« Le coeur du problème » (quel titre bateau !) est un polar « next door », mettant en présence des gens ordinaires à qui ce genre d’aventure peut arriver. Voyez plutôt (comme on dit à la télé).
Simon, conférencier, rentre chez lui — une maison de village en province — et découvre le corps d’un homme tout habillé, chu de la mezzanine dont il a brisé la balustrade. Cherchant une explication en parcourant les pièces car sa femme ne répond pas à ses appels (normalement, elle bosse, elle est chirurgien), il la trouve dans son bain, plutôt absente et surtout, ne désirant pas parler de ça. Il ne peut rien tirer d’elle. Il manque de conviction, de persuasion, de volonté. Je pars, dit-elle, en faisant un sac. Et le laisse là, avec le macchabée. Il peut même appeler la police, dit-elle, ça lui est égal. Il « faut » (du verbe faillir) appeler son ami puis non. Mais cet ami passe quand même lui filer un DVD — en attendant, Simon a fait disparaître le corps anonyme (pas de papiers, pas de téléphone) dans son coffre de voiture— . L’ami remarque la balustrade brisée, sans plus.
Ne réussissant pas à savoir où est sa femme, sa belle-sœur s’inquiétant autant que lui, il va à la police. Mais la jeune fonctionnaire, sans amabilité, lui annonce qu’on ne fait pas de recherches pour un adulte. Un flic plus vieux, plus bonhomme, tend une oreille plus attentive. Il lui proposera plus tard de jouer avec lui au tennis et de fil en aiguille, ils passeront quelques jours ensemble. Simon semble persuadé que c’est pour le confondre, que le flic à la retraite sait qu’il a fait disparaître le corps.
Il s’agit d’un polar sans violence, propre, sobre, morne même tant le héros l’est, sans ressort, sans désir, assombri du fait que sa femme l’ait quitté après l’avoir trompé, mais voulant la préserver de la prison. Les phrases sont longues et alambiquées comme des pensées entre deux eaux où on ne sait où elles vont se terminer, si elles ont raisons d’être, si elles méritent d’exister. Le flic ne délivre aucun indice de soupçon. La disparition du mort, médecin, rendent les choses plus tendues pour notre receleur. Un roman totalement pince sans rire.
Le cœur du problème de Christian Oster, 2015, aux éditions de l’Olivier. 188 pages, 17 €.
Texte © dominique cozette