C’est qu’il est bavard, le héros de Daniel Pennac, il en raconte des histoires sur son corps !
Les hommes, sauf à être hypocondriaque, ont tendance à ne s’intéresser qu’au corps des femmes lorsque celui-ci est appétissant et qu’ils en feraient bien leur affaire. Mais le sien, à part les histoires de franche camaraderie virile qui tournent autour de la quéquette, de celui qui pisse le plus loin, qui a la plus grosse ou qui l’a fait cinq fois dans la nuit, ou alors au contraire quand plus rien ne marche, il s’en bat les flancs. Mais voici que Daniel Pennac, très inspiré, s’empare du sujet, superbe idée, et qu’il nous compte tout ce que peut vivre un organisme masculin de 13 à 87 ans. Et c’est pas triste. C’est même très amusant car il y décrit finement des petites choses qu’on a tous sans jamais en parler, il explore divers tabous et livre de curieuses recettes pour soigner des plaies, péter discrètement, anesthésier avec rien, éponger ses pollutions, entre autres. Il nous montre comment tester tous ses sens car il trouve qu’on les sous-utilise. Mais attention, danger.
A travers son corps un peu chétif au départ mais qu’il apprendra à façonner, il nous raconte sa vie d’amant, de mari, de père, d’ami, de jeune, de vieux, de stressé, de malade. Il y redoute les prémisses de l’horrible Alzheimer, nous familiarise avec ses acouphènes, nous invite à son myélogramme. On va faire connaissance avec ses fonctions intestinales, sa paire d’organes intimes, ses problèmes urinaires, l’intérieur de son nez. Il va s’appliquer à décrire ses éjaculations et les effets de l’amour. Puis la perte du désir et l’impuissance.
C’est jouissif et réjouissant pour ne pas dire réjouissif et je l’aurais lu plus tôt si son passage à la Grande Librairie ne me l’avait dévendu. J’ai trouvé sa façon d’en parler un peu fade. Et je m’aperçois avec ce billet, que la mienne l’est aussi. Pas facile, d’en parler mais allez-y, c’est très divertissant. Et instructif.
Daniel Pennac. Journal d’un corps. 2012 aux éditions Gallimard, 382 pages plus un index détaillé.
Texte et illustration © dominique cozette