Maylis de Kerangal que j’aime énormément sort ici un nouvel opus intitulé Canoës composé d’une très longue nouvelle centrale, Mustang, et de sept autres récits plus ou moins courts sur le thème de la voix qu’on ne retrouve cependant pas toujours ou très subtilement.
« En mars 2020, précise l’autrice à la fin de son recueil, alors que je commençais à écrire sur la voix humaine, des bouches ont brusquement disparu sous les masques, et les voix se sont trouvées filtrées, parasitées, voilées ; leurs vibrations se sont modifiées et un ensemble de récits a pris forme. »
Personnellement, je préfère les romans, j’aime m’installer dans une histoire qui dure, m’acclimater aux ambiance, faire peu à peu connaissance avec les personnages que Maylis est si douée à créer. N’empêche que ce livre est très plaisant par la magie de l’écriture de l’autrice, sa façon de nous balancer dans un lieu, ici aux Etats-Unis, dans le Colorado pour la novela. Elle part rejoindre son mari Sam installé là avec leur gamin Kid, tous deux parfaitement acclimatés à l’american way of life alors qu’elle va mettre plus de temps à s’y faire, un peu trouillarde pour se déplacer car elle n’a pas le permis. Elle va le passer avec une drôle de nana qui profite de son boulot de monitrice pour charrier des gros sacs de linge qu’elle doit repasser le soir chez elle et rapporter ensuite à qui de droit. C’est pendant une de ces haltes que l’héroïne trouve un gun dans la boîte à gant de la voiture et ne sait plus comment le remettre en place…
D’autres nouvelles racontent une grosse fiesta pour cause de réussite au bac avec la permission de crier de la part des parents. Un veuf qui durant cinq ans n’a jamais réussi à effacer la voix de sa femme sur le répondeur, ce qui met tout le monde mal à l’aise, et l’idée de sa fille pour l’exhorter à le faire. Un enregistrement de voix très diverses dans le studio de deux sœurs maniaques des tessitures qui castent à tour de bras toutes les voix qu’elles peuvent. Les retrouvailles de deux copines dont l’une, qui bosse maintenant à la radio, a perdu « sa voix de chiotte » pour une autre voix plus consensuelle…
Tout ça est bien agréable à lire même si je ne suis pas convaincue à cent pour cent du format des récits.
Canoés par Maylis de Kerangal, 2021 aux éditions Verticales. 170 pages, 16,50 €
Texte © dominique cozette