Ce pavé de plus de 500 pages, Soit dit en passant, écrit par Woody Allen avec tout l’humour qu’on lui connaît ne nous apprend en fait pas grand chose sur lui-même tant il s’est distillé façon puzzle dans ses films et ses interviews. Il trouve que sa vie offre peut d’intérêt, que ses films ne sont pas des chefs-d’œuvre et qu’il a eu beaucoup de chance pour en arriver là !
Le sujetsensible, l’agression sur leur fille adoptive Dylan, est largement évoqué avec les noms et références de tous ceux qui ont plaidé en sa faveur et contre Mia Farrow. Une affaire complexe pour laquelle il n’a jamais été condamné malgré deux enquêtes de police et bilans psychiatriques. Il cite le plaidoyer de Moses, un des enfants, qui dépeint sa mère adoptive sous un jour effrayant, ce qu’elle semble avoir été, maltraitant les enfants, en rendant certains qui ne lui convenaient plus après essai, laissant mourir seule une de ses filles atteinte du sida. Et privant la présumée victime de tout contact même épistolaire, avec son père. Quand celle-ci parle de son agression lors de l’affaire #metoo, elle a trente ans, n’a jamais revu son père depuis l’âge de 7 ans. Woody ne pense pas qu’elle ment mais qu’elle a subi toutes ses années un lavage de cerveau qui l’a rendue sûre de son fait. Woody comprend que Mia ait été furieuse de sa relation avec sa fille adoptive Soon-Yi (adoptée à sept ans avec l’ancien mari de Mia) mais avoue que Mia et elle n’étaient plus qu’un couple de façade, ils n’ont jamais vécu ensemble, il n’a jamais dormi chez elle et Soon-Yi et lui ne s’aimaient pas. Mia disait d’elle qu’elle était débile et Soon-Yi trouvait qu’il était aux ordres de Mia comme un chien. Leur intérêt est venu plus tard et se sont déclarés quand elle avait 22 ans.
Aujourd’hui, Allen est tricard aux Etats-Unis, et bien que jugé innocent, il n’est plus vu que comme pédophile. Malgré cela, il coule des jours paisibles avec sa femme Soon-Yi et leurs deux filles adoptives, il écrit, il tourne, ils voyagent, ils partagent de bons moments avec de fidèles amis et il se passionne autant pour son métier.
Il faut aimer l’homme pour apprécier ce livre car, même s’il est très drôle, il est farci de noms de comédiens, réalisateurs, chefs op, critiques, gens de télé etc… qui ne nous évoquent rien. Il ne nous apprend rien sur le métier d’auteur et réalisateur sauf qu’il faut laisser faire les comédiens puisqu’il les choisit tous bons, et ne pas oublier de retirer l’obturateur de la caméra avant de tourner.
Il nous raconte tout depuis son enfance où son père traficotait pas mal, son goût pour le sport, sa passion pour le foot et le base-ball, raisons pour lesquelles il fait très peu de prises et tourne vite pour être rentré à l’heure afin de ne pas manquer les matches. Il démonte son image d’intello, il ne l’est pas, et s’il s’est mis à lire et à s’intéresser à l’art, c’est pour pécho. Aidé en cela par sa première femme. Les femmes, son autre passion. Il les aime à la folie malgré leurs défauts, mais lui s’en attribue beaucoup plus. Il nous parle beaucoup de Diane Keaton qui est devenu au fil du temps sa meilleure conseillère (car il refuse de tester ses films comme ça se fait beaucoup, et de retourner des séquences ou une autre fin), ses aventures avec ses deux sœurs, d’autres anecdotes. Malgré l’aversion qu’il éprouve pour Mia Farrow, il admire énormément la comédienne qu’elle est. Vers la fin, il s’attarde sur son tournage parisien Minuit à Paris et consacre une bonne page sur le talent de Marion Cotillard, un grand paragraphe sur la « magnétique » Léa Seydoux et quelques potins sur Carla Bruni qu’il a bien appréciée aussi.
Après Un Jour de pluie, il a du mal a recruter des artistes car ils craignent de se faire mal voir en tournant avec lui. Alors, il fait une tournée en Europe comme clarinettiste, conscient de la médiocrité de son jeu mais comme il a du succès, il est heureux.
Distrayant comme un de ses films, ce livre ne m’a pas convaincue du fait qu’il n’est pas profondément blessé par l’affaire et qu’il fait comme si ça ne l’intéressait pas plus que les critiques de films qu’il ne lit jamais. Mais qui suis-je pour dire ça ?
Soit dit en passant par Woody Allen. A propos of nothing. Traduit par Marc Amfreville et Antoine Cazé. 2020. Aux éditions Stock. 540 pages, 24,50 €
PS/NB :
– La couverture trouvée partout sur Internet est noire avec la mention de « autobiographie » en gros sous le titre. Or, le livre de j’ai acheté en librairie est bleu Stock et sans la mention susdite.
– Sur la forme : le livre ne possède aucun chapitre, il court du début à la fin d’un jet alerte et continu avec parfois, une ligne sautée. Alors si vous dites à votre entourage : « je finis mon chapitre et j’arrive », vous allez au devant de quelques malentendus.
– J’ai édité malgré moi cet article non terminé en croyant appuyer sur brouillon. Erreur réparée.
Texte © dominique cozette