Chère Brigitte Macron,
Je ne doute pas que vous ayez fait le maximum pour que votre petit protégé, lorsqu’il était votre élève, apprenne au mieux à manier la langue. On ne peut pas dire qu’il n’aura pas joui de votre savoir lors de cours particuliers. Très particuliers. Mais alors, chère Brigitte, comment se fait-il qu’il confonde encore délation et dénonciation ?
Tout récemment, à propos des violences faites aux femmes, il a en effet annoncé qu’il ne voulait pas « que nous tombions dans un quotidien de la délation » alors qu’il était question de dénoncer les soupçons de violence commises sur une femme.
Parfois, c’est bien pratique de parler de délation quand on préfère l’omerta sur certaines questions, car elle renvoie immanquablement à la période tristement célèbre de la « dénonciation » des Juifs. Qui est de la pure délation. C’est pourquoi votre époux aurait dû parler de dénonciation, qui participe d’une bonne intention, contrairement à la délation.
Selon l’institut du salarié :
« La dénonciation consiste à révéler l’existence d’une situation contraire à la morale […] On se met dans ce cas à la place de l’autre, victime pour laquelle on compatit, ou bourreau qu’on exècre. La dénonciation est motivée par le bien-être d’autrui que l’on sait menacé, et auquel on ne peut rester indifférent. Faire cesser cette situation en la révélant nous procurera […] la satisfaction d’avoir bien agi. La dénonciation vise à faire du bien. »
« Les leviers de la délation sont différents. C’est la volonté de nuire, ou de régler ses comptes qui amène le délateur à révéler des faits avérés ou pas […] La dénonciation c’est vouloir du bien, la délation vouloir du mal à l’autre. »
A la décharge de votre cher époux, beaucoup de tribuns, journalistes, politiques, confondent ces deux mots, abolissant de fait leur indéniable antinomie. Certains le font sciemment, se sentant peut-être visés en tant que Membres de la Grande Confrérie des Hommes, notamment lors de l’affaire DSK, ou plus récemment Weinstein.
Votre époux, ancien élève et chouchou, qui est aussi notre président à tous, je ne l’imagine pas vicieux au point de vouloir culpabiliser toutes celles et ceux qui tenteraient d’intervenir dans le noble but de sauver une femme (et des enfants) dans ces affaire de violences, affaires qui, dorénavant, regardent tout le monde. Ne serait-il alors tout simplement qu’un mauvais élève en français ? Ce qui vous mettrait bien dans l’embarras.
Il serait alors intéressant de lui suggérer d’abuser (encore) de vos compétences pour un meilleur usage des mots car nous savons bien comment une utilisation erronée de la sémantique peut nous induire en erreur. Donc nuire à la compréhension de la chose publique en en détournant les intentions, ce que ne souhaiterait pas notre président.
Je vous remercie, chère Brigitte Macron, de transmettre à qui de droit avec tout le respect que je vous dois.
Texte © dominique cozette