Amours et autres obsessions

Ce n’est pas le livre de la décennie ni le meilleur des Moriarty, cette fameuse écrivaine australienne qui dissèque les liens entre humains principalement ceux liés aux relations amoureuses, mais Amours et autres obsessions m’a aidé à remplir quelques nuits blanchâtres et c’est déjà pas mal. C’est longuet à souhait, plein de digressions et d’explications, mais c’est aussi ce qui fait le charme des livres un peu épais qu’on a plaisir à retrouver.
L’histoire est assez simple : Patrick Scott vit avec son petit garçon de huit ans depuis la mort de sa femme chérie, victime d’un cancer fulgurant quand le petit avait trois ans. Ce dernier ne se souvient pas d’elle, bien sûr. Au début du livre, on se trouve au cabinet d’Ellen, hypnothérapeute, trentenaire, vivant seule et rêvant de l’amour qui dure. Sa mère l’a fabriquée avec un amant éphémère qui cochait toutes les bonnes cases du géniteur idéal, avant de vivre avec deux copines, les marraines d’Ellen. Elle rencontre Patrick sur un réseau, ce n’est pas le coup de foudre immédiat d’autant plus qu’il n’est pas très à l’aise car il lui apprend qu’il est harcelé par son ex (la seule à dire « je » dans le livre) qui le suit partout, lui envoie des textos, des fleurs etc. Cette femme a servi d’objet transitionnel à Patrick et s’est formidablement bien occupée de son gamin, lui en étant incapable. Pour le gamin, c’était sa maman. Ça se passait super bien, la famille de l’épouse décédée l’avait même adoptée. Jusqu’au jour où Patrick l’a jetée sans état d’âme, sans réelle explication, sans lui donner le temps de s’organiser et de dire au revoir au gosse. Et sans l’autoriser à le revoir.
C’est pourquoi elle continuera à lui faire payer cette injuste rupture, elle n’a rien fait de mal, elle a bien accepté le fait qu’il aimera toujours sa femme morte plus qu’elle… Donc pourquoi ? Et ce n’est même pas parce qu’il a rencontré Ellen.
D’ailleurs, Ellen connaît cette femme sans savoir qu’il s’agit d’elle. Ellen acceptera elle aussi les conditions de ce nouvel et bel amoureux : l’amour qu’il aura toujours pour sa femme, le gamin à élever et toutes sortes de contingences auxquelles elle devra faire face et s’accoutumer au fil du temps…
Je ne vous en dis pas plus, il y a quand même pas mal de suspense que je divulgâcherai pas.

Amours et autres obsessions par Liane Moriarty, (The hypnotist’s love story, 2011), traduit par Béatrice Taupeau, au Livre de Poche. 576 pages, 9,70€

Texte © dominique cozette

Encore un sacré Moriarty !

J’adore cette auteure australienne qui nous livre de gros romans dodus pleins d’histoires de familles souvent inextricables, avec des petits ou des gros secrets derrière les portes, des caractères difficiles à dompter, des trahisons, des événements plus ou moins graves difficiles à surmonter, dans des jolies familles vivant au beau soleil de leurs jardins et vérandas, égayées par les rires et les cris d’enfants qui donnent sens à la vie.
A la recherche d’Alice Love ne faillit pas à cette règle. Cette fois, Liane Moriarty a utilisé un ressort dramatique, pas tout neuf, certes, mais extrêmement efficace pour bâtir une intrigue : l’amnésie. Alice Love tombe alors qu’elle fait du step dans sa salle de sport. On l’hospitalise et la voilà revenue dix ans en arrière : elle se croit enceinte, ne reconnaît pas le contenu de son sac avec une robe taille 36 et de la lingerie ultra fine. Lorsque sa sœur arrive (elle apris deix ans !), elle lui demande de prévenir Nick, son adorable mari. Mais elle n’est pas enceinte, elle a trois enfants, et Nick, appelé sur son insistance, lui répond de façon agressive. En fait, elle va apprendre qu’ils ne vivent plus ensemble, qu’ils divorcent et que c’est elle qui l’a viré. Elle ne veut pas le croire, son cœur est plein de lui, c’est impossible.
Prétendant que sa mémoire est revenue, elle quitte l’hôpital, aidée de sa sœur chérie qui, elle aussi, semble quelque peu fâchée. Elle se débat avec les éléments qu’on lui donne, pourquoi sa charmante voisine lui tourne-t-elle le dos, et quel est cet homme, charmant par ailleurs,  dont on dit qu’ils ont entamé une relation agréable.
Sous le prétexte de sa chute, elle donne le change comme elle peut à tous ceux qu’elle rencontre, car, bizarrement, elle est devenue une super woman à l’agenda de ministre, à la tête de diverses activités scolaires ou sociales. Ses enfants, très remuants, ont compris qu’elle ne se souvient de rien, Nick, son mari vient lui donner un coup de main mais rien, dans son attitude malgré la gentillesse de sa femme, ne montre qu’il aurait envie de revenir à la maison. De plus, elle a peine à croire les reproches qu’elle lui a faits pendant ces années où il bossait comme un fou pour sa famille, donc n’était pas vraiment là. Beaucoup lui parlent de Gina et l’importance qu’elle a prise dans leur vie. Elle flaire une liaison avec Nick mais non, en fait elle est morte dans un accident de voiture sous ses yeux et elle n’a pas encore réussi à s’en remettre.
Elle ne comprends pas non plus la froideur de sa sœur, sa sœur qui enchaîne les fausses-couches et s’en détruit la vie. Mais qui écrit une sorte de psychanalyse à l’attention de son médecin, ce qui nous éclaire un peu plus. La mémoire met du temps à revenir, ce ne sont que des parfums et odeurs qui envoient des flashes. En tout cas, elle redevient celle d’avant, plus cool, gourmande, moins exigeante pour les enfants qui apprécient. Nick semble parfois à un millimètre de craquer…
Puis lors de la gigantesque tarte qu’elle avait organisée avec l’école et la ville pour la bonne cause, les souvenirs débarquent en un fatal puzzle. Avec évidemment les ressentiments, surtout ceux concernant Nick dont elle comprend alors pourquoi elle ne veut plus de lui. Mais ce n’est pas si simple, il y a aussi l’autre homme, il y a l’Alice d’avant et celle qu’elle est devenue en dix ans, qu’elle n’aime pas vraiment. Il faut se reconstruire, s’occuper au mieux des enfants et de sa vie à elle, renouer avec sa sœur, faire le deuil de la fameuse Gina…
J’adore les livres fleuves de Liane, bourrés des petites choses de la vie, des travers de chacun, de leurs faiblesses et tentations. Sans oublier le suspense, car jusqu’au bout, on ignore le dénouement. (Trois autres critiques de ses romans sont sur ce blog)

A la recherche d’Alice Love de Liane Moriarty (What Alice forgot 2009). 2019 chez Albin Michel, traduit par Béatrice Taupeau. 464 pages. Et au Livre de Poche.

Texte © dominique cozette

Neuf parfaits étrangers

De Liane Moriarty, j’avais beaucoup aimé deux romans antérieurs, Secret du mari et Petits secrets, grands mensonges. Des romans psychologiques où tout commence toujours dans la joie et la bonne humeur avant que se fissure la cuirasse de ces belles vies et que les machinations les plus viles aillent bon train. J’ai trouvé ton dernier livre au Monoprix pendant le confinement, et c’est assez rare qu’il y ait une très bonne littérature dans ce magasin. Mais il y en a.
Les Neuf parfaits étrangers vont se connaître dans un centre de remise en forme idéal, un sublime endroit perdu au cœur de l’Australie. Y viennent pour des raisons diverses une écrivaine seule, la cinquantaine, rejetée par son éditeur pour son dernier ouvrage en même temps que plaquée par un bel escroc aux femmes seules et riches. Un très jeune couple en Lamborghini, lui simple et amoureux de sa… voiture et de sa jeune femme malgré toutes les opérations plastiques qu’elle a subies pour être encore plus belle, ce qu’il déplore. Un type baraqué, un peu rond,  pas très sympa de prime abord, que la romancière associe à un serial killer, ronchon. Une autre femme seule, mère de quatre filles, que le mari a quittée pour une jolie et charmante jeune femme avec laquelle il fait un voyage de trois semaine en Europe, avec les filles. Un très beau mâle, conscient de son attractivité, sorte de super héros qui aime faire chasse aux vilains maris  pour venger leurs victimes. Et une famille composée d’un couple d’une quarantaine d’années et de leur fille qui va fêter ses vingt ans au centre et ceux de son jumeau suicidé il y a quelques temps.
Cette cure de renouveau et de pureté est fondée sur un règlement drastique. Interdit d’emporter des boissons ou de la nourriture, les livres ne sont pas conseillés et il n’y a pas de télé. Mobiles et écrans divers sont confisqués et la cure commence par plusieurs jours de silence total. Il est évidemment impossible de communiquer avec  l’extérieur. Le régime alimentaire est très strict et commence, comme le silence, par un long jeûne. Le corps est massé, assoupli, oint, etc. On y apprend à méditer, à prendre sur soi, à sortir ses failles. Mais il y aura des « activités » beaucoup plus stressantes et inattendues.
La maîtresse des lieux est une sublime femme très grande, très belle, qui a fui la Russie et dont la passion, semble-t-il, est d’offrir une transformation totale à chacun, à l’issue de ces dix jours. Mais qui est-elle ? Une perverse ? Une folle ? Une thérapeute réellement sincère ? En tout cas, rien ne peut l’atteindre ni assouplir sa discipline.
C’est un pavé assez passionnant car Liane s’y entend pour composer des portraits de personnages dont en a envie de savoir ce qu’il leur est arrivé. Elle s’y connaît aussi en ressort psychologique et en coups de théâtre, si on peut dire. Chaque chapitre s’arrête au bord de la falaise et c’est difficile de résister à la curiosité.
Malgré tout, il y a un passage assez longuet où le récit, comme les neuf curistes, ne sait se maîtriser. En fait, ce n’est pas très grave car ce qu’il se passe est bizarre, incroyable, je pourrais même dire non crédible. Mais nous sommes dans une fiction. L’histoire poursuivra son chemin un peu mieux balisé pour que, finalement, on se dise que c’est un très bon roman.

Neuf parfaits étrangers de Liane Moriarty, 2018. Traduit par Béatrice Taupeau. 2020 aux éditions Albin Michel. 510 pages, 22,90 €.

Texte © dominique cozette

Le suspense de Liane Moriarty

J’avais adoré Le secret du mari (voir mon blog), de Liane Moriarty, écrivaine australienne très psy à suspense. Avec Petits secrets, grand mensonges, rebelote. Au début, j’ai eu un peu peur de m’être fourvoyée avec cette histoire de mamans et de gosses en maternelle qui font une choucroute d’une petite histoire de cour de récré. Et j’ai bien fait de poursuivre car cette diablesse d’autrice sait ajouter un par un les ingrédients qui vont pimenter le cours des choses. Il y a les mamans têtes à claques qui prennent leurs mômes pour des génies, les mamans serre-tête mères la morale, et les plus normales, les sympas. Il y a aussi les dessous des mariages, les fameuses unions parfaites qui cachent bien des saletés. Il y a aussi les histoires perfides de l’ex remarié avec une jeunette et qui devient l’homme idéal après avoir abandonné la première avec sa petite. Il y a la jeune mère célibataire dont la conception du gamin laisse un sale goût. Il y a les violences conjugales, les pardons, les menaces, les horreurs de la vie ordinaire quoi. Il y a le café au bord de l’eau où le bel homo sert de bien bonnes choses et réconforte les plus fragiles. Et il y a les petits mensonges des enfants pour embrouiller le tout.
Ça se passe dans une station balnéaire où ils vivent à l’année, ça sent l’iode, et les petits rituels anglo-saxons se succèdent, les bienvenues de rentrée des classes, les soirées de parents, les soirées quizz de bienfaisance. Et puis, le drame. Qui est réellement responsable ?
Un très bon livre d’été, ça se dévore comme un chouchou tombé dans le sable, ça grince sous les dents, quoi.

Petits secrets, grand mensonges de Liane Moriarty, 2014 pour la VO. Traduit par Béatrice Taupeau. Editions du Livre de poche. 576 pages, 8,20 €.

Une série en a été tirée : Big Little Lies, avec Nicole Kidman et Reese Witherspoon.

Le secret du mari, arghhh !

Le secret du mari de Liane Moriarty est un thriller en même temps qu’un roman psychologique. Ça se passe en Australie. En piste, trois « familles » de personnages :
En un, Cécilia, son mari et leurs trois filles, famille idéale, belle, ayant tout réussi, heureuse, jusqu’à ce qu’un petit grain de sable s’insinue dans les rouages : le mari ne fait plus l’amour à la femme depuis des mois. Puis la femme qui, cherchant un truc au grenier, découvre une enveloppe sur laquelle sur mari a écrit : à n’ouvrir qu’après ma mort. Troisième truc : elle lui en parle. Ça le met dans tous ses états…
En deux, un trio composé de deux cousines unies comme deux jumelles depuis leurs naissances. Leurs mères sont jumelles. L’une des cousines, Tess, est mariée avec Will et ont un petit gamin tout mignon, et l’autre, Felicity, est jolie mais obèse. Tous trois sont toujours fourrés ensemble, ils ont monté une boîte qui marche bien. Le grain de sable vient de que Felicity a maigri de trente kilos et est devenue magnifique.
En trois, Rob et Lauren, un autre couple, avec un petit gamin qu’adore la mamie, Rachel, et qu’elle garde régulièrement chaque semaine. Le grain de sable vient de ce que le couple annonce à la grand-mère qu’ils vont s’envoler pour New-York pour une mission de deux ans. Rachel est désespérée, elle ne pourra plus voir le petit. Elle n’aime pas sa bru qui le lui rend bien.
Le gros thème de l’histoire, c’est que Rachel avait une fille, sœur de Rob, morte assassinée à 18 ans, dont on n’a jamais retrouvé l’assassin. Les trois « familles » sont imbriquées les unes dans les autres d’une certaine façon et c’est tout le talent de la romancière de nous balader dans les méandres des révélations, nous laissant dans un suspense terrible tout au long du livre.
La surprise du chef c’est que dans l’épilogue, l’auteure nous offre encore des révélations que les héros n’auraient jamais pu connaître. Qui aggravent, allègent ou explicitent les actions qu’ils ont commises. Bonne idée.

Le secret du mari de Liane Moriarty, 2013 pour la VO, 2015 pour la VF (traduit par Béatrice Taupeau). Edition Albin Michel et Le Livre de Poche, parmi les meilleures ventes actuelles à la FNAC. 500 pages, 7€90

Texte © dominique cozette

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