Linder, elle en a la nana !

C’est sa première rétrospective, elle en est tout émue ! Paris, en plus, la ville qui a le mieux compris son travail depuis toujours, alors qu’en Angleterre, elle est restée longtemps marginale, vue comme une artiste post-punk, et alors ? Alors elle est bien plus que ça, la belle Linder.

Née en 54 à Liverpool, grandi à Manchester,  ces petites villes ouvrières où l’industrie textile s’écroulait, la petite Linda Mulvey veut d’abord faire de la danse. Ses parents savent à peine que ça existe, les cours de danse. C’est no. Pour se venger, elle fera moult collages de danseurs/seuses affligées, à la place de la tête, d’ énormes gâteaux à la crème, référence à la cakewalk, danse des Noirs se foutant de la façon dont se trémoussaient les Blancs.
Donc, au début, ce furent des collages. Dégoûtée par la représentation de la femme dans les magazines, elle se met à en collectionner des palanquées, des féminins et des masculins, donc des pornos. Et faire des montages soulignant le côté obscène de la pub par rapport à la femme.

Les collages sont un excellent moyen de déconstruire la manière dont d’autres nous imposent leur vision du monde. Et c’est une femme nue avec une tête de friteuse, de fer à repasser, ou un buste aspirateur qu’elle commence à créer. Et beaucoup de porno ou les sexes sont remplacés par ce genre d’ustensiles. Ses travaux sont diffusés dès 78 dans le fanzine The Secret Public.

Ça paraît kitsch aujourd’hui, ça l’est, mais le discours n’est pas démodé. Son travail de collage se poursuit longtemps, s’esthétise, s’artise. Elle réalise beaucoup de portraits où les personnes sont associées, par de soigneux collages, à des fleurs magnifiques.


Devenue Linder Sterling ou Linder, elle se singularise par ses divers talents : elle est photographe et réalise de nombreuses pochettes de disques. Elle se lie avec  Morrissey, le suit fréquemment et publie Morrissey Shots en 92. Mais ses débuts sont marqués d’abord par des performances et de la provoc. Elle utilise beaucoup  son corps, qu’elle découpe, recouvre, dénude, exhibe.

Fin des 70’s, elle fonde, avec Ian Devine, le groupe punk rock Ludus. Lors d’un concert en 82, elle qui est végétarienne s’est parée d’une tunique de viande avec pattes, têtes et abats de poulets récupérés dans les poubelles d’un resto chinois du quartier. Puis, lorsque la poursuite s’allume, elle ôte sa robe-tutu qui dévoile … un fier godemiché noir qu’elle exhibe en hurlant au son des guitares « women wake-up », avec une belle puissance de voix.

A propos de la pornographie dont elle a fait un de ses thèmes de prédilections, Linder raconte comment elle passait pour une détraquée lorsqu’elle allait dans la petite boutique de sa ville quémander les quelques revues de cul au fur et à mesure qu’elles sortaient. Elle était sidérée de voir qu’en France, elles étaient en vue et qu’on pouvait se servir. La différence entre le porno d’hier et d’aujourd’hui, c’est qu’hier il fallait raconter une histoire pour arriver à la séquence où la femme consentait à se mettre nue. L’autre grosse différence, à part une certaine violence de l’acte et le fait que les revues se font rares, c’est que le corps actuel ne présente plus de pilosité.

Sur cette image, on pourrait croire que Linder parle de la taille d’un sexe ou d’un poisson. Mais non.
Cette rétrospective est très riche et polymorphe. On y découvre  ses premiers travaux plutôt gonflés : elle fut la seule à prendre des photos dans une boîte de la ville où les hommes arrivaient en hommes, normal, quoi, petit attaché-case, cravate. Puis allaient se changer et se maquiller aux WC avec les vêtements et les produits de leurs mères, pour passer une nuit sympa.
Linder a aussi fabriqué des masques, obscurs objets de plaisir .

Si vous allez voir cette expo, vous serez entouré de lèvres. Linder colle des lèvres partout et l’affirme : les femmes possèdent plus d’une paire de lèvres. L’affiche de l’expo a choisi ce collage très représentatif du travail de l’artiste.

Pour finir en beauté, Linder a choisi la forme du fanzine pour le catalogue de l’expo, un cahier comme photocopié et agrafé. Très bien.

Et vous découvrirez aussi sa patte de dessinatrice sur quelques petits érotiques, parmi les 200 oeuvres exposées.

LINDER FEMME/OBJET.
Au Musée d’Art Moderne  de la Ville de Paris.
Jusqu’au 21 avril.

Lien ici

Texte © dominique cozette

Oeuvres à la tronçonneuse

Du très lourd ! Impressionnant ! Je parle des sculptures de Baselitz que je viens de voir au Musée d’Art Moderne de Paris. A coup de hache et de tronçonneuse, il nous découpe dans des troncs gigantesque des portraits de personnages bruts, vaguement peints d’une ou deux couleurs, voire recouverts d’un tissu imprimé, et toujours énormes : têtes de femmes et d’hommes d’un mètre vingt minimum, personnages de deux mètres cinquante qui vous toisent avec un certain humour. Les derniers sont des autoportraits où il porte  une casquette avec inscrit « zéro » dessus et où le sexe pointu jaillit du short trop large.

Baselitz est né en 1938 à Deutschbaselizt, en Saxe, dont il empruntera le nom car il s’appelle Hans-Georg Kern.  Son père, instituteur et bon citoyen, inculque l’idéologie nazie aux jeunes enfants et ainsi, Georg sera enrôlé dans les jeunesses hitlérienne dès 43. Par la suite, cette expérience totalitaire n’aura de cesse de l’interroger, Baselitz se défendant d’en porter une part de responsabilité vu son très jeune âge.

Jeune homme, il commence par peindre des paysages et des natures mortes, la pipe au bec,  et se fait virer de son école d’art plastique pour manque de maturité socio-politique. Il décide de passer à l’ouest. Et y reste.

Gros scandale en 1963 qui va le lancer : pour sa première grande expo dans une galerie du centre très bourge de Berlin, il affiche un tableau intitulé « la grosse nuit foutue » qui représente un jeune garçon se masturbant. Tableau saisi, procès pour outrage aux bonnes moeurs, sa réputation d’artiste provoc est faite.

En 75, il innove en peignant ses portraits à l’envers, tête en bas, un moyen de « se libérer » du tableau.

C’est en 80 qu’il brandit la tronçonneuse pour  des oeuvres qu’il expose à Venise. Il est définitivement un immense artiste.

Il serait dommage que vous laissiez passer cette gigantesque et formidable exposition. C’est au MAM jusqu’au 29 janvier 2012.
(En revanche, je ne vous conseille pas les cookies de la cafèt, secs et durs comme des copeaux).

 

Texte d’après Beaux Arts sur Baselitz.

Lard, content, porc, hein ? C’est au MAM dès aujourd’hui.

Visite privilégiée ce lundi au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, grâce à  Anne de L., amie FB, de l’expo de deux jeunes stars montantes de la scène contemporaine, Ryan Trecartin et Lizzie Fitch, tous deux nés aux Etats-Unis en 81, 30 ans donc. Très peu de monde à cette visite de presse contrairement à la foule qui s’était pressée pour Basquia que j’avais vu dans les mêmes (super) conditions. Les artistes étaient présents, en vieux jeans informels, souriants et peut-être déçus de voir si peu d’amateurs.
Leur expo s’appelle « Any ever », jeu de mot qui annonce les jeux de langage de toutes leurs vidéos,  choses foutraques assez déconcertantes, très animées, colorées, outrancières, au langage composé majoritairement  de mots inventés (in english, of course). Des tablets sont à disposition pour un essai de traduction, ce qui donne une sorte d’écriture automatique poético-graphique avec changement de casse, de typo, ruptures de phrases…La curatrice, pour nous rassurer, nous dit que c’est normal de ne rien comprendre car il n’y a rien à comprendre, ah ouf, qu’à se laisser porter, entrer dans les images, recomposer ce qu’on voit/entend, « à ma guise », quoi comme dit l’agaçante pub…
Je n’ai pas eu le courage de regarder cinq heures de film foutraque et sans sens. Alors je me suis penchée sur les installations, appelées sculptures. Bon. Y a de tout. Si on prend la peine de lire la notice, c’est long et  encore moins compréhensible car « il faut accepter de réexaminer les codes du monde réel et les règles du langage », ce que je n’ai pas su faire, apparemment
Pour faire leurs sculptures, « ils prélèvent la matières première lors d’excursion analytiques dans les grands magasins et les boutiques de décoration et de bricolage. L’acte d’achat devient l’occasion d’examiner la valeur protéiforme des biens de consommation, obéissant à un code extrêmement précis lié à l’emplacement dans les rayons, à la façon dont ils sont proposés, à leur appellation ou encore, tout simplement à leur nature » etc…
Nan mais bon. Moi, ça me fait plutôt penser à des ados qui feraient leurs premières installations avec tout ce qui leur tombe sous la main, perruques, collants,  du bois, du sable, des tas de trucs. Ils ont quand même mâché du papier pour en faire des personnages drolatiques. Voilà. C’est énorme, un travail de titan, peut-être que dans 20 ans je pourrai dire j’y étais. Enfin, dans 20 ans, en même temps, j’aurai largement perdu l’esprit.
Et ces deux jeunes artistes — passés au Moma l’an dernier — étaient à notre dispo pour répondre aux questions. Ils n’ont pas trouvé beaucoup d’écho face aux  béotiens de ce vieux continent que nous sommes, légèrement artproof à leur travail certainement passionnant vu d’un certain angle. Mais lequel ? Hé bien,  de l’art contemporain, ma vieille !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(Cette mise en page est totalement foireuse !).
Pour en lire plus sur l’expo, le site du MAM ici. C’est du 18 octobre au 8 janvier 2012.
Et aussi des extraits des vidéos ici

Je n’ai pas vu l’expo des sculptures de Baselitz (c’était fermé le lundi), mais ça, je ne vais pas le rater ! C’est aussi au MAM jusqu’au 29 janvier.

Texte © dominique cozette

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