Avec toutes mes sympathies

Le titre du livre d’Olivia de Lamberterie Avec toutes mes sympathies ne révèle en rien le sujet de son livre si ce n’est que, traduit de l’anglais, il signifie avec toutes mes condoléances.  Elle l’a écrit pour pallier le vide qu’a laissé son frère, suicidé à 46 ans, il y a trois ans, jetant sa famille abasourdie dans un abîme de chagrin. Sa famille qui s’attendait au pire car cet adorable garçon, jeune-homme puis homme souffrait de dépression chronique, appelé dysthymie. Il n’y arrivait pas. Sa vie était un boulet. Elle ne lui servait à rien. Il se forçait pour toutes choses bien que de commerce très agréable, trop poli pour être pénible, élevé dans une « vieille » famille conservatrice style never complain et, comme beaucoup d’hommes, mutique sur son ressenti. Mais parfois, il faisait le clown, dépassait même les bornes de la rigolade. Un des plaisirs du récit est de pénétrer dans le monde chic et bien pensant de l’autrice, dont elle ne se sent pas solidaire.
Alexandre avait déjà fait des tentatives, dont une à l’hôpital où justement il était soigné pour une TS. Il avait laissé une lettre d’adieu à sa femme avant de disparaître dans la nuit canadienne, où il fut retrouvé hagard. Il fut interné. A Montréal étaient nés ses deux enfants. Sa sœur Olivia avait déploré cet éloignement tout en se félicitant qu’il parte pour la bonne cause : l’amour. Mais c’était plus compliqué que ça. Chez lui, c’était compliqué. Et s’il faisait des adieux un peu appuyés avant de s’éclipser quelque part, ses proches s’inquiétaient. Et puis, cette maladie, ce mal être le rendait fragile. Il avait des problèmes avec son travail. Alors il se consola dans l’alcool, ce qui faisait dire aux toubibs que le problème était là. Alors que c’était juste un symptôme.
C’est ainsi que sa sœur, journaliste, s’est décidée à prendre sa plume. Pour lui rendre sa vie, son humour, son originalité, son innocence. Pour faire rejaillir tous leurs bons moments, raconter les autres sœurs, les parents, les ex, toute cette famille recomposée pleine de joie de vivre dans des beaux endroits au bord de la mer, souvenirs de vacances dans les maisons joyeuses.
Je ne dis pas que le livre est gai, je l’ai même trouvé morne au départ. Mais après,  fort du portrait taillé par son adoratrice de sœur, Alexandre est devenu un personnage tellement attachant qu’on en demande encore, qu’on n’a pas envie de le voir s’envoler. Ce livre a reçu le prix Renaudot essai 2018.

Avec toutes mes sympathies d’Olivia de Lamberterie, 2018 chez Stock. 254 pages, 18,50 €

Texte © dominique cozette

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