins etc. Le garçon dont elle est tombée amoureuse très jeune deviendra son amoureux officiel et aura le droit de passer ses après-midi dans la chambre de la jeune fille, porte fermée. Tous deux sont à la découverte de leurs corps et de leurs émois, inexpérimentés, hélas pour leurs premières expériences fatalement décevantes. Mais elle l’aime, c’est réciproque et elle sait qu’il sera son mari et le père de ses enfants.
Solange quant à elle vit mal sa vie de famille qui n’est pas une bonne famille. Elle abandonne le bébé à sa mère qui l’a prénommé Thierry, aïe, en souvenir d’un bébé qui est mort avant Solange. Pour Solange, la vie, c’est le théâtre, le cinéma, la télé, séduire, vivre à la marge. Ce trajet l’emmènera jusqu’à Hollywood (via Londres) où elle peut enfin briller. Enfin pas toujours. Elle gagne super bien sa vie mais est-elle heureuse ?
Elles se reverront plus tard, adultes, dans la grande métropole californienne, lors d’une première où toute la famille de Rose est invitée ainsi que les parents de Solange et son fils, grand ado handicapé mental. Car le film doit consacrer Solange. Mais mais mais…
Ce livre est distrayant, Marie manie la plume avec talent mais je trouve que tout ceci manque de sincérité. Je veux dire que c’est un peu clinquant, on cite des noms de lieux, de people, on peut même coucher avec… j’ai eu l’impression que MD nous faisait faire une visite guidée dans années 80-90. Avec Internet, ces intrusions dans le passé sont devenues courantes, précises et faciles. A part ça, comme je l’ai dit, ça se lit bien, que demander de plus ?

Fabriquer une femme de Darrieussecq, 2024 chez P.O.L. 334 pages, 21 €

Texte © dominique cozette

Social media & sharing icons powered by UltimatelySocial
Twitter