Amour filial, amour paternel, sacrée histoire

Elle se passe dans des coins précis de France, le Jura, Lyon, Saint-Claude, Oyonax, les lieux y sont cités, décrits, la nature s’y tricote, elle y tient un beau rôle. Le livre de Pierric Bailly s’intitule Le Roman de Jim. Jim n’est pas encore né lorsque Aymeric sort de prison pour des histoires de travaux irréguliers et revoit par hasard Florence, aide-soignante,  rockeuse de quarante ans, qui ouvre son manteau pour lui montrer son ventre. Elle est enceinte de six mois mais le père, marié ailleurs, est hors champ. Les deux amis de voisinage passent la soirée ensemble. Lui est, par choix, intérimaire, il aime les boulots qui ne durent pas trop et l’emmènent dans des domaines différents, scieries, supérettes, usines, travaux saisonniers. Pas le genre à se fixer, ayant déjà formé un « petit couple » avec une copine de classe.
Ils s’entendent si bien qu’ils ne cessent pas de se voir. L’amour avec le gros ventre ne le gêne pas mais il n’imagine rien au sujet du gamin. Il accompagnera la délivrance, aidera la mère comme il peut jusqu’à ce que l’amour pour le tout-petit lui tombe dessus. Et ça sera la grande histoire de sa vie, ce petit Jim. Tous les trois iront vivre auprès de la mère de Florence, veuve, râleuse mais connaissant tout sur les plantes et les bestioles du coin, dans une vieille ferme avec dépendances. La pêche, la chasse, les arcs, les balades en forêt, les réponses aux questions quand l’enfant les posera, Aymeric saura y faire, le petit l’appellera papa sans savoir qu’il ne l’est pas.
C’est très beau, très ordinaire aussi, très pétri d’humanité.
Mais voilà qu’un jour débarque le père biologique de Jim, effondré par la mort accidentelle de sa femme et ses enfants. Inconsolable, détruit, il demande juste un peu d’amitié. Jim a dix ans. Et c’est là que tout se complique, forcément. Il y aura de l’énervement, du malheur, un peu d’espoir, d’énormes chagrins,  puis plus rien, puis le temps qui passe avec des surprises pas toujours positives.
Très beau roman dont on voit les images comme dans un film, dont on peut partager les larmes, sur lequel surtout on s’interroge sur le rôle du père, de la paternité, sur l’amour filial. Et sur le mensonge lorsqu’il est, ou pas, justifié, pour l’intérêt de l’enfant malgré lui. Jim, je l’ai aimé, tout le monde l’a aimé, mais peut-être pas toujours de la meilleure façon. Pierric Bailly n’hésite pas à dire qu’il s’agit d’un mélodrame, d’une histoire sentimentale. Bourrée d’émotions, quoi. Bouleversante, oui, vraiment.

Le roman de Jim par Pierrick Bailly, 2021, aux éditions P.O.L.

Texte © dominique cozette

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