Il n’y a pas de fumée sans fric

Un scientifique, Robert Proctor,  vient de sortir un pavé de 750 pages sur l’industrie du tabac, ses scandales, son CA, ses ravages etc… Le livre est remarquable car c’est une étude qui porte sur les « tobacco documents » sortis du secret depuis 1990, soit 13 millions de documents numérisés. Puis épluchés pendant 10 ans. Enorme. Car il met à jour l’énorme complot des puissantes firmes de tabac pour entraver toute mise en garde. On sait depuis 1920 que le tabac est cancérigène. En 53, les dealers de la mort se réunissent pour s’entendre pour ne pas ébruiter l’affaire, qui le sera quand même dix ans plus tard.
Enorme aussi le marché passé grâce au plan Marshall, la fameuse aide à la reconstruction de l’Europe de l’après-guerre, pour rendre accro les Européen, fumeurs de brunes moins nocives parce que plus difficilement inhalables. C’est le sénateur de Virginie, ce bon tabac doux, qui a eu l’idée d’un package où, pour 2 dollars de nourriture, un dollar de tabac était envoyé à l’Europe.
On peaufine la douceur des fumées, on les sucre, on les bidouille pour qu’elles aillent plus vite au plus profond des poumons en accélérant l’addiction. Je ne vous parle du polonium 210 qui, en vingt clopes dans la poche, équivaut à 300 radios thoraciques. Ni du plaisir à fumer qui n’est qu’une pure fabrication marketing contrairement aux drogues ou à l’alcool qui, eux, produisent ivresse ou sensations fortes.
Tout ce qui pourra être tenté pour augmenter l’enrichissement du secteur sera fait. Tout ce qui pourrait éveiller des soupçons de la part des autorités sanitaires, des gouvernements, des fumeurs, sera tu. Beaucoup d’organismes anti-tabac, ou indépendants seront infiltrés ou arrosés. Des experts de l’OMS reconnaissent avoir été roulés dans la farine.
La cigarette est l’invention la plus meurtrière de l’humanité. Elle tue plus que le paludisme, plus que le sida, plus que la guerre, plus que le terrorisme. Et surtout : plus que tous ces éléments réunis. On estime à 100 millions les victimes du XXème siècle. Et peut-être à un milliard pour le siècle actuel (en même temps, on est trop, non ?).
Chaque année, la production de clopes pourrait remplir la pyramide de Khéops et dépose, en se consumant, 60 000 tonnes de goudrons dans nos poumons. Il y a beaucoup d’autres choses à apprendre dans cet article du Monde du 25 février, ici d’où ces infos succinctes  sont tirées. Ça vaut son pesant de mégots.
Une réplique m’avait frappée  dans un film iranien (je crois)  :
– ça ne vous dérange pas si je fume ?
– Non, non,c’est vous que ça dérangera plus tard.
Ah, j’oubliais le titre du bouquin : Golden holocaust (et non pas golden low coast, ou goldo hole low coast)

Texte (d’après le Monde) et peinture © dominique cozette

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