Une autre tranche de vie de Lionel Duroy dont « le chagrin » avait bouleversé les foules ET moi-même en 2010 et qui racontait la monstrueuse comédie familiale déjà narrée en d’autres termes dans « priez pour nous » (1990, lien du blog que j’ai écrit récemment ). Je ne sais pas s’il faut en avoir lu un des deux pour apprécier ce nouvel opus, « colères », paru l’été dernier, qui décrit et analyse le vie actuelle de sa famille recomposée en pleine décomposition. Je pense que c’est préférable.
Il est donc marié avec son deuxième amour, une femme douce et idéale de 15 ans sa cadette, rencontrée alors qu’il se faisait salement plaquer par la première, Agnès, mère de ses deux premiers enfants.
S’appliquant tous deux à recréer une « vraie » famille à l’abri de toutes les tempêtes, ils font deux filles (qui ne s’entendront jamais) et affrontent les problèmes à mesure qu’ils arrivent : la rupture cruelle du grand fils, camé, qui va faire payer lourdement à son père les blessures de son enfance, les conflits permanents entre les deux filles, leur futur départ du foyer mais aussi (et surtout peut-être) l’impossibilité de l’homme à prouver son amour total à celle qu’il aime d’un amour fou.
Ce livre n’est pas qu’un récit, c’est une sorte d’analyse que l’auteur s’efforce de faire entre les événements présents et ceux du passé, comme des ponts jetés entre tous les protagonistes de sa vie, l’explication presque génétique des comportements de chacun avec irrémédiable répétition de leurs erreurs, des tares qui sautent ou pas les générations, des défauts rédhibitoires dont il se croyait protégé pour les avoir autopsiées chez d’autres, notamment sa mère.
En somme, il pense que tout a une racine quelque part avec rejets ici et là et, impuissant à les contrôler, il met tout en oeuvre pour tenter de comprendre pourquoi il n’arrivera jamais à rien avec ceux qu’il aime le plus.
Lionel Duroy parle de Colères face caméra : c’est émouvant.
Colères de Lionel Duroy chez Julliard, 2011. 212 pages formidables imprimées dans l’Eure.
Texte et dessin © dominique cozette