C’est une chanson d’Elli et Jacno adaptée de Lonely Lovers des Stincky Toys. Mais c’est aussi le titre du petit livre de Carole Fives. Plasticienne (site ici) et écrivain, elle nous offre un court récit sincère et extrêmement touchant en cette rentrée pléthorique.
Elle narre l’histoire d’un divorce — est-ce celui de ses parents ? — dans les années 80 qui déchire les quatre membres de la famille. Chacun a voie au chapitre, sauf le jeune garçon, et c’est ainsi que se développe cette affreuse cicatrice dans la vie des protagonistes.
La mère est impossible. Pénible. Capricieuse. Malade des nerfs. Son propre père, médecin, ne s’est jamais occupé de la soigner, a préféré s’en débarrasser auprès d’un homme amoureux.
Le mari ou père des enfants, ne pouvant plus assumer, décide donc de se séparer d’elle, sans joie, avec une énorme culpabilité. Il s’entendait tellement bien avec son fils ! Mais il s’avère après quelques temps que la mère est incapable de s’occuper de ses enfants, elle fait tellement n’importe quoi, chantage permanent au suicide, picole, dope, amants en série, que le père finit par les récupérer. Elle va alors s’installer dans une communauté hippy dans le midi où elle semble s’épanouir. Mais elle se rend compte que c’est louche de ne pas avoir ni enfant, ni compagnon près d’elle, alors elle va tenter de reprendre un de ses enfants, sans se poser la question du déchirement des sentiments.
Je ne vous raconte pas le livre, mais ce qui est remarquable dans ce texte, c’est que la douleur même muette y est clairement perçue, sans pathos. On suit le petit garçon dans la perte de repères et de sécurité qu’on lui inflige, ainsi que le sentiment grandissant de culpabilité dont la soeur ne se remettra pas. C’est très bien écrit, la tristesse qui affleure n’est jamais larmoyante et, faute d’entendre la version du garçon, on imagine terriblement son désarroi.
La fin est étonnante. Elle pourrait s’inscrire dans la théorie de la résilience.
Que nos vies aient l’air d’un film parfait de Carole Fives aux éditions Le Passage. 2012. 120 pages.
Texte © dominique cozette