le corps d’une écrivaine pas vaine…

Avoir un corps, le dernier opus de Brigitte Giraud, est un livre charnel puisque c’est son corps qui écrit le récit de sa vie (ou de la vie de l’héroïne, plutôt) au travers de tout ce qu’il s’y produit. Cet angle décalé nous oblige à nous pencher sur nos sensations, nos douleurs, nos gênes, nos hontes, nos joies, nos plaisirs, tout ce qui façonne notre dehors, en fait.
Comme pas mal de filles, je suppose, la fille (elle s’appelle comme ça) commence sa carrière d’être humain sans vraiment penser à son genre sauf qu’elle aurait préféré être un garçon pour le côté force brute et pas gnangnan que cela induit. Et de moindres contraintes, c’est vrai, quoi, flûte ! toujours serrer ses jambes, être bien arrangée. Bon.
Puis le petit frère, le corps du petit frère, qui va grandir, apporter des jeux de garçons, couper des vers de terre, ce genre. Les règles, les seins, ces choses toujours encombrantes quand on ne les souhaite pas. Le premier baiser, les peaux qui se touchent, le premier sexe d’homme.
L’histoire existe, ce n’est pas qu’un roman biologique. Car le corps est assorti d’un esprit et habite dans un lieu. Rend visite à des parents vieillissants. S’abîme dans des boulots de merde. Puis trouve un certain équilibre avec le garçon. Mais se sent d’abord rétif à faire pousser un enfant, fabriquer des mains et des pieds inside. Mais s’y soumet et y trouve son compte. Et comment le corps de l’enfant se comporte… Jusqu’au coup fatal où le corps du garçon se disloque lors d’un accident. Et l’impossible deuil que tente le corps perdu de la fille, jusqu’à ce qu’il s’y infiltre une nouvelle sensation, une nouvelle envie.
Joliment écrit, avec quelques passages de nos enfances et adolescences partagées qui nous rendraient un rien nostalgiques…
A mettre en perspective avec journal d’un corps de Daniel Pennac, sorti en 2012 et absolument réjouissant, dont j’avais fait un article. Voir ici.

Et un papier que j’ai écrit il y a quelque temps, mon corps mon amour

Avoir un corps de Brigitte Giraud, chez Stock, 2013.  238 pages, 18,50 €

Texte et dessin © dominique cozette

 

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