Monument National

J’avais aimé  le premier livre de Julia Deck, Viviane Elisabeth Fauville, pas trop les deux suivants et me suis régalée avec ce dernier, Monument National, qui fait référence à deux possibles gloires nationales adorées du public, Bebel ou Johnny. Pas ressemblants. Mais dont la jeune femme est un calque de Laetitia, ici prénommée Ambre, asperge blonde, mère adoptive d’une petite Asiate, la narratrice. Ambre gère tout de sa star en mauvaise santé et en fin de carrière, elle souhaite que le couple Macron les invite à l’Elysée pour un soufflage national de 70 bougies car, oui,  toutes les médailles et décorations possibles lui ont déjà été offertes. Y arrivera t-elle ?
Ce n’est pas le moindre suspense de l’ouvrage où l’on croise aussi des 9-3, une caissière de Super-U, mère célibataire d’un même insupportable, et personnage très louche, un type clinquant qui deviendra coach de l’acteur, un patron ordinaire de super marché, une dame Gilet Jaune …
Ce petit monde va se retrouver au Château, où vit la famille people, avec des histoires de jalousie, celle de l’épouse par rapport à la fille de l’idole qui se ramène tambour battant juste avant le confinement. Où se côtoie aussi l’intendance, chauffeur et gardien des somptueuses voitures de collection, cuisinière, jardinier, nurse etc.
C’est un texte effréné, une pochade avec des complots, des surveillances, des unions, car à la clé il y a beaucoup à gagner ou à perdre à la prochaine mort du Monument, cela dépend où l’on se place. C’est bien sûr une satire de notre microcosme, les personnalités n’existant que par le prisme des réseaux sociaux, principalement Instagram, et d’abord le pognon de dingue qu’on peut ensevelir sous le sable brûlant des paradis fiscaux où la vieille star possède une somptueuse villa.
Cocasse et rigolo, un peu foutraque parfois comme aime l’autrice, c’est un prétexte idéal pour prendre du bon temps.

Monument National de Julia Deck, 2022 aux Editions de Minuit. 206 pages, 17 €.

Texte © dominique cozette

Le premier livre de Julia Deck : sanglant !

C’est un petit livre de la collection de minuit, le titre est pénible à retenir car il s’agit d’un  nom composé de  trois : Viviane Elisabeth Fauville, mais on y rentre comme dans du beurre battu en Chantilly, bien sûr je sais que c’est avec de la crème fraîche, mais entrer dans la crème fraîche, ça ne se dit pas, et puis la confusion mentale fait partie du livre.
Donc on suit cette nana trentenaire dans son petit trois pièces où elle essaie de harponner quelques faits de sa mémoire flanchante tandis qu’apprend à vivre sa petite de deux mois, sage et ordonnée. Que s’est-il donc passé ? Oh, de sacrées choses ! Figurez-vous qu’elle a trucidé son psy avec le couteau que sa mère lui avait acheté, jadis, et qu’elle avait récupéré subrepticement chez son mari qui venait juste de la plaquer pour une jeunette.
Comment vivre avec ça ? C’est tout le problème de Viviane. Elle passe tellement inaperçue, elle est tellement transparente, insignifiante, dispensable que les soupçons sur elle sont plus que légers. Et ça, c’est pas bon pour le moral.
Et puis il n’y a pas que ça, il y a cette fille de talent qui l’a remplacée durant son congé maternité et que son patron trouve efficace, il y a ces vertiges qui surviennent et la font transporter dans des lieux de soin, il y a son ex à qui elle n’a rien demandé bien que ce fût le fuyard mais qui réclame le bébé et veut lui rendre le chat de sa mère, il y a que sa mère ne peut pas lui servir d’alibi, et pour cause, la pauvre.
Alors pourquoi va -t-elle, sous le nom d’Elisabeth, trouver d’autres patients du psy, suspects autant qu’elle, ou sa veuve qui s’envoyait en l’air avec quelqu’un d’autre, ou cette patiente par lui engrossée et sur le point d’accoucher ?
Un livre bien foutraque, amusant, incisif où la narratrice peut devenir la spectatrice, ou la victime muette de l’histoire, où l’on picore à loisir des miettes de thriller psychologique, de roman noir, de récit de société.
Bref, un très bon premier roman !

Viviane Elisabeth Fauville de Julia Deck, chez Minuit, 2012. 156 pages.

Texte © dominique cozette

Social media & sharing icons powered by UltimatelySocial
Twitter