Daniel R. était un publicitaire réputé. Arrogant. Méprisant. Phobique. Prétentieux. Talentueux. Campagnes très populaires (Bison Futé, Un verre ça va, trois verres, bonjour les Bougnats, heu, bon). Il disparaît et je le retrouve, morte de rire, sur un petit film de Pierre Carles, un Strip-Tease, tout imbu de sa personne, tout gonflé d’orgueil, tout égocentré sur lui-même. C’est lui qui a inventé les toits blancs — son architecte ne voulait pas, ne sachant pas qu’il était Créateur, « erreur » — (le C en captitale, c’est lui qui le prononce, j’ai l’ouïe fine). Il ne voulait pas non plus, ce ballot d’archi, faire la piscine bleue ! Mon dieu, mais quelle couleur, alors. Bref, maintenant, Daniel R. est copié partout ! « Maintenant, tout le monde veut faire ça. Marrant ! On va croire que c’est de l’égocentrisme… (regardant la photo de sa maison avec un amour infini) : C’est joli quand même, non ? Honnêtement ! »
Quand Carles lui demande pourquoi il a quitté la pub, c’est parce qu’il s’était programmé pour, autour de 40 ans, « retrouver ma vie d’adolescent, être assis sur des caisses, dessiner et peindre ! » Quelle sortes de caisses, Daniel ? Chez toi, c’est pas trop le délire rootsy..
Puis il propose à ses amis de leur faire la lecture de son scenario pour le dessert. Son scenario s’intitule « Y a plus de jeunesse ». « Faudrait que je le retravaille mais à chaque fois que je le lis, je le trouve superbe ». Son ami producteur, le lisant, n’a jamais tant ri, l’a trouvé génial. Mais il n’y a pas assez de souffrance dans l’acte de création.
Sur son petit-fils : « il est adorable cet enfant. A trois ans et demi, il parle le français, l’anglais, le portugais. L’autre fois, nous prenions le petit-déjeuner et comme la bonne n’était pas encore là, nous pouvions être comme si nous étions chez nous (sic). Donc nous étions dans la cuisine, normaux (re-sic). Et il me dit : « pourrais-je avoir un autre tabouret parce que celui-ci est instable. » Trois ans et demi ! Je vais finir par croire que, hein (il tapote sa tempe) quand même, le grand-père y est pour quelque chose, non ? »
Oui, sûrement, Daniel, 25% du capital génétique de cet enfant, c’est toi.
Sur la pub : « moi je connais des gens dans ma profession qui sont devenus de pauvres perroquets, à la peau fripée, qui se lèvent le matin en se disant : ah, c’est formidable, c’est un métier de jeunes. Pitoyable, non ? »
Sa femme qui accuse son âge, ce qui est courageux de nos jours, d’accuser, je veux dire d’accuser son âge, courageux aussi de la part de Daniel, car elle accuse ainsi l’âge de son mari. Il a donc gardé la même femme — qu’il ne voit presque jamais — et semble très amoureux de sa fille au point de faire de la photo artistique ( !) d’elle en petite tenue (« lance tes seins au ciel ! »). Donc sa femme « les gens disent de Daniel qu’il est mégalo. Ce qui est complètement faux. … C’est la simplicité. » Cut ! Puis vue d’eux deux, cheveux au vent, dans un hors-bord lancé sur la grande bleue,
Daniel veut montrer que son corps est jeune, alors il se fait filmer allongé à plat dos au bord de sa piscine bleue (il a inventé les piscines bleues, rappelez-vous) en mini-slip de bain, renflé du phallus. Puis il entre lentement dans l’eau, très lentement, en poussant des petits cris et des petits soupirs orgasmiques de vierge consentante.
Il dit « Moi, j’ai envie de créer. Simplement réussir, je trouve ça vulgaire, voilà. » et, allez, Daniel, une autre petite ! « Moi, ce dont je rêve, c’est d’avoir la force de vivre indépendamment de ce qui sera reconnu ». Traduction : j’aimerais avoir les couilles de me foutre de ce que les autres pensent.
Et pour conclure, Daniel ? : « J’ai le temps d’avoir du coeur, j’ai le temps d’aimer, j’ai le temps de penser à autre chose qu’à moi-même ».
Pour ceux d’entre vous que ça amuserait de voir ce film (faut quand même être con pour accepter de se faire tirer le portrait par Pierre Carles, le roi de la dérision) cliquez ici
Comme m’a dit mon mec : ça fait penser au film de Schroeder sur Amin Dada.
Toutes proportions gardées. Mais ce n’est pas faux.
Texte interventionnel © Daniel R.
Texte additionnel et rough © dominiquecozette.
eh, oui je suis allé visionner le film. çà donne envie cette chronique, on y croit pas. C’est délectable de connerie. En même temps, on en proposerait le personnage pour un long mètrage, on n’en voudrait pas: trop outré, cousu de ficelles blanches.
une dernière petite phrase à sa femme énamourée: » tu sais ce que j’aime chez toi? c’est moi! » Et cette potiche, qui a peut être jeté son soutif au feu il y a 40 ans, lui répond d’un ton un peu vieille france: « mais oui, tu as raison. » Reflexion faite, le feminisme, elle a du passer à coté non?